mardi 11 juillet 2017

Le Mercenaire (tome 11) : "La Fuite" (Glénat ; juin 2001)

"Le Mercenaire" est une série de bande dessinée créée et réalisée (scénarisée, illustrée, encrée et mise en couleur) par l'artiste espagnol (catalan) Vicente Segrelles. Elle a d'abord été publiée en Espagne à partir de mars 1981, dans le premier numéro du journal "Cimoc", sous le titre "El Mercenario". En France, elle a été publiée dans le magazine Circus, qui appartenait aux éditions Glénat. C'est chez Glénat que paraîtront les treize tomes de cette série médiévale fantastique (qui peut être, hélas, considérée comme finie), entre 1982 et 2004.
"La Fuite" ("La huida" en VO) est le onzième tome de la série. Cet album cartonné de quarante-six planches, sorti chez Glénat en juin 2001, ne compte, à ce jour, qu'une seule édition.

An de grâce 1006. Dans quelques jours, la Terre frôlera Geos, un monde parallèle (voir "L'An 1000", ainsi que "Les Ancêtres disparus"). Le Grand Lama de la Cité du cratère, lui-même originaire de Geos, est gravement malade. Il est alité. Le Mercenaire et Nan-Tay, sa petite-fille, lui rendent visite, accompagnés de Ky ("L'An 1000"). Devant les questions pressantes des visiteurs, le Lama finit par leur avouer qu'il souffre d'une tumeur maligne et qu'il ne lui reste que peu de temps à vivre. Ky sait de quoi il retourne ; elle compte donc se rendre sur Geos et rapporter un cristal radioactif afin de le guérir. Surpris par les connaissances de Ky, et devant l'insistance des jeunes femmes, le vieil homme cède et leur fournit les explications nécessaires à leur mission. Ils devront faire isoler leurs semelles avant le départ, et, une fois là-bas, localiser les pacifiques Acuos, une race de mi-humains amphibiens, et éviter les Mythes.
Les lézards volants du Mercenaire et de Ky les amènent au fameux défilé ("L'An 1000"). Ils attendent la lumière verte. Ky est équipée d'une armure afin de ne pas être désintégrée. Ne souhaitant pas sacrifier leurs deux montures, ils n'en prennent qu'une et s'envolent vers les lueurs verdâtres. Ils passent sans problème et se retrouvent à quelques mètres de la demeure abandonnée du défunt Kay ("L'An 1000"). Le temps presse ; ils disposent de deux jours. Ky trouve un véhicule volant qui les mène à l'entrée du royaume des Acuos. Ils slaloment entre les rochers et parviennent à la mer intérieure et à un gong. Il repèrent le quai d'amarrage pour y atterrir, mais le pont, déjà fissuré, cède sous le poids de l'engin, qui tombe à l'eau. Ky se prépare à activer la capsule de sécurité ; elle doit faire vite, car un monstrueux serpent marin s'intéresse à eux. La capsule est éjectée. Ky se pose sur le quai. Le Mercenaire s'inquiète de la perte du vaisseau, mais la jeune femme lui rétorque qu'elle sait où en trouver. Le soldat, armé d'une mailloche, approche du gong, avec l'intention de le faire sonner le plus fort possible...

Il faudra lire ou relire "L'An 1000" et "Les Ancêtres disparus" afin de comprendre toutes les finesses du scénario et des dialogues. Six années se sont écoulées depuis les événements de "L'An 1000". "La Fuite" est une aventure réussie, malgré une narration trop compressée en quelques endroits (à peine sont-ils arrivés que Ky trouve le premier véhicule, sans que rien n'en soit conté, par exemple). Le grand sage de la Cité (une figure quasiment paternelle pour le Mercenaire) est gravement malade et tout est mis en œuvre pour le sauver. De l'autre côté, sur Geos, c'est un peuple entier, les Acuos ("acuoso" signifie "aqueux" en espagnol), qui est menacé d'extinction tant ils souffrent des agressions des Mythes, qui les considèrent comme nourriture. C'est donc d'une double opération de sauvetage pour le Mercenaire. Le scénario, cohérent et spectaculaire, bénéficie d'un rythme soutenu et équilibré jusqu'à la fin.
Les illustrations sont magnifiques, une constante depuis le premier tome de la série : créatures, paysages, véhicules, la vieille ville secrète des Acuos, etc. L'aventure prend place dans un environnement fantastique peuplé de monstres et de créatures merveilleuses en tous genres. La scène des blattes évoquera immanquablement "L'Île mystérieuse" de Jules Verne. Segrelles n'hésite pas à recourir à certaines scènes-chocs, horrifiques, telle celle où le Mythe dévore une femelle acuo ; c'est peut-être une référence au "Saturne dévorant un de ses fils" de Francisco de Goya (1823).

"La Fuite" est un album réussi, avec pour seul défaut réel une tendance à la narration compressée. Cette histoire permet à Segrelles de clore sa trilogie atlante. Enfin - et c'est un détail non négligeable, l'éditeur a fait un effort bienvenu sur le lettrage.

Mon verdict : ★★★★☆

Barbuz

5 commentaires:

  1. Présence31 juillet

    Ce commentaire aura été l'occasion d'apprendre un mot de vocabulaire que je n'avais jamais rencontré : mailloche.

    En ces temps d'écriture à la Brian Michael Bendis, il est un peu déstabilisant de regretter une narration compressée. :) Je plaisante bien sûr parce que je comprends ce que tu veux dire.

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    1. La longévité de Bendis chez Marvel m'étonne ; qu'en penses-tu ?
      En même temps, je limite mes lectures de cette univers aux intégrales.

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  2. Présence01 août

    Concernant Bendis, je penche pour une approche économique ,: ses séries se vendent, donc Marvel le garde. Grâce à lui les Avengers ont dépassé les X-Men en popularité et en chiffres de venet. Il écrit Ultimate Spider-Man depuis 17 ans. Il sait convaincre des artistes talentueux de travailler avec lui : en ce moment Alex Maleev sur Iron Man, et Michael Gaydos sur Jessica Jones. Si j'ai bien suivi, il apporte son expertise pour les dessins animés Marvel et les films Marvel. Il a donc l'air d'être un bourreau de travail, un très bon professionnel, mais un créateur industriel.

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    1. Oui, évidemment, c'est toujours cette logique-là qui prime, finalement. Comme les autres, il a ses détracteurs sur les forums, ce qui n'empêche pas qu'il vende, apparemment.
      J'avais apprécié ses "Daredevil", même si j'avais fini par m'en lasser. Maleev sur "Iron Man", ça fait rêver...

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  3. Présence01 août

    AU fur et à mesure de mes lectures de critiques négatives sur Bendis, j'ai bien été obligé de reconnaître ses tics d'écriture, en particulier une propension à écrire des récits pop-corn, tout dans l'esbroufe, rien de substantiel. Du coup j'ai fait l'impasse sur la série Iron Man avec Alex Maleev, à) contre cœur car j'aime beaucoup ce dessinateur. Récemment, je dois confesser une rechute : j'ai lu le premier tome de Spider-Man version Miles Morales, après Secret Wars 2017. Je continue aussi à acheter Powers (avec Michael Avon Oeming) mais je n'ai pas encore lu les derniers tomes.

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