dimanche 15 octobre 2017

Batman : "Sombre Reflet" (volume 2) (Urban Comics ; avril 2012)

Le second et dernier tome de "Sombre Reflet" est un album à la couverture cartonnée de cent soixante pages, sorti en avril 2012 dans la collection "DC Classiques" d'Urban Comics. Il comprend les numéros VO #876 à 881 de "Detective Comics" (juin à octobre 2011), dont les trois premiers forment l'arc intitulé "Hungry City".
Les scénarios ont été écrits par Scott Snyder. Jock illustre quatre des six numéros ; Francesco Francavilla n'en dessine qu'un (#879). Ils collaborent sur le numéro final (#881). Les deux artistes encrent leur production respective. David Baron réalise la mise en couleur des épisodes de Jock, Francavilla, celle des siens.

À l'issue du tome précédent, Gordon procède à l'arrestation de Roy Blount, un vieux dossier non classé. Il se remémore l'enfance "différente" de son fils, ainsi que les premières vraies inquiétudes.

Troisième chapitre. Il est cinq heures, Gotham City s'éveille. Les employés de la Global Gotham Modern Bank sont impatients de commencer la journée de travail. La stupeur est de taille lorsqu'ils se retrouvent nez à nez avec le cadavre d'une orque colossale, qui gît la gueule grande ouverte sur le sol de l'entrée du bâtiment...
Mon verdict : ★★★☆☆

Quatrième chapitre. Un psychiatre, protégé par des gardiens lourdement armés, procède au transfert du Joker, solidement attaché à un diable, des pieds à la tête. Le médecin demande que le masque du criminel soit resserré, ce qui n'empêche pas le terrible clown de se mettre à fredonner une chansonnette sordide...
Mon verdict : ★★★★☆

Dans la première partie ("Hungry City"), Snyder extrait le criminel costumé Requin Tigre de la naphtaline ("Tiger Shark" en VO, deuxième version, à ne pas confondre avec celui de Marvel Comics) pour le remettre au goût du jour dans une histoire rythmée qui se laisse lire sans ennui, malgré une certaine banalité. L'intrigue permet à l'auteur de reconnecter Richard Grayson avec la tragédie de son passé et d'établir le lien entre les deux lignes narratrices, celle qui est centrée sur Batman, et l'autre, qui tourne autour de la famille Gordon. Le vrai premier rôle de ce second tome, c'est James Gordon Jr. Le fils dérangé (doux euphémisme) du commissaire vole la vedette à tout le monde - à Batman, à son père, et même au Joker - à tel point que l'on ne voit plus que lui. James Jr. ferait presque passer les criminels costumés pour des enfants de chœur si le Joker ne restait pas si angoissant. La conclusion de la première partie est marquante, rappelant le sadisme gorgé de haine absolue de "A History of Violence", de John Wagner et Vince Locke (1997), sorti en France chez Delcourt en 2005. Snyder, Jock et Francavilla - c'est expliqué dans les bonus - donnent à James Jr. une allure passe-partout, celui d'un type "normal" que l'on peut croiser dans la rue. Cette apparente normalité, le travail d'encrage sur les contrastes ombre et lumière et la couleur font de lui une créature particulièrement inquiétante. L'affrontement avec Batman du dernier chapitre est verbal plus que physique, en témoignent les sept planches de ce quasi-monologue, lors desquelles James Jr. nargue le Chevalier noir par téléphone. Snyder nous plonge dans les racines du mal, dans cette cité qui finit par corrompre tout ce qu'elle touche. L'auteur ne lésine pas sur les effets horrifiques, accompagné par deux artistes qui font des merveilles. Jock propose un style graphique froid, un trait anguleux, dur, sans rondeur et avec une utilisation fréquente d'aplats de noir, et des fonds de case souvent omis. Il favorise, pour les scènes spectaculaires, un découpage audacieux avec un remarquable travail sur la perspective, mettant la ville en valeur. Baron privilégie ici des couleurs froides et ternes (même le sang n'est pas de teinte écarlate). Francavilla a un trait plus rond, plus réaliste dans l'absolu. L'artiste déploie un découpage parfois très serré (jusqu'à quatre cases étroites, mais hautes, sur une seule bande). Il multiple les gros plans, notamment sur les regards, technique grâce à laquelle ses planches gagnent en expressivité sur celles de Jock. Sa mise en couleur fait appel à une large palette de teintes, qui laisse une impression de crépuscule ou de pénombre permanents. L'Italien n'illustre qu'un numéro, c'est bien dommage.

Ce second tome, bien qu'en deçà du premier, clôt ces épisodes sur une bonne dose de tension, de sueurs froides et de scènes-chocs. La traduction de Jérôme Wicky est très satisfaisante. "Sombre Reflet" a été réédité en un seul tome en novembre 2016.

Barbüz

2 commentaires:

  1. Présence02 novembre

    Ma réaction à cette deuxième partie avait été teinté d'agacement. Snyder utilise des références aux récits essentiel à la mythologie de Batman (Year One, The killing joke, A death in the family). Mais il a une fâcheuse tendance à privilégier le spectaculaire (les scènes avec Batman) sur la solidité du récit. Même si James Gordon junior a le cerveau très dérangé, sa logorrhée finale pour tout expliquer et justifier reste un artifice maladroit en termes de BD, pour tout exposer. En lisant ton commentaire, je me suis rendu compte que c'est ce qui m'avait exaspéré dans la série mensuelle suivante écrite par Snyder, et que j'avais lâché au bout de 2 tomes.

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    1. Tu n'as pas tort ! C'est vrai que l'affrontement verbal (enfin, ce quasi-monologue, comme tu le soulignes) tire en longueur.

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