Le quatrième tome de l'intégrale Panini Comics (en cours) consacrée à Captain America comprend les douze numéros de la série régulière "Captain America" de l'année 1970, du #121 de janvier au #132 de décembre. Chaque épisode du volume compte, en moyenne, entre dix-neuf et vingt planches. Au total, cet épais volume (c'est un album cartonné avec jaquette) comporte donc approximativement deux cent quarante planches (sans les bonus).
Tous les scénarios ont été conçus par Stan Lee, sans exception. Gene Colan (1926-2011) dessine tous les numéros ou presque, puisqu'il est aidé par John Romita pour le #126 (juin). Colan est assisté de Joe Sinnott, Frank Giacoia (1924-1988), Wally Wood (1927-1981), puis Dick Ayers (1924-2014), qui réalisent l'encrage.
C'est, à ce jour, la seule édition de ce tome ; seul le premier a été réédité pour l'instant. La couverture, signée Marie Severin (elle a travaillé à la série "Doctor Strange"), est tirée de celle du #132.
Dans ces pages, Silas X. Cragg, un repris de justice obsédé par Captain America, crée un super-sérum qu'il injecte à un ex-taulard, à qui il confie la mission de liquider le héros, un réseau d'espionnage demande au Scorpion de supprimer Sharon Carter et la sorcière Suprema soumet le crime organisé avant de s'attaquer au SHIELD. L'AIM ayant été encore défait par Captain America, MODOK crée un cyborg pour détruire son ennemi. Le Vengeur se rend ensuite au Vietnam pour libérer un médecin humanitaire. À son retour, il vient en aide au Faucon, piégé par le gang des Têtes de Diamant, avant que le SHIELD ne l'utilise comme appât pour démasquer une taupe. Écœuré, il prend la route pour changer d'air et affronte une bande de motards hors-la-loi. Il va contrarier les plans de Crâne rouge, qui veut assassiner un souverain arabe en visite officielle aux États-Unis en vue de déclencher une guerre mondiale. Puis Steve Rogers est témoin d'une manifestation estudiantine réprimée de façon musclée. Enfin, un mystérieux homme cagoulé réfléchit à un piège fatal pour Captain America.
Lee met d'abord en scène un homme déprimé, qui ne trouve pas sa place dans la société et qui n'a aucun projet sérieux d'avenir (la relation avec Sharon Carter, la femme qu'il aime, ne rencontre que des obstacles). Captain America apparaît comme un héros historique (et donc, dépassé), écrasé par la solitude et la médiocrité, médiocrité reflétée par la tristesse de la chambre de l'hôtel miteux dans lequel il a élu résidence. L'homme ne trouve plus de signification à sa vie de combattant, et les affrontements incessants l'épuisent. Cette première partie est réussie et intéressante. Et puis, Lee décide de lui changer les idées de son personnage et lui offre une virée motorisée à la découverte de son pays. La sombre introspection sombre du personnage se dissipe au gré d'un chapelet de scénarios cousus de fil blanc et au seul intérêt documentaire. Sharon Carter disparaît presque complètement du paysage. Surtout, il semble d'abord impossible à Lee de se débarrasser de l'encombrant Bucky, tout comme Captain America est incapable de tourner cette page de sa vie. Du coup, le personnage et son univers (entre Bucky et les éternels revanchards tels que Crâne rouge et les autres) se répètent sérieusement. Du "post-héros" déprimé émerge alors un "nouveau" Cap, sans doute plus boy-scout, plus superficiel. Quant au Faucon, le personnage est trop peu exploité, hélas. Lee a-t-il voulu l'écarter ?
Même à l'époque, il était assez rare de voir un dessinateur tenir toute l'année sur une série. Colan apporte son talent à ces planches, son sens du mouvement ainsi que cette fluidité qu'il insuffle aux scènes l'action. Notons également l'expressivité des visages et le travail sur les ombres. Bien que toutes les cases ne soient pas soignées de manière égale, la série bénéficie d'une homogénéité graphique appréciable.
Nicole Duclos réalise ici une traduction franchement satisfaisante. Quant aux couvertures d'origine, combien de temps encore l'éditeur se contentera-t-il de les grouper en vrac, et en fin de recueil, plutôt que de les intercaler entre les chapitres ?
La première partie de ces épisodes est intéressante. Lee montre moins d'inventivité que Jim Steranko, mais le discours sombre et fataliste sur lequel il construit ses histoires fonctionne. Jusqu'à ce qu'il fasse partir son personnage en vadrouille.
Mon verdict : ★★★☆☆
Barbuz
Au vu de ton résumé, il s'agit d'épisodes de Captain America que je n'ai pas lu, soit parce qu'ils n'étaient pas traduit en français à l'époque, soit parce que je ne suis pas tombé sur les bonnes revues. Je reste très impressionné par e nombre de séries qu'écrivait de front Stan Lee. Je viens de me replonger dans 2 autres périodes de Captain America (celle de Steve Englehart pour Secret Empire, et les débuts de Mark Gruenwald sur le titre) et je prends conscience que finalement tous les scénaristes successifs ont mis à point d'honneur à intégrer quelques éléments sociétaux, par exemple ici la manifestation estudiantine.
RépondreSupprimerC'est vrai, sacré Stan. Ce qui me surprend aussi, a contrario, c'est qu'il a parfois mis le temps avant de passer la main, même quand il n'était pas forcément inspiré. Sans doute, dans une certaine mesure, était-il un peu obsédé du contrôle.
SupprimerLes questions de société sont repris dans les épisodes des années suivantes. Je vais bientôt m'attaquer au volume de l'année 1973, sans en attendre grand-chose.