"Une réalité à part" est un album cartonné (format 17,5 × 26,5) consacré au docteur Strange. Il est sorti dans la collection "Marvel Vintage" de Panini Comics en octobre 2016. Ce volume comprend les bimestriels VO #9, 10 et 12 à 14 de "Marvel Premiere" (juillet à mars 1973), et les #1, 2, 4 et 5 de "Doctor Strange" (juin à décembre 1974). L'éditeur fait l'impasse sur le "Marvel Premiere" #11 (octobre 1973) - bien qu'il eût pu en extraire "Homecoming!" - et sur le "Doctor Strange" #3 (septembre 1974), dans lequel le docteur se remémore une aventure passée.
Les scénarios sont conçus par Steve Englehart et Frank Brunner. Englehart est parfois crédité seul. Il cosigne le "Marvel Premiere" #12 avec Mike Friedrich. Brunner dessine tous les numéros. Son travail est encré par Ernie Chan (1940-2012), par le collectif Crusty Bunkers, puis par Dick Giordano (1939-2010). Outre Brunner, David Hunt, Cory Adams, Glynis Wein, Linda Lessmann, Jan Brunner (Madame) et Bill Mantlo se partagent la mise en couleurs.
Le docteur Strange vole dans un ciel inconnu, sombre et constellé de planètes en tous genres. Son manteau de lévitation l'a porté au-dessus d'un monde à la surface peu engageante. Le Maître des Arts mystiques n'y détecte aucun signe de vie. Il craint d'être prisonnier de l'endroit. Il ignore où et à quelle distance de le Terre il se trouve. Il est conscient de la nécessité impérieuse de s'échapper, sous peine de voir le cosmos dévasté par Shuma-Gorath. Celui-ci est l'instigateur d'un plan dont Strange ne sait rien, si ce n'est que les cultes et les créatures de l'au-delà sont sur ses traces pour l'abattre. Cela signifie que Shuma-Gorath considère Strange comme un obstacle, mais pour quelle raison ? L'entité cosmique a chargé les Hommes de l'Ombre de Kaa-U de capturer l'Ancien, puis a tendu un piège au sorcier, qu'il a attiré sur la planète vivante Kathulos, que Strange a donc dû détruire. Sans moyen de s'échapper, Strange semble condamné à mourir de faim dans la solitude. Il se place en lévitation et entre en méditation afin de trouver le défaut dans le plan de Shuma-Gorath...
La collection "Marvel Vintage" permet à Panini Comics de présenter des classiques. Le lecteur s'attend à découvrir ici un arc complet, mais il s'agit d'une compilation d'épisodes dans l'ordre de publication. Le premier arc oppose Strange à l'entité cosmique Shuma-Gorath. Dans le second, il rencontre le voyageur temporel Sise-Neg. Le dernier le voit aux prises avec un ex-cardinal qui traque les sorciers. L'éditeur ne propose aucune présentation du contexte ; le lecteur est poussé dans le vif du sujet. Ces récits sont intéressants (surtout le troisième), à défaut d'être passionnants. Les auteurs mettent en scène la mort de l'Ancien, mais celle-ci, perdue dans le fracas du combat, ne reçoit pas toute l'émotion qui aurait dû lui être insufflée. L'univers de ce héros manque-t-il d'émotion ? Sa caractérisation est conforme aux origines ; il est calme, introverti, ne cède guère à l'impulsivité ou à l'exaltation, et conserve son sang-froid en toutes circonstances. La relation avec Clea, sa bien-aimée, est discrète, traitée avec tact et intelligence ; il s'agit d'une situation maître-élève, Clea n'étant pas amenée à jouer les premiers rôles. C'est suffisamment rare dans les comics pour le souligner : les rapports charnels sont évoqués sans ambiguïté, mais avec finesse. Les antagonistes ne sortent pas des caractérisations manichéennes véhiculées par le genre. Seul Sise-Neg finit par s'affranchir de ce traitement. Englehart, malgré quelques éléments grotesques (la chenille), aborde la peur de la mort, le pouvoir absolu, la solitude totale ou l'écrasement de l'homme par la mécanique cyclopéenne du cosmos dans des pages imaginatives et créatives inspirées par l'univers horrifique. La représentation des combats magiques est cependant convenue ; Steve Ditko reste indétrônable. Les dessins sont la véritable force de l'album. Le trait de Brunner est d'un classicisme de l'Âge de bronze franchement magnifique, splendide, avec une approche novatrice du découpage (bandes en biais ou cases aux formes irrégulières, par exemple), et un travail particulièrement ciselé.
La traduction est réalisée par Anne Catteau. Le résultat est efficace et son texte soigné, malgré une vilaine faute de sens et de conjugaison. Côté maquette, l'éditeur a enfin eu l'excellente idée d'intercaler les couvertures originales entre les chapitres.
À moitié décevant de par la faiblesse de la présentation de l'éditeur, "Une réalité à part", malgré les illustrations somptueuses de Frank Brunner, est une compilation d'histoires avant tout réservée aux lecteurs assidus des aventures du Sorcier suprême.
Mon verdict : ★★★☆☆
Les scénarios sont conçus par Steve Englehart et Frank Brunner. Englehart est parfois crédité seul. Il cosigne le "Marvel Premiere" #12 avec Mike Friedrich. Brunner dessine tous les numéros. Son travail est encré par Ernie Chan (1940-2012), par le collectif Crusty Bunkers, puis par Dick Giordano (1939-2010). Outre Brunner, David Hunt, Cory Adams, Glynis Wein, Linda Lessmann, Jan Brunner (Madame) et Bill Mantlo se partagent la mise en couleurs.
Le docteur Strange vole dans un ciel inconnu, sombre et constellé de planètes en tous genres. Son manteau de lévitation l'a porté au-dessus d'un monde à la surface peu engageante. Le Maître des Arts mystiques n'y détecte aucun signe de vie. Il craint d'être prisonnier de l'endroit. Il ignore où et à quelle distance de le Terre il se trouve. Il est conscient de la nécessité impérieuse de s'échapper, sous peine de voir le cosmos dévasté par Shuma-Gorath. Celui-ci est l'instigateur d'un plan dont Strange ne sait rien, si ce n'est que les cultes et les créatures de l'au-delà sont sur ses traces pour l'abattre. Cela signifie que Shuma-Gorath considère Strange comme un obstacle, mais pour quelle raison ? L'entité cosmique a chargé les Hommes de l'Ombre de Kaa-U de capturer l'Ancien, puis a tendu un piège au sorcier, qu'il a attiré sur la planète vivante Kathulos, que Strange a donc dû détruire. Sans moyen de s'échapper, Strange semble condamné à mourir de faim dans la solitude. Il se place en lévitation et entre en méditation afin de trouver le défaut dans le plan de Shuma-Gorath...
La collection "Marvel Vintage" permet à Panini Comics de présenter des classiques. Le lecteur s'attend à découvrir ici un arc complet, mais il s'agit d'une compilation d'épisodes dans l'ordre de publication. Le premier arc oppose Strange à l'entité cosmique Shuma-Gorath. Dans le second, il rencontre le voyageur temporel Sise-Neg. Le dernier le voit aux prises avec un ex-cardinal qui traque les sorciers. L'éditeur ne propose aucune présentation du contexte ; le lecteur est poussé dans le vif du sujet. Ces récits sont intéressants (surtout le troisième), à défaut d'être passionnants. Les auteurs mettent en scène la mort de l'Ancien, mais celle-ci, perdue dans le fracas du combat, ne reçoit pas toute l'émotion qui aurait dû lui être insufflée. L'univers de ce héros manque-t-il d'émotion ? Sa caractérisation est conforme aux origines ; il est calme, introverti, ne cède guère à l'impulsivité ou à l'exaltation, et conserve son sang-froid en toutes circonstances. La relation avec Clea, sa bien-aimée, est discrète, traitée avec tact et intelligence ; il s'agit d'une situation maître-élève, Clea n'étant pas amenée à jouer les premiers rôles. C'est suffisamment rare dans les comics pour le souligner : les rapports charnels sont évoqués sans ambiguïté, mais avec finesse. Les antagonistes ne sortent pas des caractérisations manichéennes véhiculées par le genre. Seul Sise-Neg finit par s'affranchir de ce traitement. Englehart, malgré quelques éléments grotesques (la chenille), aborde la peur de la mort, le pouvoir absolu, la solitude totale ou l'écrasement de l'homme par la mécanique cyclopéenne du cosmos dans des pages imaginatives et créatives inspirées par l'univers horrifique. La représentation des combats magiques est cependant convenue ; Steve Ditko reste indétrônable. Les dessins sont la véritable force de l'album. Le trait de Brunner est d'un classicisme de l'Âge de bronze franchement magnifique, splendide, avec une approche novatrice du découpage (bandes en biais ou cases aux formes irrégulières, par exemple), et un travail particulièrement ciselé.
La traduction est réalisée par Anne Catteau. Le résultat est efficace et son texte soigné, malgré une vilaine faute de sens et de conjugaison. Côté maquette, l'éditeur a enfin eu l'excellente idée d'intercaler les couvertures originales entre les chapitres.
À moitié décevant de par la faiblesse de la présentation de l'éditeur, "Une réalité à part", malgré les illustrations somptueuses de Frank Brunner, est une compilation d'histoires avant tout réservée aux lecteurs assidus des aventures du Sorcier suprême.
Mon verdict : ★★★☆☆
Barbuz
Je ne me souviens pas avoir lu ces épisodes. C'est vrai que l'association d'Englehart avec Brunner est assez attirante. Les thématiques que tu listes ressortent effectivement comme étant plus adultes que le tout-venant des comics de superhéros de l'époque. J'ai bien aimé le nom de l'ennemi Sise-Neg, Genèse écrit à l'envers.
RépondreSupprimerExact ! Je n'avais pas percuté !
SupprimerLe trait de Brunner est vraiment magnifique ; pour moi ça a été une découverte.