"Les Tours de Bois-Maury" est une série de l'artiste belge Hermann (Huppen) dont le titre a été changé en "Bois-Maury" à partir du onzième tome ("Assunta"). Bien qu'Hermann ait œuvré seul sur les onze premiers tomes, il a par la suite continué avec son fils le scénariste Yves H. à partir du douzième tome ("Rodrigo").
"Éloïse de Montgri" est le second volume. Cet album de quarante-quatre planches, sorti chez Glénat en novembre 1985, a connu, jusqu'ici, huit rééditions et trois couvertures différentes.
XIIe siècle. C'est l'hiver en Normandie, au pays de Caux. Le soleil se couche sur la plaine et la nuit tombe. Deux gardes pestent contre le temps et la neige qui s'annonce. L'un deux s'étonne de ne pas avoir encore vu l'étrange berger qui erre sur les terres du seigneur local depuis la veille. Le voici justement qui annonce son arrivée aux sentinelles. C'est un homme étrange, qui dissimule son visage sous un crâne de bélier et porte une peau de mouton en guise de cape. Il souhaite offrir deux brebis au seigneur et la herse se lève afin de les faire entrer, lui et son troupeau. Les gardes n'aperçoivent ni les brigands qui se sont dissimulés parmi les bêtes, marchant à quatre pattes et le dos couvert de peaux de moutons, ni le chien, qui tient davantage du molosse de guerre que du chien de berger. La curée commence ; le premier garde est égorgé et deux autres sont abattus de flèches. L'un d'eux parvient néanmoins à donner l'alerte. Les brigands, sans pitié, frappent d'estoc et de taille tandis que leurs complices partent à l'assaut des murs. La garde est dépassée, submergée et cède rapidement. La voie du donjon est libre. Barricadés à l'intérieur de celui-ci, le seigneur et les survivants comprennent qu'ils sont condamnés. L'épouse du maître des lieux s'inquiète pour leur fils, Basile, qui est resté en bas, mais le châtelain pense qu'il a péri et qu'il ne leur reste qu'à tenir. Les pillards attaquent la porte au bélier.
De loin, les villageois, cachés dans les bois, observent la scène. Ils savent que le château est perdu et se demandent comment ils vont survivre. Impuissants, ils ne peuvent qu'assister, de loin, à l'incendie de la forteresse. Les flammes réduisent le château en cendres. Les pillards s'emparent des richesses et mettent le feu aux chaumières des villageois avant de se disperser. Tandis que les villageois quittent les lieux, l'un deux croit apercevoir les brigands à leurs trousses. Il n'y a qu'un seul homme. Ils hésitent quant à l'attitude à adopter, mais plusieurs d'entre eux fondent sur l'individu en brandissant leurs fourches lorsque leur chien révèle leur présence. Les autres, restés en arrière, s'étonnent de ne voir aucun combat s'ensuivre. Pour cause : il s'agit de l'un des gardes du château qui a survécu aux pillards et a fui avec le jeune Basile, le cachant sous son manteau...
Ce second tome est une réussite. On en apprend à peine plus au sujet du personnage d'Aymar de Bois-Maury que dans "Babette", le tome précédent. Le lecteur apprend juste que le chevalier cherche à récupérer son château et ses terres depuis l'âge de huit ans. Comme dans le premier volume, Bois-Maury n'a pas le premier rôle ; il est plutôt le témoin actif d'une tragédie, en l'occurrence celle d'Éloïse de Montgri, une jeune femme qui a tout abandonné pour mener à bien son désir de vengeance. Hermann crée un personnage secondaire dont l'unique rôle n'est que d'apporter une pointe d'humour dans un récit tragique et violent ; un vieillard accompagné de sa poule Aldegonde, la seule créature à ne pas le rabrouer. Ce vieil homme, bien qu'il ne semble pas forcément s'intéresser aux événements qui se déroulent autour de lui, est un observateur moins fou et moins sot qu'il n'y paraît. Les dialogues sont excellents.
Si le découpage de l'action est impeccable, les visages des personnages (surtout masculins) dessinés par l'artiste ont tendance à se ressembler. Notons le travail sur la couleur, qui est remarquable. Contrairement au premier tome, le coloriste, Fraymond, est crédité en fin d'ouvrage (dernière planche). Fraymond a longtemps travaillé avec Hermann, notamment sur les séries "Comanche" et "Bernard Prince". Hermann disait du coloriste qu'il prolongeait et achevait son travail et qu'il y avait une espèce d’osmose entre eux. La combinaison des deux talents nous offre des planches splendides.
"Éloïse de Montgri" est un très bon second tome, dont une partie de l'intrigue et certains protagonistes conservent toute leur part de mystère, et dans lequel Hermann déploie sa mise en scène d'un Moyen Âge impitoyable, sauvage, violent et plein de fureur.
Mon verdict : ★★★★☆
"Éloïse de Montgri" est le second volume. Cet album de quarante-quatre planches, sorti chez Glénat en novembre 1985, a connu, jusqu'ici, huit rééditions et trois couvertures différentes.
XIIe siècle. C'est l'hiver en Normandie, au pays de Caux. Le soleil se couche sur la plaine et la nuit tombe. Deux gardes pestent contre le temps et la neige qui s'annonce. L'un deux s'étonne de ne pas avoir encore vu l'étrange berger qui erre sur les terres du seigneur local depuis la veille. Le voici justement qui annonce son arrivée aux sentinelles. C'est un homme étrange, qui dissimule son visage sous un crâne de bélier et porte une peau de mouton en guise de cape. Il souhaite offrir deux brebis au seigneur et la herse se lève afin de les faire entrer, lui et son troupeau. Les gardes n'aperçoivent ni les brigands qui se sont dissimulés parmi les bêtes, marchant à quatre pattes et le dos couvert de peaux de moutons, ni le chien, qui tient davantage du molosse de guerre que du chien de berger. La curée commence ; le premier garde est égorgé et deux autres sont abattus de flèches. L'un d'eux parvient néanmoins à donner l'alerte. Les brigands, sans pitié, frappent d'estoc et de taille tandis que leurs complices partent à l'assaut des murs. La garde est dépassée, submergée et cède rapidement. La voie du donjon est libre. Barricadés à l'intérieur de celui-ci, le seigneur et les survivants comprennent qu'ils sont condamnés. L'épouse du maître des lieux s'inquiète pour leur fils, Basile, qui est resté en bas, mais le châtelain pense qu'il a péri et qu'il ne leur reste qu'à tenir. Les pillards attaquent la porte au bélier.
De loin, les villageois, cachés dans les bois, observent la scène. Ils savent que le château est perdu et se demandent comment ils vont survivre. Impuissants, ils ne peuvent qu'assister, de loin, à l'incendie de la forteresse. Les flammes réduisent le château en cendres. Les pillards s'emparent des richesses et mettent le feu aux chaumières des villageois avant de se disperser. Tandis que les villageois quittent les lieux, l'un deux croit apercevoir les brigands à leurs trousses. Il n'y a qu'un seul homme. Ils hésitent quant à l'attitude à adopter, mais plusieurs d'entre eux fondent sur l'individu en brandissant leurs fourches lorsque leur chien révèle leur présence. Les autres, restés en arrière, s'étonnent de ne voir aucun combat s'ensuivre. Pour cause : il s'agit de l'un des gardes du château qui a survécu aux pillards et a fui avec le jeune Basile, le cachant sous son manteau...
Ce second tome est une réussite. On en apprend à peine plus au sujet du personnage d'Aymar de Bois-Maury que dans "Babette", le tome précédent. Le lecteur apprend juste que le chevalier cherche à récupérer son château et ses terres depuis l'âge de huit ans. Comme dans le premier volume, Bois-Maury n'a pas le premier rôle ; il est plutôt le témoin actif d'une tragédie, en l'occurrence celle d'Éloïse de Montgri, une jeune femme qui a tout abandonné pour mener à bien son désir de vengeance. Hermann crée un personnage secondaire dont l'unique rôle n'est que d'apporter une pointe d'humour dans un récit tragique et violent ; un vieillard accompagné de sa poule Aldegonde, la seule créature à ne pas le rabrouer. Ce vieil homme, bien qu'il ne semble pas forcément s'intéresser aux événements qui se déroulent autour de lui, est un observateur moins fou et moins sot qu'il n'y paraît. Les dialogues sont excellents.
Si le découpage de l'action est impeccable, les visages des personnages (surtout masculins) dessinés par l'artiste ont tendance à se ressembler. Notons le travail sur la couleur, qui est remarquable. Contrairement au premier tome, le coloriste, Fraymond, est crédité en fin d'ouvrage (dernière planche). Fraymond a longtemps travaillé avec Hermann, notamment sur les séries "Comanche" et "Bernard Prince". Hermann disait du coloriste qu'il prolongeait et achevait son travail et qu'il y avait une espèce d’osmose entre eux. La combinaison des deux talents nous offre des planches splendides.
"Éloïse de Montgri" est un très bon second tome, dont une partie de l'intrigue et certains protagonistes conservent toute leur part de mystère, et dans lequel Hermann déploie sa mise en scène d'un Moyen Âge impitoyable, sauvage, violent et plein de fureur.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbuz
10 mois d'écoulé entre l'article sur le tome 1 et celui sur le tome 2.
RépondreSupprimerComme dans le premier volume, Bois-Maury n'a pas le premier rôle : je me souviens que ça m'avait déstabilisé lors de ma première lecture. Il n'était pas possible de savoir à l'avance combien de tomes compterait la série. Cela pouvait donner la sensation d'une promesse différée, non tenue.
Contrairement au premier tome, le coloriste, Fraymond, est crédité en fin d'ouvrage : le statut des coloristes a bien évolué depuis, et ce n'est que justice.
Un Moyen Âge impitoyable, sauvage, violent et plein de fureur : une autre caractéristique de la série, qui m'avait fortement marqué, me faisant m'interroger sur la fréquence de ces morts arbitraires, de cet usage de la domination par la force.
Ah oui, dix mois quand même ! Je ne m'en étais pas rendu compte, tu vois.
SupprimerPendant un moment, j'étais presque toujours un peu réticent à la lecture d'un "Tours de Bois-Maury" parce que j'avais la certitude - fondée ou non - que les articles allaient me demander beaucoup plus de recherches que pour toute autre bande dessinée. Avec le recul, je réalise que ce n'était vrai qu'en partie. Certains autres articles m'ont demandé bien plus de recherches que n'importe quel album des "Tours de Bois-Maury".