"Le Grand Braquage" est un album de quatre-vingt-seize pages sorti chez SEMIC en 2003. En VO, cette histoire a été publiée sous le titre "Selina's Big Score" en septembre 2002. Le titre français fait sans doute référence à une nouvelle de Dashiel Hammet, "Le Grand Braquage" ("The Big Knockover", 1927), bien que l'intrique n'ait pas grand-chose à voir.
Le scénario a été écrit et illustré par Darwyn Cooke. Cooke avait déjà travaillé sur le personnage en réalisant les dessins des premiers épisodes écrits par Ed Brubaker. La mise en couleur est assurée par Matt Hollingsworth, un habitué des nominations aux Eisner Awards et justement nominé pour "Selina's Big Score" en 2003.
Bien que "Le Grand braquage" puisse se lire comme une histoire indépendante, il faut néanmoins savoir que Catwoman est considérée comme morte, assassinée par Deathstroke ; ces événements se sont déroulés dans le numéro de juillet 2001 (#94) de la série "Catwoman", le dernier avant que la série ne soit relancée en janvier 2002.
Une nuit, au Maroc. Lors d'un cambriolage, Selina Kyle parvient à s'emparer d'un calice en or. Des hommes armés sont à sa poursuite ; l'un d'eux fait feu et touche le calice. Elle réussit à leur échapper de façon spectaculaire et se cache dans le conduit d'une cheminée. Une fois la menace passée, elle sort de sa cachette mais réalise que le calice, abîmé, est un faux recouvert d'une simple feuille d'or. Fauchée (elle avait tout investi dans ce coup), découragée et épuisée, elle comprend qu'il ne lui reste plus qu'à rentrer à Gotham City, cette ville qu'elle trouve froide et sale.
Une fois revenue, elle rend visite à Swifty, un prêteur sur gage qu'elle connaît bien et à qui elle avait confié ses affaires personnelles. Souhaitant se refaire rapidement, elle demande à un Swifty stupéfait de la voir en vie s'il a entendu parler d'un gros coup. Celui-ci lui répond qu'il a en effet quelque chose, mais que cela s'annonce dangereux. Selina insistant, il lui propose de repasser le soir pour lui présenter quelqu'un.
Après s'être reposée un moment, Selina retourne chez Swifty. Elle y rencontre Chantel, une jeune femme, qui est la maîtresse de l'un des membres de la famille Falcone, Frank. Falcone veut faire transporter son argent sale au Canada afin d'y acheter de l'héroïne ; l'argent sera acheminé par train privé. Selina jauge sa future associée un instant avant de lui faire confiance, puis, se reconnaissant en elle, décide d'accepter de tenter le coup. Pendant que Chantel espionne Falcone, Selina renoue avec Stark, un ancien contact, afin de monter une équipe...
"Le Grand Braquage" n'est pas une histoire de super-héros, mais emprunte plutôt aux codes du polar et du film noir. Selina Kyle n'y est d'ailleurs vue en Catwoman que dans quelques cases, et lors du casse, si elle porte la combinaison, elle n'a pas le masque.
Cooke montre ici tout son art. Son scénario, captivant et spectaculaire, est d'une cohérence remarquable. Il n'y a aucun temps mort et le suspense va croissant. Les protagonistes sont passionnants. Il creuse leur psyché en utilisant l'introspection comme technique narrative, chaque personnage principal étant le narrateur d'un chapitre. Sa Selina Kyle est une femme fatale magnétique et insaisissable.
Les illustrations de l'artiste, enrichies par les couleurs de Hollingsworth, sont admirables et son style graphique, proche du cartoon, fait mouche et est parfaitement approprié. Cooke, avec une densité de cases par page élevée, opte pour un découpage quasiment photographique de l'action, qui fait indéniablement penser à la pellicule d'un film. Le déroulement du casse n'est cependant pas parfaitement lisible.
Dans l'ensemble, la traduction de Nicole Duclos est plutôt bonne. Il y a un vrai travail sur le vocabulaire. Le texte comporte néanmoins deux fautes de français et la traductrice n'a pas jugé bon de corriger la faute de Cooke au nom de l'hôtel ("Fontainebleau", et pas "Fountainbleu").
"Le Grand Braquage" est un petit bijou, dont il faut idéalement compléter la lecture avec les épisodes écrits par Ed Brubaker, récemment édités par Urban Comics dans leur collection Signatures.
Le Grand Braquage emprunte plutôt aux codes du polar et du film noir. - 100% d'accord. Une histoire que j'ai lue en 2009 et qui se mélange dans ma tête avec les premiers épisodes de Brubaker sur la série. Du coup, je suis allé consulter mon commentaire de l'époque, et j'avais beaucoup aimé, tout en relevant que c'était un hommage aux histoires de Parker, écrites par Donald Westlake. Avec le recul, j'ai préféré ses adaptations des romans policiers mettant en scène Parker.
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Mon avis d'il y a 10 ans :
Darwyn Cooke utilise le personnage de Selina pour raconter une histoire de casse (voler 24 millions de dollars à la pègre, convoyés dans un train). Il précise également dans son introduction qu'il s'agit pour lui de rendre hommage aux livres de Richard Stark (l'un des pseudonymes de Donald Westlake). Au final peu importe qu'il s'agisse de Selina, le récit aurait eu la même saveur avec une autre héroïne. Darwyn Cookke connaît bien ses classiques, l'hommage est très réussi (on a même le droit à une apparition de Pam Grier et Lee Marvin). Son style graphique est arrivé à maturation et il est semblable à celui de New Frontier : rétro à tendance années 50 avec gros encrage évoquant des comics pour enfants mais une composition graphique adulte. Le casse respecte tous les éléments indispensables (méthode dangereuse, forte somme en jeu, composition d'une équipe avec des spécialistes, trahison...). Mais là encore je suis partagé : ce n'est pas une histoire de Catwoman (elle n'apparaît que 2 fois en costume dans des flash-back) et en matière de roman graphique noir Cooke a fait mieux depuis avec The Hunter.
"The Hunter" : je dois encore le lire, il m'attend sagement. Je ne souhaitais pas acheter l'intégrale, mais j'ai réussi à trouver les quatre tomes séparés chez mon libraire.
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