vendredi 4 janvier 2019

"Superman contre Cassius Clay (Mohammed Ali)" (Sagédition ; juillet 1978)

"Superman contre Cassius Clay (Mohammed Ali)" est un récit complet sorti en juillet 1978 dans la collection "Présence de l'avenir" de Sagédition. En VO, il est intitulé "Superman vs. Muhammad Ali" ("All-New Collectors' Edition Vol 1 C-56", avril 1978). En VF, il y a eu trois éditions. La première, objet du présent billet, est un album grand format (26 × 35) à couverture souple de soixante-cinq planches. Les deux autres sont sorties chez le défunt Atlantic BD : une édition limitée (collection Prestige, novembre 2011), puis une réédition en format simple.
L'histoire a été imaginée par Dennis O'Neil et développée par Neal Adams. Adams réalise les illustrations, encrées par deux artistes : Dick Giordano (1932-2010) se charge des personnages, et Terry Austin, des arrière-plans. La mise en couleurs est effectuée par Cory Adams (l'épouse de Neal Adams à l'époque).

Les bas quartiers de Metropolis, au mois d'août. Clark Kent, Lois Lane et Jimmy Olsen sont à la recherche de Mohammed Ali. D'après les rumeurs, il se trouverait dans le secteur. Une heure plus tard, il ne l'ont toujours pas localisé, et Olsen doit faire face à l'impatience de Kent et aux sarcasmes de Lane, qui suspecte un tuyau crevé. C'est à ce moment qu'ils l'aperçoivent, en train de jouer au basket-ball avec les enfants du quartier, ébahis par ses prouesses alors qu'il rentre un panier. Ali devine tout de suite qu'il s'agit d'une équipe de journalistes et qu'ils souhaitent une interview exclusive. Sensible au charme de Lois, il lui propose de commencer. C'est à cet instant qu'apparaît derrière eux un halo éblouissant accompagné d'une forte odeur d'ozone. Un portail lumineux se dessine, livrant passage à un extraterrestre humanoïde debout sur une plateforme individuelle en lévitation. Aussitôt, Lane se détourne de l'athlète pour s'intéresser au nouveau venu et lui demander quelles sont les raisons de sa visite sur Terre. L'inconnu lui intime une première fois de s'écarter ; Lane n'obéissant pas, il répète l'ordre, cette fois avec un geste brutal qui propulse Lois au sol...

L'album fait partie d'une série de cinq publiés par Sagédition à la fin des années soixante-dix et qui proposent des histoires hors continuité, dans lesquelles Superman affronte d'autres super-héros ou des personnages célèbres : Spider-Man, Wonder Woman, Flash, et Shazam. Ici, c'est le fameux boxeur qui croise sa route dans un scénario manichéen qui flirte avec la satire. En 1977, Ali est à son firmament - avant le déclin ; il perd son titre en février 1978, mais le reconquerra quelques mois plus tard. Là, les Scrubbs, des extraterrestres autoritaires, cabotins, et misogynes, menacent de détruire la Terre par mesure de prévention parce que la pugnacité de ses habitants représente un obstacle à leurs plans d'expansion. Pour empêcher l'annihilation, Superman et Ali devront accepter de se battre en combat singulier avant de rencontrer le champion scrubb. Évidemment - et heureusement, l'intrigue recèle de rebondissements et d'astuces scénaristiques pour parvenir à duper le lecteur, même si ce dernier se doute qu'il y a anguille sous roche. Curieusement, les caractérisations des personnages en font d'abord des coqs qui veillent chacun à leur pré carré. Puis viennent la coopération et les séances d'entraînement lors desquelles Ali enseigne le noble art à l'Homme d'acier, et enfin la camaraderie. Les auteurs ont fait attention à retranscrire la gouaille légendaire de l'athlète, qui intimide ainsi son adversaire avec sa verve bien connue. Les combats vont attirer toutes les foules de l'univers et en faire un événement interplanétaire autant que terrien (les première et quatrième de couverture représentent des visages de vedettes ou de figures publiques de l'époque). Si l'histoire ne marquera guère les amateurs plus exigeants, les illustrations, en revanche, sont remarquables. Adams est au sommet de son art. La double page ouvre le récit laisse pantois tant la scène semble grouiller de vie. Le dessinateur varie les découpages, utilise son sens de la perspective et offre une importante diversité de plans. Son trait imaginatif l'aide à créer des véhicules ou des races extraterrestres originaux. Adams retranscrit le mouvement et l'action avec un indéniable talent. Enfin, notons que le titre de la publication française met en avant le nom de Cassius Clay, sans doute parce que le sportif était plus connu chez nous sous le premier patronyme que sous le second. La traduction est satisfaisante.

L'album n'est rien de plus qu'une curiosité. L'histoire est moins réussie que celle de "Superman contre Spider-Man : Le Combat du siècle !", mais les planches d'Adams, fantastiques, justifient la lecture de cet OVNI de la bande dessinée super-héroïque.

Mon verdict : ★★★☆☆

Barbuz

4 commentaires:

  1. Je ne l'ai pas lu celui-là. Parmi ceux que tu cites, je n'ai lu que Superman / Spider-Man, et Superman/ Shazam.

    Quand DC a fini par rééditer celui-ci (en 2010), je n'avais pas d'envie particulière de le lire. Ton article confirme que le scénario ne vole pas haut. Comme je n'ai pas plu d’appétence que ça pour les dessins de Neal Adams, je vais encore passer mon chemin.

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    1. Le "Superman contre Shazam" est sur ma liste aussi.
      C'est justement pour Neal Adams que je l'ai lu (pour moi, le nº1 absolu). Sinon, je crois que j'aurais passé la main.

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  2. J'avais été curieux des travaux de Neal Adams quand il était revenu aux crayons (et au scénario) depuis 2010, ce qui m'a amené à lire Batman Odyssey (2010-2012), X-Men First X-Men (2012, disponible en VF), Blood (2013, une histoire de 60 pages publiée par Dark Horse), et Deadman (2018). Je n'ai fait l'impasse que sur Superman: The Coming of the Supermen.

    Le dynamisme des personnages est intact, avec les perspectives un peu forcées. Neal Adams est investi dans chaque page, avec un bon degré de densité visuelle. Le découpage en case reste parfois heurté. Je n'arrive pas à saisir l'enjeu de ses récits dont le rythme m'apparaît très saccadé, et les rebondissements mal amenés.

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    1. C’est donc surtout le scénariste, qui te laisse perplexe, plutôt que le dessinateur, malgré les défauts que tu soulignes...

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