samedi 9 mai 2015

Le Marquis d'Anaon (tome 5) : "La Chambre de Khéops" (Dargaud ; juin 2008)

"La Chambre de Khéops" est le cinquième tome (et le dernier en cours) de la série du Marquis d'Anaon, créée et réalisée par le scénariste Fabien Vehlmann (à qui l'on doit, entre autres, "Green Manor" et "Sept psychopathes"), le dessinateur Matthieu Bonhomme (qui a notamment travaillé sur "Esteban" et "Texas Cowboys") et la coloriste Delf.
La série étant en pause depuis quelques années, il est légitime de se demander si elle va reprendre. Dans un entretien de 2013 accordé au site Actua BD, Bonhomme a néanmoins déclaré qu'il avait réalisé quelques croquis préparatoires pour un sixième tome dont la sortie n'est pas planifiée.
À ce jour, ce cinquième tome n'a connu qu'une seule autre édition, sortie en juin 2008 également et imprimée en 250 exemplaires numérotés et signés (avec une couverture en similicuir rouge, un ex-libris inédit en couleurs, quatorze pages de bonus et l'album en couleurs et en noir et blanc).

L'action se passe en France, sous le règne de Louis XV. Le tome précédent se déroulant vraisemblablement en 1724 ou 1725, l'action de "La Chambre de Khéops" se situe en 1725 ou 1726.
Jean-Baptiste Poulain est de retour à Paris. Il a été convoqué chez maître Vibert, un notaire, pour une raison qu'il ignore. Poulain arrivé, le notaire procède à la lecture du testament d'un certain Umberto Leone. D'autres personnes sont présentes : la domestique du défunt, un boulanger, une chanteuse d'opéra et un maçon.
Poulain est confus ; il n'a jamais entendu parler du défunt et s'interroge sur sa présence. D'après le notaire, Leone est mort au Caire, dévoré par trois crocodiles. N'ayant pas de descendance, il avait chargé maître Vibert de procéder à la répartition de ses biens entre les personnes présentes dans la salle. Chacune aura ainsi droit à 10.000 livres. Tous sont estomaqués par l'importance de cette somme inattendue - et bienvenue.
Après la lecture du testament, Poulain et les autres se rendent à la taverne locale. Poulain réalise qu'aucun d'entre eux ne connaissait le défunt. Il décide de se rendre au domicile du défunt et est reçu par sa domestique. Il y apprend que son bienfaiteur, dont un portrait orne le mur, était un riche négociant, excentrique et curieux de tout. Sa dernière passion était la pyramide de Khéops, dont il pensait qu'elle renfermait un trésor, "le secret des secrets". La domestique apprend à un Poulain étonné que Leone avait fait vider sa chambre à coucher, dans laquelle il ne reste strictement rien.
Poulain, de plus en plus intrigué, embarque sans hésiter pour le Caire, d'autant qu'il commence à s'ennuyer à Paris. Il va tenter de faire la lumière sur la mort d'Umberto Leone et de percer le mystère qui passionnait son bienfaiteur, celui de la pyramide de Khéops...

Après la Bretagne, l'Auvergne, la haute mer et la haute montagne, Vehlmann envoie son personnage en Égypte. Les tomes précédents étaient construits sur des légendes et des superstitions paysannes, et les intrigues teintées de fantastique. Mais le ton de "La Chambre de Khéops" est plus ésotérique que fantastique ; le Marquis des âmes en peine va en effet s'improviser archéologue de l'étrange. Vehlmann semble vouloir faire passer un message en dépeignant la petite communauté de notables français installés au Caire comme un ramassis répugnant de truands et d'exploiteurs. Il traduit les difficultés de communication entre Poulain et les autochtones en retranscrivant l'arabe en alphabet latin, donnant au lecteur le "son", sans la signification, ce qui devient pénible.
Bonhomme livre de belles planches des ruelles de Paris, de celles du Caire, des sombres pièces des maisons égyptiennes, du Nil, du désert et des ruines antiques. La scène se déroulant près des colosses de Memnon, vers la fin, semble par contre ne pas avoir été peaufinée comme elle le méritait (trois ou quatre cases sont moins soignées). Les couleurs de Delf contribuent à créer une ambiance particulière pour chaque lieu.
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En abandonnant le registre fantastique et le folklore français, la série prend une autre direction. L'intrigue ne parvient cependant pas à passionner, d'autant qu'elle se conclut de façon abrupte ; précisons encore que Vehlmann n'a pas prévu d'écrire une suite. Cet album est assurément le moins intéressant et le moins captivant de la série, malgré la qualité des dessins de Bonhomme et de la mise en couleur de Delf.

Mon verdict : ★★☆☆☆

Barbüz

2 commentaires:

  1. Retranscrivant l'arabe en alphabet latin : original.

    Toujours une bonne qualité de narration visuelle et un beau travail du coloriste.

    Abandonnant le registre fantastique et le folklore français : une autre prise de risque qui ne paye pas visiblement. L'auteur ne respecte pas les fondamentaux de sa série, ce qui met à mal la promesse tacite faite au lecteur. Pas facile de trouver le bon dosage entre Plus de la même chose, et Plus d'inattendu.

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    1. L'aspect ésotérique de l'histoire et sa fin abrupte m'avaient fortement déçu. La conclusion est tellement expédiée que j'étais sûr qu'une suite était prévue ; une discussion avec un libraire amateur de la série m'a fait réaliser que ce tome se suffisait, et que de Vehlmann n'avait de toute façon prévu aucune suite.

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