"Les Tours de Bois-Maury" est une série de l'artiste belge Hermann (Huppen) dont le titre a été changé en "Bois-Maury" à partir du onzième tome ("Assunta", 1998). Bien qu'Hermann ait œuvré seul sur les onze premiers numéros, son fils Yves H. le rejoint comme scénariste au douzième tome ("Rodrigo", 1991).
"Alda" est le cinquième volume du titre. Cet album cartonné de quarante-six planches est sorti dans la collection "Vécu" de Glénat en décembre 1988. Il y a eu, à ce jour, cinq rééditions.
À l'issue du tome précédent, Bois-Maury aide Reinhardt à se venger. Ils sont surpris par une tempête de montagne. Transis, ils se mettent à l'abri. L'apparition providentielle du jeune enfant, qui les guide vers les plaines, les sauve. Bois-Maury et Olivier retrouvent les marchands ; Reinhardt poursuit sa route.
Le soir, dans une auberge. Un gaillard recouvert d'une cotte de mailles, l'air peu amène, demande que du vin leur soit servi, à lui et ses hommes. Il souhaite également le gîte. Surpris, il apprend de son interlocuteur que c'est une femme qui tient l'endroit. Les plaisanteries graveleuses qui s'ensuivent sont brusquement interrompues par un appel à la garde. À l'extérieur, dans la pénombre, un quidam armé d'une lance en montre un autre assis plus loin et l'interpelle ; oui, c'est lui, c'est bien lui. Le second ne comprend pas ce qu'on lui veut, mais son accusateur désigne le moignon qu'il a à la place de la main et explique au chevalier qu'il reconnaît là celui qui commande les brigands et tueurs qui écument actuellement le pays tourangeau. À ces mots, le prétendu détrousseur file. Aussitôt, une chasse à l'homme s'organise. Le fuyard court, mais un lancer de javelot bien ajusté le blesse à la jambe ; il s'effondre sans se relever. Il demande pitié, assurant qu'il n'a commis aucun crime. Échauffés, excités par le goût du sang, ses poursuivants ne l'écoutent guère ; malgré ses protestations, il est emmené séance tenante à la forge, où des fers sont mis au feu...
Sans qu'elle ait le rôle principal, Alda (le personnage a été créé dans le tout premier tome, "Babette") revient donc, après avoir frôlé la mort dans "Germain". Bois-Maury et Olivier pénètrent sur le domaine du seigneur local, Yvon de Portel. Les terres leur semblent à l'abandon, mais le chevalier mettra néanmoins un certain temps avant de comprendre que quelque chose se trame. Quelle histoire triste et sordide que celle qui se déroule dans les murs de ce château isolé ! Yvon, déjà âgé, est tombé amoureux de Guillaumette, jeune femme qui pourrait être sa fille, et qui, surtout, est membre de cette bande de détrousseurs. Manipulé tel un vieux sot, le seigneur local est d'une naïveté stupéfiante. La passion aveugle dont il a été frappé l'abrutit totalement au point de laisser faire, de fermer les yeux, voire pire, de pleinement participer, sans même réaliser qu'il est utilisé. À l'heure du règlement de comptes, il erre, aussi pathétique que ridicule, sans but, prisonnier de ses fantasmes et confondant imaginaire et réalité. La mascarade finit par être éventée et se termine sur une série d'exécutions pour le moins spectaculaires. Bien qu'il y ait quand même dans ces pages le respect d'un certain code d'honneur, la miséricorde n'y trouve guère sa place. "Alda" est un épisode à la conclusion duquel le lecteur pourra même ressentir un léger malaise devant le climat de violence omniprésente.
Visuellement, il faut surtout retenir le travail sur l'ombre et la lumière. Notons par exemple le début de l'album, dans une auberge éclairée par un simple feu de cheminée, puis les scènes de nuit à l'intérieur du château, produites en bichromie, ou encore les planches de l'évasion de Bois-Maury et Olivier. Quant aux cases finales, elles semblent recouvertes de l'aura d'un crépuscule légèrement opaque qui parvient à peine à masquer le sang répandu. Autre aspect de l'art d'Hermann, le sens de la perspective ; à cet égard, la première case de la septième planche est une merveille, tout comme la remarquable entrée des chevaliers dans la cour (voir la treizième planche). La toute dernière planche, dure, sinistre, et silencieuse, est particulièrement marquante. Malgré tout le talent du dessinateur et son style graphique qui évolue, l'absence du génial coloriste Fraymond se fait encore ressentir.
"Alda" est un tome à l'issue duquel il ne subsiste guère d'espoir. Tromperies, meurtres, dépouillements, humiliations, manipulations, exécutions, etc. Tel semble être le quotidien de ce Moyen Âge dans lequel Hermann fait déambuler Bois-Maury et Olivier.
Le soir, dans une auberge. Un gaillard recouvert d'une cotte de mailles, l'air peu amène, demande que du vin leur soit servi, à lui et ses hommes. Il souhaite également le gîte. Surpris, il apprend de son interlocuteur que c'est une femme qui tient l'endroit. Les plaisanteries graveleuses qui s'ensuivent sont brusquement interrompues par un appel à la garde. À l'extérieur, dans la pénombre, un quidam armé d'une lance en montre un autre assis plus loin et l'interpelle ; oui, c'est lui, c'est bien lui. Le second ne comprend pas ce qu'on lui veut, mais son accusateur désigne le moignon qu'il a à la place de la main et explique au chevalier qu'il reconnaît là celui qui commande les brigands et tueurs qui écument actuellement le pays tourangeau. À ces mots, le prétendu détrousseur file. Aussitôt, une chasse à l'homme s'organise. Le fuyard court, mais un lancer de javelot bien ajusté le blesse à la jambe ; il s'effondre sans se relever. Il demande pitié, assurant qu'il n'a commis aucun crime. Échauffés, excités par le goût du sang, ses poursuivants ne l'écoutent guère ; malgré ses protestations, il est emmené séance tenante à la forge, où des fers sont mis au feu...
Sans qu'elle ait le rôle principal, Alda (le personnage a été créé dans le tout premier tome, "Babette") revient donc, après avoir frôlé la mort dans "Germain". Bois-Maury et Olivier pénètrent sur le domaine du seigneur local, Yvon de Portel. Les terres leur semblent à l'abandon, mais le chevalier mettra néanmoins un certain temps avant de comprendre que quelque chose se trame. Quelle histoire triste et sordide que celle qui se déroule dans les murs de ce château isolé ! Yvon, déjà âgé, est tombé amoureux de Guillaumette, jeune femme qui pourrait être sa fille, et qui, surtout, est membre de cette bande de détrousseurs. Manipulé tel un vieux sot, le seigneur local est d'une naïveté stupéfiante. La passion aveugle dont il a été frappé l'abrutit totalement au point de laisser faire, de fermer les yeux, voire pire, de pleinement participer, sans même réaliser qu'il est utilisé. À l'heure du règlement de comptes, il erre, aussi pathétique que ridicule, sans but, prisonnier de ses fantasmes et confondant imaginaire et réalité. La mascarade finit par être éventée et se termine sur une série d'exécutions pour le moins spectaculaires. Bien qu'il y ait quand même dans ces pages le respect d'un certain code d'honneur, la miséricorde n'y trouve guère sa place. "Alda" est un épisode à la conclusion duquel le lecteur pourra même ressentir un léger malaise devant le climat de violence omniprésente.
Visuellement, il faut surtout retenir le travail sur l'ombre et la lumière. Notons par exemple le début de l'album, dans une auberge éclairée par un simple feu de cheminée, puis les scènes de nuit à l'intérieur du château, produites en bichromie, ou encore les planches de l'évasion de Bois-Maury et Olivier. Quant aux cases finales, elles semblent recouvertes de l'aura d'un crépuscule légèrement opaque qui parvient à peine à masquer le sang répandu. Autre aspect de l'art d'Hermann, le sens de la perspective ; à cet égard, la première case de la septième planche est une merveille, tout comme la remarquable entrée des chevaliers dans la cour (voir la treizième planche). La toute dernière planche, dure, sinistre, et silencieuse, est particulièrement marquante. Malgré tout le talent du dessinateur et son style graphique qui évolue, l'absence du génial coloriste Fraymond se fait encore ressentir.
"Alda" est un tome à l'issue duquel il ne subsiste guère d'espoir. Tromperies, meurtres, dépouillements, humiliations, manipulations, exécutions, etc. Tel semble être le quotidien de ce Moyen Âge dans lequel Hermann fait déambuler Bois-Maury et Olivier.
Mon verdict : ★★★☆☆
Barbuz
Comme toujours les dates contenues dans ton article pique ma curiosité. Je suis content de pouvoir découvrir à travers tes articles une telle série, 15 tomes sur une trentaine d'années. La carrière d'Hermann est très impressionnante.
RépondreSupprimerPar comparaison avec tes 2 précédents articles, j'en viens à me demander quel a été la nature et l'ampleur des recherches de l'auteur pour réaliser cette reconstitution du moyen âge.
Tu as mis Reinhardt dans le titre de l'article (au lieu de Alda).
Merci Présence de m'avoir fait remarquer cette boulette !
SupprimerCe qui me surprend (c'est encore plus perceptible du tome 4 au tome 5), c'est la qualité du langage et ces dialogues en ancien français ; on s'y croirait vraiment et ça donne véritablement de la substance à l'œuvre !