"Guerre au crime" est un album de soixante-dix pages sorti chez Soleil en juillet 2000. En VO, ce "graphic novel" est paru en sous le titre "War on Crime" (1999).
Il fait partie d'une collection consacrée aux plus grands super-héros de l'univers de DC Comics, signée par le scénariste Paul Dini et le dessinateur Alex Ross.
Chaque album de cette collection propose une histoire entièrement indépendante et "Guerre au crime", malgré le clin d'œil à l' "Année un" de Frank Miller et Davis Mazzucchelli, ne fait pas exception.
Cette histoire a été rééditée par SEMIC au format presse (avec la même couverture), dans le hors-série numéro 19 du magazine "Batman", publié en novembre 2001.
Perché sur le toit du tombeau des Wayne, Batman se remémore comment il est devenu ce qu'il est aujourd'hui ; la tragédie de la perte de ses parents, son serment, ses années de formation et d'entraînement, et, enfin, la révélation. Il réfléchit à cette guerre qu'il mène depuis maintenant quelques années contre toutes les formes de crime : les agressions, les braquages, les gangs, la criminalité en col blanc, la corruption (notamment au sein des forces de l'ordre), les viols, les meurtres et les maniaques. Il utilise son identité de Bruce Wayne pour collecter des informations et pour nouer des contacts qui l'aideront à gagner d'autres batailles, se déroulant dans d'autres arènes. Il se pose la question de savoir quel type d'homme il serait devenu si, enfant, il n'avait pas vécu cette tragédie qui a donné naissance à Batman.
Wayne se rend à une présentation donnée par un promoteur qu'il connaît, Randall Winters. Winters a pour projet de construire des immeubles résidentiels et des boutiques de standing sur le terrain de la zone industrielle de Bayside, qui est aujourd'hui en plein déclin de Bayside. Winters est à la recherche d'investisseurs.
Wayne se méfie et, la nuit venue, Batman va patrouiller à Bayside. Soudain, des coups de feu retentissent et le hurlement d'une alarme déchire la nuit. Batman aperçoit un homme armé qui s'enfuit d'une boutique. Après avoir rapidement neutralisé le criminel, le Chevalier Noir retourne au commerce braqué, s'attendant à des victimes puisque le malfrat a utilisé son arme à feu. Il y trouve en effet les cadavres du couple de propriétaires, tombés en position assise derrière le comptoir. Contournant celui-ci pour finir son examen de la scène du crime, il est soudainement surpris par ce qu'il découvre...
Dini met en scène un Batman plus solitaire que jamais et perçu comme une véritable légende urbaine ; aucun de ses alliés habituels (Gordon ou Robin) ne figure dans cette histoire. Cette œuvre est un véritable roman policier illustré : il n'y a ni bulles, ni dialogues, ce qui permet au scénariste de donner libre cours à l'introspection du personnage et renforce l'impression de solitude - bien que l'espoir soit néanmoins bien présent.
Les illustrations de Ross, en couleurs directes, sont somptueuses et d'un réalisme épatant. Il a réalisé là d'incroyables doubles pages. Son Bruce Wayne, au corps meurtri et couvert de cicatrices, a plus de classe, d'élégance et de prestance que jamais. L'artiste réalise un travail sensationnel sur les ombres et les lumières, se rapprochant de la photographie. Son sens du détail est phénoménal (voir le visage de Wayne et les étals du magasin).
Les éditions Soleil ont publié ici un bel objet, grand format, avec jaquette et impression sur papier glacé. Les remerciements de Dini et Ross et leur dédicace à Bill Finger ont été insérés en début de recueil (avant la double page sur les origines de Batman). Une biographie succincte a été ajoutée dans les dernières pages, ainsi qu'une série d'images séquentielles réalisées par Ross, de Batman se dissimulant dans l'ombre.
La traduction de Xavier Hanart est très correcte, bien que le texte eût peut-être pu être amélioré en quelques endroits.
Comme la plupart des autres albums de cette collection, "Guerre au crime" est un indispensable à la portée de tous les lecteurs et qui renforce l'aspect iconique et intemporel du Chevalier Noir. Une réédition en format "de luxe" serait bienvenue.
J'avais également été frappé par le corps meurtri et couvert de cicatrices de Bruce Wayne et par la beauté des pages. Je trouvais que le scénario de Paul Dini (pour celui-ci et les autres de la série) n'arrivait pas à résoudre son paradoxe interne : en confrontant Batman à un problème réel, il fait ressortir son héroïsme, mais aussi le fait que les superhéros ne sont pas faits pour résoudre les problèmes de société car ceux-ci ne disparaissent pas en tapant dessus.
RépondreSupprimerIci, la résolution des problèmes de société échoit à Wayne et à ses entreprises. Mais là encore, je trouve qu'il y a une réutilisation des concepts de bien et de mal un peu naïve, entre le méchant promoteur, Winters, d'un côté, et le gentil philanthrope, Wayne, de l'autre. Au fil des numéros et des épisodes, il serait intéressant de comptabiliser les montants que Wayne a généreusement lâché ici et là ; pour un résultat nul, en fin de compte, la situation à Gotham City s'empirant à chaque arc.
SupprimerRéutilisation des concepts de bien et de mal un peu naïve : c'est également mon impression, comme si Dini ne peut envisager le superhéros que dans un monde dichotomique Bien / Mal. Du coup : Promoteur = Mal / Philanthrope = Bien, et le superhéros tape sur le méchant jusqu'à temps de gagner. Cela fonctionne bien dans un comics de superhéros, ça ne fonctionne pas à mes yeux quand les auteurs introduisent un réalisme social, avec des problèmes réels et complexes.
SupprimerLes montants lâchés par Wayne : un pognon de dingue ? :) On sait bien qu'intrinsèquement, il ne faut pas que la situation s'améliore à Gotham, sinon Batman n'aurait pu de raison d'être.
Eh bien figure-toi que moi j'aimerais (re)trouver ça, un jour, une Gotham City plus réaliste que l'enfer sur Terre que nous dépeignent Snyder et consorts. Il m'a semblé lire quelque part que la Gotham City du Batman du Rebirth allégeait un peu le trait ; vrai ou faux ?
SupprimerN'ayant pas lu la saison écrite par Scott Snyder, je ne peux pas établir de comparaison. Effectivement, je n'ai pas ressenti l'impression de citoyens vivant dans la terreur d'y laisser leur peau à chaque fois qu'ils sortent de chez eux pour faire leurs courses, ou pour se rendre au travail.
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