Le personnage de Ninjak fut créé en 1993 par Mark Moretti et Joe Quesada, puis remis au goût du jour par Valiant en 2012 (voir "X-O Manowar") avant d'obtenir sa propre série en mars 2015. En France, cette série a été publiée chez Bliss Comics en cinq tomes. "Les Sept Lames de Maître Darque", sorti en mars 2018, contient dix numéros du mensuel VO ("Ninjak" #18-27 d'août 2016 à mai 2017) pour un peu plus de deux cent soixante-dix planches.
Les scénarios sont de Matt Kindt ; à l'exclusion #27 (Kevin Maurer), Kindt aura conçu tous les épisodes de la série. Pour le travail d'illustration et d'encrage : Khari Evans, Eric Nguyen, Andres Guinaldo, CAFU, Marc Laming, Stephen Segovia, et David Baron. Et enfin, Ulises Arreola et Chris Sotomayor pour la mise en couleurs.
À l'issue du tome précédent, Roku décide de déclarer la guerre à Maître Darque. Après avoir tué Alain, semé le chaos dans la vie de Colin King, elle retrouve les parents de ce dernier, et les abat.
Le futur. Un Colin King vieilli, tiré à quatre épingles, se masse le front. Lui et Gilad, le Guerrier éternel, sont à bord d'un train. Son camarade lui demande s'il souffre d'un mal de tête. King répond qu'il ne s’agit que d'un effet du décalage horaire. Il replace ses lunettes sur son nez et reprend la conversation, tentant de faire comprendre à Gilad qu'il n'est pas obligé de venir en aide au Géomancien en solo. Gilad rétorque qu'il est le Poing et l'Acier et qu'il est de son devoir d'assure la sécurité du Géomancien, le protecteur de la planète. King répond qu'il ne remet pas la mission de Gilad en question, mais qu'il estime que leur collaboration fonctionne bien. Son interlocuteur est dubitatif ; le MI6-X lui a demandé de retrouver un prisonnier évadé, un homme que Ninjak avait capturé il y a plusieurs années. Ninjak insiste encore sur le fait qu'il est ravi d'aider Gilad ; il était temps que le MI6-X passe l'éponge et lui confie à nouveau des missions. L'autre semblant gêné, King comprend que l'agence ignore que Gilad a fait appel à lui et le Guerrier avoue que Ninjak est sur une liste noire...
Ce cinquième et dernier tome est construit sur deux arcs et une aventure en un numéro. Le premier arc, "Le Poing et l'Acier" (quatre parties), se déroule dans le futur. Un Ninjak vieillissant, mais alerte y fait équipe avec Gilad, le Guerrier éternel. Jouant sur les mécanismes du "Buddy Movie", cette intrigue réussie, pleine d'humour et de références à l'actualité récentes (les diverses affaires de "Papers"), ou au cinéma (le monolithe de "2001, l'Odyssée de l'espace", film réalisé par Stanley Kubrick (1928-1999) en 1968), mène les deux héros sur la piste d'un vieillard insane ayant trouvé le moyen d'atteindre l'immortalité. Khari Evans propose des illustrations remarquables, originales et soignées, bien que statiques. Les "Dossiers secrets" se déroulent de nos jours et établissent un lien entre les deux lignes temporelles ; les dessins de Guinaldo, plus ronds, ont de la personnalité, mais les visages sont trop adolescents (surtout celui d'Alcott). Le second arc (une introduction suivie de quatre parties) met Ninjak face à l'adversaire ultime : Maître Darque. Le prologue est un exercice de style, véritable mélange entre film d'arts martiaux et conte romantique, bien que la "princesse" attende ici son chevalier-ninja de pied ferme. Un seul dialogue, dix mots. Le trait explosif, dynamique et plein de mouvement de CAFU fait oublier l'absence d'arrière-plans. Dans l'arc qui suit, Ninjak s'allie aux ennemis d'hier pour mettre fin à une lutte fratricide dans laquelle les ténèbres pourraient l'emporter. Kindt livre un récit linéaire sans suspense, mais loin d'être exempt de surprises et d'humour (voir les scènes illustrées par Ryan Lee). L'ensemble est réussi, bien que le lien entre Maître Darque et le Moine mort-vivant ne soit guère creusé. Le travail de Laming est moderne, esthétiquement abouti, mais peu expressif ; les postures manquent de mouvement, de naturel. Segovia déploie un trait plus brut, au dynamisme plus appuyé. Intéressant, le dernier épisode (CAFU), sur fond de manipulations génétiques, rappelle les débuts de "Batman, Inc.", de Grant Morrison.
La traduction est signée Mathieu Auverdin. Auverdin, des studios MAKMA, produit ici un travail de qualité et un texte soigné. La reliure est solide, et la maquette est impec : table des matières, couvertures originales insérées entre les chapitres, etc.
"Les Sept Lames de Maître Darque", malgré quelques questions qui resteront sans réponse, est le clou de la série "Ninjak", qui finit ainsi en beauté. Et pour une fois ces épisodes captivants sont soutenus par une partie graphique plus régulière et réussie.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbuz
J'avais bien aimé la première partie, même si le coup de se projeter dans le futur ressemblait au même dispositif utilisé à plusieurs reprises par Jeff Lemire dans la série Bloodshot Reborn, au même moment. Comme toi, j'avais bien aimé le travail de Khari Evans très investi dans ces épisodes.
RépondreSupprimerJ'étais beaucoup moins enthousiaste pour la deuxième partie car finalement Ninjak ne fait pas preuve de sa capacité d'anticipation, et il ne fait pas usage de ses armes inventives. Matt Kindt se contente de délivrer un récit au premier degré, une aventure menée à tambour battant, sans beaucoup de finesse. À mes yeux, il s'agit plus d'une pige que d'une création artistique, et il manque un peu d'âme à ce récit très efficace ; mais c'est vrai que j'en attends beaucoup de Matt Kindt, créateur extraordinaire pour ses propres séries telles que Mind MGMT.
J'ai apprécié cette seconde partie pour son prologue et sa fin, puisque les Sept Ombres disparaissent dans la nature. Cela laisse la porte ouverte, bien sûr.
SupprimerSais-tu ce qu'il va advenir de ce titre ?
La série est repartie au numéro 1, avec Christos Gage au scénario. Le tome s'intitule Ninja-K Volume 1: The Ninja Files.
SupprimerJ'avais oublié : Matt Kindt a écrit une histoire supplémentaire de Ninjak : Rapture, dessiné et encré par CAFU (Carlos Alberto Fernandez Urbano), et mis en couleurs par Andrew Dallhouse. Elle se déroule dans Deadside.
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