jeudi 22 octobre 2015

"Cartland" : L'Intégrale (tome 1) (Dargaud ; juillet 2004)

En 2004, Dargaud publiaient le premier des trois tomes de l'intégrale de la série "Cartland", créée par Laurence Harlé (1949-2005) et Michel Blanc-Dumont, comprenant "Jonathan Cartland" (1975), "Dernier convoi pour l'Oregon" (1976), "Le Fantôme de Wah-Kee" (1977) et "Le Trésor de la femme araignée" (1978).

"Jonathan Cartland" débute en septembre 1854. Les habitants d'une petite ville vont pendre un Amérindien suspecté du meurtre d'un prospecteur pour lui voler son or. Cartland reconnaît Two-Guns, un Oglala. Bien qu'il soit étonné qu'un Oglala ait pu voler de l'or, le trappeur n'intervient pas. Il se promet néanmoins de venger Two-Guns...
Cartland affronte deux comploteurs qui veulent causer un conflit entre pionniers et Oglalas. Dès le départ, Harlé met en scène un homme qui a soif de justice et qui entretient des liens profonds avec certaines tribus amérindiennes. Le style graphique de Blanc-Dumont est déjà solide mais n'est pas encore arrivé à maturité.
Mon verdict : ★★

"Dernier convoi pour l'Oregon" se déroule en 1857. Cartland a épousé Petite Neige, de la tribu oglala, qui va lui donner un fils. Un jour, en rentrant de la chasse, le trappeur découvre le cadavre de son épouse sur le sol de leur cabane. Les mains de Petite Neige se sont refermées sur des plumes d'aigle arrangées à la manière shoshone...
Harlé fait entrer la tragédie dans la vie de Cartland. Le trappeur, anéanti, s'enfonce dans la dépression, échappe de peu à la mort et devient alcoolique. Quant au trait de Blanc-Dumont, l'évolution par rapport au récit précédent est étonnante. Le sens du détail s'affine et l'encrage et la mise en couleur sont davantage soignés.
Mon verdict : ★★

"Le Fantôme de Wah-Kee" démarre lors de l'été 1859, à Saint-Louis. Cartland y fait connaissance de trois hommes d'affaires. Lors d'une promenade, ils sont témoin d'une scène curieuse : des hommes en soutenant un autre sortent d'une résidence luxueuse et le font monter dans une diligence. Le lendemain, les compagnons embarquent sur un vapeur pour Fort-Union. Le jour suivant, un terrible accident se produit à bord...
Espionnage sur fond de conflit latent entre Nord et Sud, femme fatale, manipulations, hallucinations et fantômes, ambiance surnaturelle digne des "Dix Petits Nègres" ; Harlé signe l'une de ses meilleures histoires. Blanc-Dumont réalise un travail notable sur les physionomies et signe quelques scènes remarquables (dont la poursuite sur les rondins, dans la nuit et sous la neige, les hallucinations de Cartland ou les deux dernières pages).
Mon verdict : ★★

"Le Trésor de la femme araignée" commence en 1860. Cartland est à San Francisco. Il tente de quitter son hôtel sans payer mais se fait attraper et passer à tabac. Alors qu'il gît dans la boue, un commerçant chinois prend soin de lui et l'informe que le richissime Monsieur Bolton rechercher un guide pour une expédition. Cartland va se présenter et Bolton l'informe qu'il souhaite partir à la recherche d'un tombeau pueblo en Arizona...
Cartland va être mêlé à une chasse aux trésor qui va mal tourner. Harlé, dans un récit ennuyeux malgré une intrigue prometteuse, met en scène une famille riche qui va connaître mort et décadence, et établit ainsi un parallèle avec l'homme blanc que son avidité va détruire. Quant aux illustrations de Blanc-Dumont, elles sont exceptionnelles ; décors, visages, costumes, paysages et couleurs, tout est absolument remarquable !
Mon verdict : ★★

Les deux premiers scénarios sont très classiques, mais les deux derniers sont originaux et recèlent d'idées. Malheureusement, les histoires pèchent par des dialogues parfois longuets, les intrigues font des détours et la scénariste complique la lecture en voulant à tout prix employer des termes amérindiens. Finalement, les lecteurs retiendront surtout la progression fulgurante du trait de Blanc-Dumont vers sa maturité. Il est dommage que l'éditeur ait bâclé son travail : il n'y a pas eu de relecture (ce premier tome est criblé de fautes de français) et les bonus sont entièrement absents.

Barbuz

5 commentaires:

  1. Il m' fallu un bon moment (et l'aide de wikipedia) pour me souvenir où j'avais déjà vu le nom du dessinateur : La jeunesse de Blueberry bien sûr. Avec ta présentation de ces histoires, je comprends bien pourquoi cette série est restée dans les annales.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Avec le recul, je me dis que j'aurais dû lire les albums séparés plutôt que les intégrales.

      Supprimer
  2. C'est l'option que j'ai choisie : 1 album par 1 album. J'hésite parfois lorsqu'il s'agit d'un diptyque. Par exemple, j'étais parti pour une lecture d'un seul tenant pour Loup de Pluie (Dufaux & Pellejero), mais en cours de premier tome, je me suis dit que la densité narrative était telle que je préférais faire une pause plutôt que d'avoir l'impression d'un gavage incompatible avec le plaisir de savourer ma lecture.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je m'étais déjà interrogé sur les intégrales Bliss Comics qui sont indigestes, en fin de compte (l'épaisseur de "Harbinger" me décourage systématiquement), ainsi que sur Gil Jourdan (qui sont néanmoins agréables à lire et surtout agrémentées de nombreux bonus vraiment intéressants).
      "Cartland", par exemple, mérite une vraie réédition, soignée, peut-être avec un nouveau lettrage et une relecture sérieuse du texte. Peut-être une nouvelle colorisation.
      Un jour, il faudra que je trouve les albums séparés de tout ça et que j'en fasse des articles.
      J'ai encore quelques intégrales en attente de lecture, notamment les trois premiers volumes de "Jerry Spring".

      Supprimer
  3. C'est une sensation que j'éprouve également avec les intégrales de Jessica Blandy ou de Caroline Baldwin, ou encore Des voleurs d'Empire : c'est trop d'un coup pour que j'arrive à apprécier. Du coup, je fractionne pour revenir à une lecture 1 tome par 1 tome.

    RépondreSupprimer