"L'Aigle solitaire" est le troisième tome de la série "Blueberry". Cet album est sorti en janvier 1967. C'est le troisième des cinq tomes de ce qui a été appelé le "Cycle des premières guerres indiennes" par l'éditeur et qui s'étale sur un peu plus de trois années de publication (jusqu'en 1969). Du point de vue de la chronologie de la série, l'intrigue narrée ici se déroule en 1867, c'est-à-dire deux ans après la fin de la guerre civile américaine.
"Blueberry" (anciennement "Lieutenant Blueberry") est une série créée par le scénariste belge Jean-Michel Charlier (1924-1989) et par le dessinateur français Jean "Gir" Giraud (1938-2012).
À l'issue du second tome, Blueberry rentre à Fort Navajo après moult péripéties, mais l'endroit est désert. Seul Crowe est resté là à l'attendre. Il explique à un Blueberry méfiant que les Apaches ont donné l'assaut. Bascom y a laissé la vie et près de la moitié de la garnison a péri. Crowe affirme qu'il a réussi a négocier la liberté des survivants avec Cochise. Il veut maintenant que Blueberry l'aide à mettre un terme au conflit. Pour y parvenir, ils doivent poursuivre les ravisseurs du jeune Stanton, des Mescaleros. Ils se lancent sur leur piste et trouvent leur campement. La nuit tombée, Blueberry délivre l'enfant tandis que Crowe crée une diversion et attire l'attention des Indiens pour laisser le champ libre à Blueberry. Le plan fonctionne ; Blueberry continue son chemin, espérant que Crowe s'en est tiré.
"L'Aigle solitaire" démarre alors qu'une escouade de la cavalerie américaine patrouille le long de la frontière mexicaine. Alors que les soldats devisent sur les implications politiques du conflit, leur éclaireur repère des traces de sabots qui coupent la piste et indiquent que la bête est chargée et fatiguée. Le sergent ordonne la poursuite. Ils trouvent le cheval, tombé d'épuisement et abattu par son cavalier. L'éclaireur repère un petit bois où il pense que le cavalier s'est abrité. Les soldats opèrent une manœuvre d'encerclement et aperçoivent deux corps allongés sur le sol. Alors que le sergent secoue l'un d'eux, Blueberry, car c'est lui, se retourne et braque son revoler avant de remarquer les tuniques bleues. Il raconte ses aventures aux soldats, qui l'emmènent, avec le jeune Stanton, à Fort Quitman afin qu'il fasse son rapport au colonel Birdling. Blueberry apprend du sergent que les Apaches ont pillé plusieurs villes et écrasé les colonnes de secours. De nombreux forts ont été évacués, et des centaines de civils, massacrés.
Une fois arrivé, Blueberry explique à Birdling qu'il faut essayer de mettre fin au conflit. Le général Crook rassemble justement une armée à Camp Bowie. Birdling va confier à Blueberry la mission d'escorter un convoi de munitions jusqu'à Camp Bowie...
Blueberry se comporte ici en véritable officier de terrain, en leader prompt à décider et à agir. Outre le lieutenant Craig, que l'on retrouve avec plaisir, deux nouveaux personnages font leur apparition dans cet épisode. O'Reilly, le chef de convoi, est un Irlandais fort en gueule, porté sur la bouteille, qui ne va pas suivre les ordres de Blueberry à la lettre. Malheureusement, son esprit borné, son vice, sa naïveté et son manque de méfiance auront un coût en vie humaines. Le personnage est attachant, mais voir Blueberry renoncer à le faire passer en cour martiale n'est pas réaliste, d'autant que le bougre n'a pas renoncé à ses mauvaises habitudes, contrairement à ce qu'il avait promis. L'autre personnage est Quanah-n'a-qu'un-Œil, ou plutôt Aigle solitaire. Ce chef apache particulièrement retors et audacieux a réussi à infiltrer la cavalerie américaine en tant qu'éclaireur. Il va bien sûr finir par éveiller la méfiance de Blueberry, mais peut-être un peu tard. Aigle solitaire est d'autant plus intéressant qu'il s'agit du premier véritable ennemi juré de Blueberry. Notons enfin le travail de documentation de Charlier ; les noms des forts figurant dans ses aventures ont tous existé ou existent encore. Le scénario, solide est sans longueur.
L'encrage de Giraud semble plus fin. Les postures de ses personnages sont davantage travaillées. Il y a une case dont l'action est confuse. Les scènes de l'embuscade dans le canyon et celles de la fuite du convoi dans la prairie en flammes sont épatantes.
"Aigle solitaire" offre ainsi à Blueberry son premier ennemi juré, Aigle solitaire, alias Quanah-n'a-qu'un-Œil. Le chef apache n'a d'ailleurs pas fini de lui causer des tourments. La suite est contée dans le quatrième tome, "Le Cavalier perdu" (1968).
Mon verdict : ★★★★☆
Barbuz
Blueberry se comporte ici en véritable officier de terrain : surprenant car je me souvenais d'un personnage parfois rétif à l'autorité.
RépondreSupprimerNotons enfin le travail de documentation de Charlier : pour une série, ce travail semble simple même si internet n'existait pas encore, il suffisait d'avoir un bibliothèque personnelle ou municipale bien fournie. Mais à l'échelle de toutes les séries qu'il créait et écrivait, ça prend une toute autre dimension.
L'encrage de Giraud semble plus fin. Les postures de ses personnages sont davantage travaillées : je note que tu continues à observer l'évolution de la qualité des dessins de Giraud, mais aussi de sa narration, respect pour un exercice aussi subtile.
Blueberry est en effet rétif à l'autorité, mais il reste très conscient de son rôle de protecteur et d'escorte.
SupprimerJe me demande si Charlier faisait ses recherches lui-même ou s'il se faisait aider. L'aspect recherches est très présent dans "Barbe-Rouge" également.