"Le Dossier noir", sorti dans la collection "DC Signatures" d'Urban Comics en janvier 2013, est le quatrième volume des neuf (dont un tome zéro) de la série consacrée à la période de Grant Morrison sur l'univers de Batman. Cet album cartonné de trois cents planches approximativement (sans inclure les quelques croquis en bonus) comprend, dans l'ordre, les "Batman" #682-683, #701-702, #700, des extraits des "Detective Comics" #215 (janvier 1955), "World's Finest Comics" #89 (juillet-août 1957), "Batman" #113 (février 1958), "Detective Comics" #267 (mai 1959), "Detective Comics" #235 (septembre 1956), "Batman" #156 (juin 1963), et, enfin, les "Batman" 452-454 (août à septembre 1990) - complets.
Morrison écrit les scénarios, sauf ceux du "Dossier noir", signés Ed Hamilton (1904-1977), France Herron (1917-1966), Bill Finger (1914-1974) et de l'arc de fin (Peter Milligan). Tony Daniel et Lee Garbett illustrent la première partie (encrage de Trevor Scott, mise en couleurs de Ian Hannin et Guy Major). Pour la seconde, Frank Quitely, Scott Kolins, Andy Kubert et David Finch se partagent les dessins, avec Richard Friend à l'encrage, et Hannin, Alex Sinclair, Tony Aviña, Brad Anderson et Peter Steigerwald à la mise en couleurs. Les récits du "Dossier noir" sont illustrés par Sheldon Moldoff (1920-2012) et encrés par Charles Paris (1911-1994), ou par Dick Sprang (1915-2000) et Stan Kaye (1916-1967). L'arc qui clôt l'épais recueil est dessiné par Kieron Dwyer, encré par Dennis Janke, mis en couleurs par Adrienne Roy (1953-2010).
Trente jours avant Oméga. Batman (Bruce Wayne) saute de l'hélicoptère du Dr Hurt, juste à temps avant son explosion. Il attend quelques minutes, mais personne d'autre ne sort des eaux noires...
Ce volume est à part dans la série, car il présente une compilation de numéros écrits par Morrison et de vieux récits qui ont inspiré l'Écossais. Il se découpe en quatre parties : l'affrontement entre Batman et Darkseid, une enquête de Batman à travers trois époques (passé, présent et futur), six épisodes de l'Âge d'argent (regroupés sous le nom de Dossier noir par Morrison), et l'arc "Dark Knight, Dark City". La première, mise en valeur par le trait dynamique et puissant de Daniel, est passionnante. Batman, captif sur Apokolips, est le sujet d'expérimentations dirigées par deux savants fous, Mokkari et Simyan. L'objectif des tortionnaires est de capturer l'essence des événements qui ont fait naître Batman en vue de l'injecter à des clones afin de créer une armée de Batmen à la gloire de Darkseid. Mais seul l'Über-Bats peut survivre à tous les traumatismes qu'il a endurés sans devenir insane. Les réalités alternatives "rêvées" par Batman sont passionnantes et émouvantes, et Morrison fait émerger la solitude qui pèse sur le personnage et sa condition de "simple humain" côtoyant des êtres surpuissants. La seconde partie se conjugue aux temps passé-présent-futur ; Batman y est confronté au mystère du meurtre du professeur Carter Nichols et à l'énigme du carnet de blagues du Joker. C'est plein de bonnes idées, mais touffu ; le lecteur devra prêter attention aux détails. Plusieurs artistes ont été invités à l'occasion du #700 ; la variété de traits en découlant crée un patchwork visuel peu homogène, mais original. Les épisodes de l'Âge d'argent sont de véritables délices surannés dont il ne faut ni mépriser la créativité ni sous-estimer l'intérêt ; "Batman, surhomme de la planète X" ou "Robin meurt à l'aube" (pour n'en citer que deux) sont de petites perles, même si les parties graphiques ont forcément vieilli. Les explications du scénariste, bien que concises, apportent une valeur ajoutée à la lecture. L'éditeur français n'a pas repris la totalité des numéros réunis dans la publication VO ("Batman: The Black Case Book"), mais "Dark Knight, Dark City" semble avoir été intégré à son initiative ; ses illustrations ont perdu de leur modernité, et l'histoire vaut surtout pour sa chute et sa conclusion véritablement surprenantes.
Alex Nikolavitch propose une traduction satisfaisante et un texte de qualité. La maquette est impeccable, et l'effort éditorial, appréciable. Urban Comics n'a pas jugé bon d'ajouter un résumé et une table des matières, et la pagination est incomplète.
Cet album est bien plus qu'une simple compilation de numéros. C'est un album conceptuel dans lequel le lecteur assiste à la "mort" de l'un des plus grands personnages de fiction, à son legs et sa déclinaison dans le futur, et découvre des épisodes culte.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbuz
Merci beaucoup pour le détail du contenu car lors du suivi des parutions Urban, je n'avais pas réussi à recoller les morceaux avec la VO, sur la base des informations donnée par l'éditeur. Je viens enfin de comprendre que Dark Knight, dark city a dû être inclus parce qu'il fait référence à Barbatos. Mais si j'ai vraiment tout compris, ce n'est pas la même version de Barbatos que celle mise en scène par Morrison. Cela reste un choix étrange que d'avoir inclus les épisodes de Milligan qui n'apportent rien à l'histoire de Grant Morrison.
RépondreSupprimerL'épisode 700 : Grant Morrison continue son travail de construction du mythe de Batman en continuant de tisser des liens avec Batman (Damian Wayne, tel qu'apparu dans l'épisode 666 de Detective Comics), avec Batman (version Beyond, Terry McGinnis), et même avec le Batman du 853ème siècle, apparu dans DC One Million qu'il avait écrit en 1998. Cet exercice est à la fois une prouesse en termes de continuité et de son expansion, et aussi une manière de créer sa propre mythologie au sein de l'univers partagé DC en assemblant ses différents travaux dans un tout cohérent.
Un récit touffu : c'est le souvenir que j'en garde, car Morrison a disséminé des informations tout au long de ces épisodes qui apportent des réponses à des passages déconcertants dans les tomes précédents, des éléments qui donnent du sens à des passages cryptiques. Si on a suivi les aventures de Batman par Grant Morrison depuis "Batman and son", c'est magique. Enfin tout se tient et tout s'assemble pour un résultat mythique. Sinon, c'est un salmigondis abscons.
Oui. J’ai trouvé étrange qu’Urban Comics sabre le coup contenu du « Black Case Book » et intègre ce récit de Milligan, qui aurait très bien pu faire l’objet d’un magazine hors série. Pour se justifier, l’éditeur mentionne le lien avec les épisodes dont tu parles. J’aurais néanmoins préféré l’intégralité des épisodes que Morrison cite comme influences.
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