samedi 5 mai 2018

Alix Senator (tome 2) : "Le Dernier Pharaon" (Casterman ; septembre 2013)

"Alix Senator" est une extension du titre "Alix" (toujours en cours à ce jour) qui voit le jour deux ans après le décès du "père" du personnage, Jacques Martin (1921-2010), figure incontournable de la bande dessinée franco-belge qui aura présidé à la destinée de son héros pendant soixante ans (de 1948 à 2009) !
Avec l'accord des héritiers de l'auteur, l'éditeur demande à Valérie Mangin (et Denis Bajram, son époux) des idées pour élargir l'univers du personnage. Mangin propose de le faire vieillir d'une trentaine d'années. Alix a donc ici une cinquantaine d'années. Il occupe la fonction de sénateur de l'Empire romain. Il a un fils Titus (de mère inconnue) et a recueilli Khephren, le fils d'Enak, sans que l'on sache ce qui est arrivé à ce dernier.
Mangin (connue pour "Le Fléau des dieux", entre autres) signe le scénario. Elle a fait appel à Thierry Démarez pour la partie graphique. Ils ont déjà travaillé ensemble ("Le Dernier Troyen").

À l'issue du tome précédent, Alix et Auguste empêchent le suicide collectif des prêtres de Jupiter. Le Premier augure leur déclare que César est toujours vivant et qu'il prépare son retour.
Rome, la Curie, -12 av. J.-C. Devant ses pairs, un sénateur prononce un discours dans lequel il reproche à Auguste de leur interdire de se rendre en Égypte. Mais pour quelles raisons au juste, demande-t-il ? L'Empereur craint-il que l'un d'eux s'empare de cette province ? Ou qu'il utilise ses richesses pour lever une armée ? Pourtant, souligne le sénateur, Auguste a autorisé Alix Graccus, un "nouveau Romain", à se rendre à Alexandrie. Alix est-il le seul membre de cette assemblée à qui Auguste fait confiance ? L'Empereur, un sourire aux lèvres, raille l'orateur. Lorsqu'Alix est là, sa présence à la Curie lui est reprochée, et aujourd'hui on le critique pour l'avoir laissé partir ! Pendant ce temps, un navire romain arrive en vue du port d'Alexandrie et de son phare. À son bord, Alix, Titus et Khephren...

"Le Dernier Pharaon" est en fait le second tome du "Cycle des Rapaces", une trilogie dévoilant un complot visant à renverser Auguste. Il sera donc plus qu'utile de relire "Les Aigles de sang", le premier album, pour pouvoir pleinement apprécier cette deuxième aventure, d'autant que le diable est dans les détails. Dans ce second tome, Mangin continue à déployer une intrigue politique de grande ampleur amorcée précédemment. En cela, elle reprend plus ou moins le fil conducteur développé par Martin dès les premiers numéros de la série et qui faisait d'Alix un allié (plus qu'un agent) de César enquêtant sur les périls menaçant l'Empire. C'est pareil ici ; bien sûr, Auguste remplace César, mais le sénateur d'origine gauloise, plus vigilant que jamais, veille à la stabilité des institutions romaines et à la pérennité de l'Empire (plus qu'à celle de l'empereur, d'ailleurs). L'autre intérêt de ce "Dernier Pharaon" est que la scénariste répond - partiellement, mais suffisamment - à la question que se sont posée tous ceux qui ont lu "Les Aigles de sang" : qu'est-il donc arrivé à Enak ? Mangin parvient à surprendre, et à surprendre plusieurs fois. Mais malgré la maîtrise du scénario, "Le Dernier Pharaon" pâtit d'une narration lente, sans tension, qui manque singulièrement de densité et qui échoue à maintenir les sens du lecteur en éveil. Le côté historique l'emporterait-il sur la fiction, créant ainsi un déséquilibre ? Notons que l'auteure, assez curieusement, fait preuve d'une cruauté inutile lors du combat avec Rufus dans la pyramide ; le pauvre ayant déjà perdu une main à la guerre, était-il nécessaire de lui ôter l'autre ? Dans l'absolu, les illustrations sont réussies. Le trait de Démarez pourra être qualifié d'hyperréaliste, style graphique qui pâtit souvent d'un manque d'expressivité et de mouvement. L'artiste, afin d'éviter le premier écueil, prend soin de détailler les expressions faciales et le langage corporel de ses personnages. Par contre, le rendu du mouvement demeure un point faible, sensation encore renforcée par la lenteur de la narration. Cela permet au moins de bénéficier d'une grande limpidité dans le déroulement de l'action. Démarez produit une moyenne approximative de sept à huit cases par planche dans un découpage classique. Notons l'approche historique : uniformes, silhouette des bâtiments. Sa mise en couleurs reste encore terne, malgré le travail sur la lumière.

Malgré un scénario intéressant, "Le Dernier Pharaon" souffre des mêmes défauts que l'album précédent, c'est-à-dire une narration trop décompressée qui génère une sensation de statisme dans le déploiement de son intrigue et un manque de tension.

Mon verdict : ★★★☆☆

Barbuz

2 commentaires:

  1. Ton commentaire m'a convaincu d'ajouter cette série à la haute pile de bandes dessinées qui m'attendent. Il ne me reste plus qu'à l'emprunter à mon fils (à qui je l'ai offerte) et à gérer la file d'attente de lecture. A priori un rythme de lecture lent ne me rebute pas et les illustrations hyperréalistes sont de nature à me plaire.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Cette série a-t-elle plu à ton fils ?
      Dernièrement, j'ai fini le quatrième tome. Bien que je reconnaisse ses qualités, je ne parviens pas à m'enthousiasmer pour cette série pour les raisons que j'évoque plus haut. J'ai donc décidé de ne pas aller au-delà du quatrième tome.
      Hâte de lire tes commentaires, en tout cas.

      Supprimer