"La Cour des Hiboux" est un album cartonné de cent vingt planches, sorti dans la collection "DC Renaissance" d'Urban Comics en mai 2012. C'est le premier tome du "Batman" de la "Renaissance DC" ("New 52"), une démarche de DC Comics pour rafraîchir son univers et relancer au numéro un une gamme de cinquante-deux séries. Ce volume comprend les six premiers numéros de cette nouvelle série "Batman", du #1 (novembre 2011) au #7 (mai 2012).
Le scénariste est Scott Snyder ; il s'installe à la tête du titre après "Sombre Reflet", une première incursion convaincante dans le monde de Batman. Greg Capullo dessine les six épisodes. Son travail est encré par Jonathan Glapion et mis en couleur par FCO Plascencia. Ces premiers numéros bénéficient d'une équipe stable.
C'est la révolte à l'asile Arkham. Plusieurs prisonniers (le Sphinx, Killer Croc, l'Épouvantail, Double-Face, le professeur Pyg, Gueule d'Argile, Mister Freeze, la Ventriloque, Phosphorus Rex, El Flamingo, Black Mask, Sumo et Zsasz ont réussi à quitter leur cellule et sèment le chaos ! Batman intervient et plonge dans la mêlée. Il marque rapidement quelques points, mais ne peut rien contre l'étreinte du Sumo, qui le projette à travers une paroi vitrée. Le Joker entre alors en scène. Mais... Surprise ! Il se bat du côté de Batman ! Le duo repart à l'assaut et maîtrise l'insurrection.
Plus tard. Gordon attend Batman sur le toit du commissariat. Batman lui apprend que la mutinerie a été planifiée par Matthews, un gardien tombé amoureux d'une pingouinette de l'Iceberg Lounge.
De retour à la Bat-Cave, Bruce Wayne présente au Joker ses dernières acquisitions technologiques. Le Joker ? Il s'agit en fait de Richard Grayson, qui porte un masque holographique. Ils rejoignent ensuite Tim et Damian. Tous sont sur leur trente-et-un, car Bruce Wayne a organisé une soirée de collecte de fonds afin de financer un projet immobilier particulièrement ambitieux, ayant pour objectif d'offrir un avenir à Gotham en investissant dans la ville...
Snyder, d'emblée, met la pression sur notre héros, sous deux angles. Le premier est sa réputation de meilleur détective du monde, car Batman doit accepter qu'il a commis une erreur de jugement en se persuadant de la non-existence de la Cour des Hiboux. Le second est la douleur physique et la peur de la défaite. Snyder, dans une rage iconoclaste jouissive presque sadique, fait infliger une véritable raclée au Chevalier noir, telle que l'on n'en avait plus vu depuis celle de Bane dans "Knightfall". Mais Batman reste Batman et s'offre, sur le fil, le "luxe" d'une victoire à la Pyrrhus. Les caractérisations sont presque irréprochables. On retrouve un Bruce Wayne froid, obsessionnel, solitaire, analytique, certes, mais un Batman sujet à une peur presque panique suite à son combat avec l'ergot ; on mettra cet "égarement" sur le compte de la drogue qu'il a ingurgitée malgré lui. Les autres personnages sont réussis : Alfred Pennyworth, Richard Grayson, Harvey Bullock, ou Damian Wayne (pour le peu qu'il figure dans l'histoire). James Gordon est moins sombre, plus léger que d''habitude. En-dehors de quelques invraisemblances (la chute de la Tour Alan Wayne), le scénario est cohérent, et le suspense distillé par l'auteur est irrésistible.
Le style de Capullo est nourri au semi-réalisme avec un infime soupçon de caricature dans les expressions faciales (Mort Drucker, légende du magazine "Mad", est l'une de ses principales influences). Son Batman, grand et massif, est extra, et le dessinateur évite de reproduire le cliché infantile de la musculature hypertrophiée. Son Chevalier noir est drapé dans une cape qui le recouvre comme une seconde peau. Le visage de son Bruce Wayne, lisse, manque d'un petit quelque chose indéfinissable qui le différencierait, qui le rendrait unique, à moins que l'artiste n'ait voulu indiquer que c'est Wayne qui est le masque, et pas Batman. Bullock est lui aussi plus propre, plus soigné, plus "acceptable" qu'habituellement. Le découpage de Capullo et la lisibilité qu'il donne à l'action sont d'un très bon niveau ; notons qu'il recourt à la technique de l'incrustation (ou insert) pour ses cases, quelle que soit la planche. La série de pages qui tournent dans le sens inverse des aiguilles d'une montre est un effet franchement dispensable. L'encrage et la mise en couleur sont exemplaires.
Malgré quelques faiblesses vite oubliées, ce tome - la traduction de Jérôme Wicky est soignée - est une réussite. Pour ses débuts sur le titre, Snyder crée plutôt que de seulement reprendre de l'existant. D'emblée, ce "Batman" est visuellement attachant.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbuz
J'ai pris en grippe cette version de Batman dès le premier tome, malgré les qualités régulières des dessins que tu cites. Je penses que c'est le cumul de plusieurs facteurs. La séquence sous produit psychotrope m'avait agacé, parce que j'étais incapable de déterminer si oui ou non le flanc de Batman avait réellement transpercé par une épée. Snyder & Capullo avait décidé d'accentuer les caractéristiques de superhéros (les acrobaties impossibles à moto), alors que j'aurais préféré une orientation plus réaliste. En outre Snyder jouait sur les 2 facettes de la remise à zéro New 52, à la fois évoquant des événements du passé, à la fois en faisant mine de dire que tout repartait depuis le début, mais en fait non parce qu'il y avait déjà eu plusieurs Robin. Je me suis arrêté au bout du tome 2.
RépondreSupprimerJ'avais apprécié cet arc, malgré les artifices de Snyder (cumul de scènes ultra-spectaculaires). Ce sont d'ailleurs ces mêmes artifices qui m'avaient gêné dans "La Mort de la famille".
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