"Le Mercenaire" est une série de bande dessinée créée et entièrement réalisée par l'artiste espagnol (catalan) Vicente Segrelles. "Le Mercenaire" a été publié en Espagne à partir de mars 1981, dans le premier numéro du journal "Cimoc", sous le titre "El Mercenario". En France, les aventures du Mercenaire ont été publiées dans le magazine Circus, qui appartenait aux éditions Glénat. C'est chez Glénat que paraîtront les treize tomes qui composent cette série médiévale fantastique. Le premier tome date de 1982, et le treizième et dernier, de 2004.
Le titre VO de ce premier tome est "El pueblo del fuego sagrado". Cet album de quarante-sept planches est d'abord sorti sans titre. Celui de "Feu sacré" a été ajouté en 1986, à l'occasion de la seconde édition. Il a connu quatre éditions en tout, dont une en format poche dans la collection BD des éditions "J'ai lu".
L'action se déroule dans "une grande vallée, nichée dans les hauteurs de la vaste zone montagneuse du continent". Totalement isolé, cet endroit a connu une évolution complètement différente de celle du reste de la planète. C'est une région sauvage où les grands reptiles ont survécu et ont évolué, avec le temps, en des créatures ailées que l'homme est parvenu à dompter. Les habitants de cette vallée ne sont jamais descendus plus bas que l'impénétrable mer de nuages qui sépare les sommets des terres basses et ont ainsi développé une civilisation des hauteurs.
Un homme lourdement armé et équipé, juché sur son lézard ailé, parcourt les cieux et survole les nuages. Il s'approche d'une cité perchée dont le pont-levis mène à un promontoire rocheux. Du sommet de celui-ci, retenu par un bloc de pierre, dépasse un long mât de bois horizontal à l'extrémité duquel une femme, entièrement nue, est pendue dans le vide par les poignets. L'homme en armure amorce une manœuvre d'approche et, d'un coup de lance, tranche la corde qui retient la jeune femme. Libérée, celle-ci tombe directement dans les bras de son sauveur...
Il est indéniable que cette série culte qu'est "Le Mercenaire" s'inspire de certains codes du "merveilleux héroïque" : la période lors de laquelle se déroule cette série pourrait être comparée à la fin de notre Moyen Âge ou au début de la Renaissance, avec en plus des reptiles ailés, des monstres terrifiants et d'étranges cités. Le Mercenaire est un homme qui fait passer son métier avant tout ; certains de ses clients (clientes) ne montreront cependant pas le même niveau d'intégrité et il va l'apprendre à ses dépens. L'utilisation du texte est assez particulière. Nombreuses sont les cases sont le moindre mot et les dialogues sont parfois très succincts, alors qu'à d'autres endroits, l'auteur utilise des cartouches particulièrement bien remplis.
Bien que certaines cases de cet album aient vieilli et que le style graphique puisse aujourd'hui sembler démodé (peut-être à cause du choix de certaines couleurs), l'univers visuel de Segrelles reste époustouflant. L'artiste peint toutes ses planches à l'huile dans un style hyperréaliste. Bien qu'il s'agisse de son premier album de bande dessinée, Segrelles a quarante-et-un ans lorsqu'il le réalise ; il dispose donc déjà d'une certaine maturité artistique. Personnages et paysages sont soignés. La liberté de ton visuel pourra aujourd'hui surprendre ; les principaux personnages féminins semblent arborer fièrement leur corps dans une demi-nudité quasi permanente. Chaque protagoniste dispose d'une physionomie qui lui est propre. Par contre, les planches manquent souvent de mouvement, d'autant que Segrelles utilise un découpage classique dont l'action est parfois très décompressée ; cela pourra donner l'impression que l'action est figée et qu'elle se déroule au ralenti, mais, d'un autre côté, cela renforce encore la sensation d'onirisme que dégagent ces merveilleuses planches.
Assez curieusement, il n'y a aucun crédit pour la traduction, en tout cas pas dans cette édition, qui n'est pourtant pas la première ; après une recherche sur la Toile, force est de constater que le nom du traducteur semble être tombé aux oubliettes.
Le Mercenaire est une série culte qui avait attiré l'attention et les compliments de Federico Fellino (entre autres) : le réalisateur en avait loué la beauté. Cet album n'est sans doute pas le meilleur de la série, mais il est déjà très abouti visuellement.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbuz
Quel plaisir de voir cette série évoquée ! J'ai dû en lire quelques tomes il y a plus de 30 ans, et ton commentaire me fait me remémorer toutes ses saveurs uniques. Merci.
RépondreSupprimerOui ! Ce mois-ci (si je parviens à respecter mon planning) je devrais écrire deux billets sur les troisième et quatrième tomes.
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