mardi 27 février 2018

"Captain America" : L'Intégrale 1974 (Panini Comics ; février 2018)

Le huitième tome de l'intégrale Panini Comics consacrée à Captain America comprend les douze numéros de la série régulière "Captain America" de 1974, du #169 de janvier au #180 de décembre. Chaque épisode comptant dix-huit ou dix-neuf planches en moyenne, ce volume approche les deux cent trente planches.
Steve Englehart écrit la quasi-totalité des numéros et cosigne les #169-172 avec Mike Friedrich. Sal Buscema est l'unique dessinateur du titre. Son travail est encré par Frank McLaughlin le temps du #169, puis Vince Colletta (1923-1991) prend les rênes de l'encrage jusqu'à la fin de cette année. Petra Goldberg, Linda Lessman, Michelle Brand (1941-2015), George Roussos (1915-2000), ou Phil Rachelson se partagent la mise en couleurs.

À l'issue du tome précédent, Captain America, avec l'aide du Faucon, affronte et défait Helmut Zemo, alias Phoenix, le fils du tristement célèbre Baron, victoire qui rend le justicier très amer.
New York, la nuit. Le Faucon, le sourire aux lèvres, arpente les rues d'Harlem en jouant avec Redwing. C'est au dernier instant qu'il remarque qu'une automobile accélère dans son dos et fonce sur lui. Il parvient à éviter le véhicule au dernier moment, mais le bolide heurte néanmoins sa cuisse au passage. La voiture s'arrête quelques mètres plus loin. Cinq malfrats armés de matraques en sortent et se précipitent vers le Faucon, résolus à lui faire passer un sale quart d'heure. L'affaire n'est pas simple, le Faucon répondant à leurs coups avec rage et détermination. Au même moment, Steve Rogers quitte l'immeuble dans lequel est installé le bureau de l'assistant social Sam Wilson. Il aperçoit la bagarre, rentre chez lui le temps d'enfiler son costume de Captain America, revient sur les lieux, et fonce dans la mêlée. En l'espace de quelques secondes, il démolit la voiture des malfrats, neutralise deux d'entre eux et fait pencher la balance du côté du Faucon. Les gangsters comprennent que la situation a tourné à leur désavantage ; ils filent sans demander leur reste...

En août 1974, le "Watergate" pousse le président des États-Unis, Richard Nixon, à la démission. Englehart, dans des pages pleines de punch, se fait l'écho de l'actualité avec l'Empire secret. À l'incroyable conclusion de l'intrigue et à l'issue du combat contre le Comité pour la Reconquête des Principes américains, on pourrait penser que l'auteur va envoyer Cap nettoyer les rangs véreux de l’administration américaine dans des aventures passionnantes, mais non. Rogers, écœuré par la corruption au sein de la haute fonction publique du pays, range son costume à la bannière étoilée. Englehart a-t-il préféré éviter la difficulté par peur de mener son héros trop loin, surtout que l’industrie est toujours sous la coupe du Comics Code Authority (notons cependant que le Code a été révisé en 1971 et qu'il permet alors de mettre en scène des fonctionnaires corrompus) ? Rogers, plutôt de que s'attaquer aux racines du mal, se contente finalement de changer de costard. La bannière étoilée est salie ? Qu'importe ! Le musclé vétéran se confectionne un autre habit, à cause duquel sa première intervention s'achève en fiasco, avec le ridicule en prime. Son nouveau nom ? Nomad. Exit, toute référence à la nation, voici le super-héros "apatride" qui ne répond à rien ni personne, si ce n'est à son idéal de justice trahi. Suite à quoi il retourne affronter des criminels déguisés comme si de rien n'était. Sous la plume d'Englehart, "Captain America" ne parvient pas à évoluer vers un ton plus adulte. À l'époque, le scénariste écrivait les aventures du docteur Strange ; le fossé qualitatif est déroutant, d'autant que chez le même éditeur, un an plus tard, débarquaient les X-Men 2.0. "Captain America" devient un titre ringard, impression renforcée par le style graphique daté de Buscema. Buscema, tout en restant un artiste efficace, ne se débarrasse pas de l'influence de Kirby ; son trait demeure ancré dans les années soixante. Ses fonds de case sont rarement travaillés, à moins qu'il ne s'agisse de Colletta, célèbre pour supprimer les détails de dessins pour gagner en productivité.
La traduction a été réalisée par Thomas Davier. Son travail et son texte sont de qualité. Il est dommage que l'éditeur n'adapte pas sa maquette et s'entête à réunir les couvertures originales en fin du recueil plutôt que de les insérer entre les épisodes.

En 1974, "Captain America" est une série qui accuse quelques années de retard. Tout y est daté, hélas ; le fond (les idées, les thèmes) et la forme (le ton, les dessins de Buscema). Mais encore un peu de patience ; la période Englehart touche à sa fin.

Mon verdict : ★★☆☆☆

Barbuz

3 commentaires:

  1. J'ai eu l'occasion (réédition) et la curiosité de relire les premiers épisodes, ceux qui constituent l'histoire baptisée après coup Secret Empire. J'ai eu la surprise de découvrir une histoire qui se relit facilement, malgré un ton un peu décousu du fait d'une écriture par épisode, en dépit de la participation opportuniste des X-Men (juste pour rappeler qu'ils existaient encore) et des dessins de Sal Buscema sous forte influence de Jack Kirby, mais sans son originalité. Il y a même un article sur le site de Bruce. Je me souviens que je n'avais pas beaucoup aimé non plus les dessins de Frank Robbins qui avait pris la suite de Sal Buscema.

    http://www.brucetringale.com/la-question-de-confiance-captain-america-and-the-falcon/

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    1. J'ai l'impression que ta note ne reflète pas entièrement la sévérité de ton commentaire - dans lequel je me retrouve d'ailleurs tout à fait. Je dois avouer que lire ici et là à quel point le "run" d'Englehart est encensé me rend on ne peut plus perplexe.

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    2. La note reflète plus mon plaisir de lecture que mon décorticage de chaque composante.

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