jeudi 30 juin 2016

"Batman et les monstres" (Panini Comics ; juin 2007)

"Batman et les monstres" est un album sorti dans la collection DC Heroes de Panini Comics en 2007. Il s'agit du premier des deux volumes consacrés au Batman de l'auteur-dessinateur Matt Wagner. En VO, cette mini-série, intitulée "Batman and the Monster Men", a été publiée en six épisodes (novembre 2005 à avril 2006).
"Batman et les monstres" a été presque entièrement produit par Matt Wagner ; il en a écrit le scénario, en a réalisé les dessins, l'encrage et en a illustré toutes les couvertures. Les lecteurs francophones de DC Comics le connaissent pour "Trinité", une histoire qui raconte la toute première aventure commune entre Batman, Superman et Wonder Woman. La mise en couleur a été confiée à un artiste de choix, Dave Stewart, le coloriste aux neuf Eisner.

Norman Madison, dirigeant d'entreprise, prend le petit-déjeuner avec sa fille Julie. La une de la Gotham Gazette fait état de la disparition de Red Hood suite à l'intervention de Batman. À la lecture de l'article, Madison peste ; il déplore la folie qui s'est emparée de la Gotham City et se demande ce qu'il est advenu du sens moral de ses habitants. Puis, père et fille se donnent rendez-vous le soir pour le bal de charité de l'Institut scientifique de Gotham City. Julie mentionne qu'elle viendra accompagnée de son petit ami, Bruce Wayne. Son père lui enjoint de s'en méfier.
Après une séance d'exercice physique, le professeur Hugo Strange demande à son majordome Sanjay si les sujets ont été nourris. Lui aussi se rend au bal de charité ; cela lui pèse, mais il doit fréquenter la communauté scientifique s'il veut pouvoir continuer ses travaux. Il donne quelques instruction à Sanjay et se prépare.
C'est le soir. Dans un entrepôt des docks de la ville, Richie Pantone, l'un des sbires de Sal Maroni, assiste au passage à tabac d'une petite frappe. Il veut savoir où est passée sa cargaison en provenance de Thaïlande. Lorsque l'interrogatoire dégénère, Batman sort de l'ombre dans laquelle il était tapi et neutralise les malfrats.
Le bal de charité bat son plein. Norman Madison a des mots acerbes avec Sal Maroni. Julie offre une danse à Bruce. Quant au professeur Strange, il assène à son auditoire que la recherche génétique est le futur de l'humanité. Lorsque l'une des convives le tourne en ridicule devant l'assistance, elle est loin de s'imaginer qu'elle vit ses derniers instants ; la vengeance du savant sera impitoyable, terrible et sanglante...

Wagner travaille sous quatre angles. Celui de Batman, qui a débuté sa croisade il y a peu. Il n'a pas encore rencontré Robin et ses principaux ennemis ne sont pas ceux que l'on connaît aujourd'hui. Il réalise quelques erreurs et prend de méchants coups, mais il est déjà plein de ressources et en pleine forme physique. Les combats sont narrés de façon remarquable. Ensuite, celui de l'idylle entre Bruce Wayne et Julie Madison, dont Wagner réintroduit le personnage pour lui donner un rôle important. Wayne conserve en lui une part d'optimisme et pense que Madison pourrait être celle qui va vivre à ses côtés. Puis, celui du père Madison, un homme d'affaires criblé de dettes qui, pour sauver son affaire, va passer un pacte avec le diable en empruntant de l'argent à Maroni. Madison va sombrer dans l'alcoolisme, puis dériver vers la paranoïa. Une sous-intrigue peu crédible et qui ne convainc pas. Enfin, le professeur Hugo Strange. Pour le caractériser, l'auteur utilise les codes du savant fou : expérimentations illégales et créatures monstrueuses. Une caractérisation hélas bien timide, à des lieues de l'obsédé schizophrène dépeint par Doug Moench et Paul Gulacy dans le fabuleux "Prey". Enfin, notons le niveau général très moyen des dialogues.
Le style graphique de Wagner peut-être qualifié de semi-réaliste. Le découpage, classique, est limpide. Mais les visages - surtout féminins - ne sont pas toujours réussis et les expressions faciales sont parfois exagérées lors des moments dramatiques. Les couleurs de Stewart accentuent l'ambiance macabre du récit et de la ville.

La traduction de Géraldine Vignard est passable (texte peu soigné, incohérences entre tutoiement et vouvoiement, etc). Notons une coquille et deux bulles inversées.

Bien que souffrant de la comparaison avec "Prey", "Batman et les monstres" est une histoire solide mêlant ambiance de polar et récit fantastique. Dommage pour les dialogues et la sous-intrigue entre Madison et Maroni, qui n'apporte pas grand-chose au récit.

Mon verdict : ★★★☆☆

3 commentaires:

  1. Je me souviens de cette histoire qui aurait pu avoir sa place dans la série Legends of the Dark Knight quand elle existait encore : comme tu le fais remarquer, un récit qui se situe au début de la carrière de Batman.

    Pour la petite histoire, Matt Wagner reprend et développe une histoire initialement parue dans Batman #1 en 1940.

    En relisant mon commentaire qui date (2009), je me rends compte que 'avais été plus enthousiaste que toi. D'un autre côté, j'anticipais déjà ce que je venais chercher car j'avais eu l'occasion de lire l'excellent crossover Batman / Grendel, réalisé par le même Matt Wagner dont la série Grendel et la série Mage m'ont enthousiasmé.

    Le commentaire de l'époque (beaucoup plus court) :

    Matt Wagner mêle adroitement les aspects très ordinaires, mondains de la vie Bruce Wayne, ses rendez-vous amoureux manqués, ses échanges sarcastiques avec Alfred et ses acrobaties en tant que Batman. Il a choisi de situer son histoire au tout début du mythe ce qui lui permet de nous faire découvrir le métier de Batman en même temps que son personnage principal, et d'inclure des erreurs de débutant qui lui donne plus crédibilité et d'humanité. Ce point de vue procure une fraîcheur bienvenue à l'histoire et la naïveté de Bruce Wayne confronté à ses premiers véritables monstres fait surgir, pa contraste, des instants poétiques inattendus.

    Je ne saurais trop vous recommander cette histoire qui sait nous faire redécouvrir un personnage que l'on croyait connaître. De plus Matt Wagner est un professionnel chevronné qui donne un ton unique à sa narration à la fois par le point de vue de débutant qu'il fait adopter à Batman, et à la fois par des dessins d'une précision exquise où chaque trait est nécessaire, où il n'y a pas de place pour le superflu ou l’esbroufe gratuite. Tout est parfaitement maîtrisé. Et le mieux, c'est qu'après ce tome, il y en a un deuxième dans la même veine : Batman and the Mad Monk encore meilleur.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La première lecture m'avait bien plus enthousiasmé que la seconde. Je n'aurais pas dû lire cet album en ayant "Prey" à l'esprit. Mais il se trouve que c'était mon état d'esprit à l'époque de cette relecture.

      Supprimer
    2. Prey : un autre exemple d'histoire qui a fixé ma représentation mentale d'un personnage. Dorénavant, je compare chaque apparition de Hugo Strange à cette première version par Doug Moench & Paul Gulacy.

      Supprimer