jeudi 31 août 2017

"Iron Fist" : L'Intégrale 1974-1975 (Panini Comics ; juillet 2017)

Panini Comics sort ici le premier volume d'une intégrale consacrée à Iron Fist, un personnage créé par Roy Thomas et Gil Kane (1926-2000). Ces histoires furent publiées dans "Marvel Premiere", de mai 1974 (#15) à octobre 1975 (#25), avant que le super-héros ne gagne son propre titre en novembre 1975. Les premières aventures de ce justicier, soit les "Marvel Premiere" #15 à 25 ainsi que les "Iron Fist" #1 et 2 (novembre et décembre 1975), sont compilées dans ce premier volume, un épais album cartonné qui compte un tout petit peu plus de deux cent trente planches.
Thomas écrit le "Marvel Premiere" #15, et le 16 avec Len Wein. Doug Moench signe les trois suivants, Tony Isabella les trois d'après, puis Chris Claremont devient scénariste. Kane dessine le premier numéro, Larry Hama, les #16 à 19 (ce dernier avec Neal Adams), puis Arvell Jones s'installe pour trois épisodes, suivi par Pat Broderick (deux), avant que John Byrne ne rejoigne Claremont. Dick Giordano (1932-2010), Frank Chiaramonte (1942-1983), Dan Green, Vince Colletta (1923-1991), Bob McLeod, Al McWilliams (1916-1993), Aubrey Bradford se partagent l'encrage.

Iron Fist, afin de goûter à l'immortalité, doit d'abord relever le Défi du Nombre. Sous les yeux de Yu-Ti et des Lung Wang, les Rois-Dragons, il affronte - et défait - les quatre combattants qui lui sont opposés. Il déclare alors être prêt pour le Défi du Duel. Lorsque Yu-Ti lui demande de réfléchir et de se livrer à un instant de contemplation, Iron Fist revoit l'enfant qu'il était il y a tout juste dix ans. Il se remémore l'expédition insensée à travers l'Himalaya, préparée par son père, Wendell, à la recherche du lieu mythique de Shangri-La. Une expédition à laquelle participent sa mère Heather, et le partenaire de Rand, Harold Meachum. Il se souvient de l'accident, de la culbute, de son père suspendu à l'arche, dans le vide, de Meachum empêchant son associé de remonter, de la chute, du chantage et de l'abandon. Yu-Ti le ramène à la réalité et fait entrer le massif Shu-Hu, qu'Iron Fist doit vaincre pour gagner le Défi du Duel et accéder à la vie éternelle...

Iron Fist n'est pas le premier héros Marvel issu de l'univers des arts martiaux : le personnage est lancé cinq mois après l'apparition de Shang-Chi. Tous deux sont nés de l'engouement pour les productions cinématographiques de Hong Kong, largement diffusées aux États-Unis à partir des années soixante-dix. Les scénaristes mettent en scène un jeune homme privé d'une partie de son enfance suite à l'assassinat de son père. Il est recueilli par les maîtres en arts martiaux d'une cité mythique. Il y acquiert le statut d'arme vivante, mais renonce à l'immortalité afin de venger la mort de ses parents. Le ton est relativement violent et les premiers numéros comptent leur lot de morts brutales. Côté caractérisation, il faut à Iron Fist plusieurs épisodes pour tomber le masque et être enfin Danny Rand ; cela aurait pu permettre aux auteurs d'exploiter davantage la psyché de l'homme sous le masque, mais l'exercice échoue à cause de la personnalité monolithique du justicier. Rand, hanté par sa soif de vengeance, ne sourit ni ne plaisante jamais (les créations de Stan Lee paraissent loin) et semble aussi adapté au New York des années soixante-dix que Captain America l'était à l'Amérique des années soixante lorsqu'il fut retrouvé par les Vengeurs. La mythologie du personnage emprunte à l'orientalisme, de l'ex-samouraï devenu ninja aux assassins de Kali, la déesse du panthéon hindou, en passant par le folklore des films d'arts martiaux (maître, entraînement, "kiais", coups nommés d'après les animaux, etc.). La narration surprend ; sans bulles de pensée (une seule exception), elle se fait à l'aide des cartouches dont les soliloques (bien qu'à la seconde personne du singulier) traduisent assez bien la réflexion, le besoin de concentration lors d'une préparation au combat. La cité de K'un Lun est évoquée à travers des analepses, les souvenirs de Rand créant une deuxième ligne narrative.
Si Kane est inspiré, Hama a un style trop raide, mais, grâce à l'encrage de Giordano, aboutit un résultat solide. Jones a le sens du mouvement, du découpage, mais ses visages sont ratés, et les proportions de ses corps sont irréalistes. Broderick, là aussi malgré une raideur excessive, produit les planches d'un professionnel chevronné. Et enfin, Byrne s'installe, bien que son talent ne soit pas encore parvenu à maturité.

Malgré les défauts de ces histoires, ce premier tome est une agréable et surprenante lecture, portée par la traduction soignée de Laurence Belingard. Le prochain volume devrait proposer la suite (et fin ?) de la période Claremont-Byrne sur le titre.

Mon verdict : ★★★★☆

Barbuz

2 commentaires:

  1. Présence09 octobre

    Merci pour la précision temporelle quant à la première apparition entre Shang-Chi et Iron Fist. Je ne garde pas un grand souvenir de ces épisodes, si ce n'est la capacité de Gil Kane a faire exprimer la souffrance psychologique sur les visages, et bien sûr la fluidité des dessins de John Byrne.

    Après des années d'obstacles légaux, Marvel a enfin pu rééditer la série dédiée à Shang-Chi dans de gros omnibus. J'espère qu'ils seront suivis d'une réédition dans un format plus facilement lisible dans le métro, car je suis curieux de relire ces histoires mâtinées d'espionnage.

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    1. J'ai adoré ces épisodes ! Gamin, j'étais fans d'Iron Fist. Alors tu parles que ces épisodes, pour moi, c'était vraiment du pain bénit ! Plus de trente-cinq ans plus tard, je n'ai toujours pas de recul par rapport à ce personnage, et la déception provoquée par la série TV n'a en rien entamé mon enthousiasme.
      Même si ça m'intéresserait, je doute que Panini Comics publient une intégrale consacrée à Shang-Chi. Je crois que c'est trop confidentiel chez nous.

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