"Brainiac" est le cinquième, et donc l'avant-dernier tome des six de la quasi-intégrale consacrée par Urban Comics à la période de Geoff Johns sur le personnage de Superman. Cet album compte approximativement cent cinquante planches ; il a été publié dans la collection DC Signatures de l'éditeur en septembre 2014. Au sommaire, les "Action Comics" #865-870 (juillet à décembre 2008), dont l'intégrale des cinq numéros de "Brainiac", le récit principal.
Johns écrit les scénarios. L'Espagnol Jesús Merino dessine et encre le #865, intitulé "Jeux d'enfants" (VO : "The Terrible Toyman") ; la mise en couleur est confiée au studio Hi-Fi Design. Le Britannique Gary Frank illustre l'arc consacré à Brainiac ; son travail est encré par Jon Sibal, avec une mise en couleur par Brad Anderson.
Gotham City, à l'asile Arkham. Winslow P. Schott, alias Toyman, s'est évadé, laissant un véritable sillage de sang derrière lui. Il est parvenu à voler une fourgonnette de l'institution psychiatrique, qu'il a utilisée comme bélier afin de briser la vitrine d'un magasin de jouets, où il a fait une autre victime. Schott s'est échappé parce qu'il estimait ne pas être à sa place à l'asile Arkham. C'est un endroit sur lequel plane l'ombre de Batman ; mais Toyman, lui, est plutôt "Superman". Il repense à Jimmy Olsen, du Daily Planet, l'auteur d'articles sur des laboratoires de clonage clandestins, entre autres. Bien qu'il reste un amateur, il y a de la justesse dans son travail. Donc, Schott l'enlève ; aujourd'hui, Olsen sera son copain. Et lorsque Jimmy se réveille, il est entouré de figurines de Superman qui volettent autour de lui pour le ligoter et l'attacher au sol. Toyman déclare que Lois Lane et Clark Kent ne l'auraient pas écouté, car ce sont des adultes : ils sont trop vieux. C'est pourquoi Schott a choisi Jimmy Olsen : parce qu'il ne fait confiance à quiconque de plus de dix-sept ans. En parlant, il examine la montre de Jimmy ; l'objet lui plaît. Lorsque Jimmy lui demande ce qu'il veut, Schott répond : il veut qu'Olsen raconte son existence...
"Brainiac" permet aux lecteurs de (re)découvrir deux récits qui mettent en scène des adversaires emblématiques de Superman, bien qu'ils n'évoluent pas dans la même catégorie. Dans "Jeux d'enfants", un épisode très convaincant d'une vingtaine de planches, Johns nous rappelle que Toyman est, avant tout, un ennemi de Superman. Il revient sur les origines du super-vilain en utilisant le mode narratif de l'entretien entre un journaliste (Jimmy Olsen) et son sujet (Winslow P. Schott, alias Toyman). Le scénariste lave l'honneur, en quelque sorte, d'un criminel qui clame son innocence dans les infanticides qui lui sont reprochés, mais conclut sur une pirouette qui force les lecteurs à douter de la cohérence des propos de Schott. Dans "Brainiac", son plat de résistance, Johns met en scène l'adversaire le plus emblématique de Superman derrière Lex Luthor, Brainiac, un extraterrestre natif de la planète Colu, obsédé par l'acquisition du savoir pour évoluer "jusqu'à la perfection", tristement célèbre pour avoir réduit la cité kryptonienne de Kandor et l'avoir enfermée dans une bouteille, avec tous ses habitants. C'est justement cette partie de la mythologie de Superman qu'évoque Johns, dans un arc qui va donner naissance à la saga de la Nouvelle Krypton. Brainiac, sous le crayon de Frank, est plus impressionnant que d'habitude : plus massif, plus sinistre, dans des visuels qui pourront rappeler l'univers de la franchise "Hellraiser". Les lecteurs exigeants regretteront certainement la vacuité des propos de Brainiac (de la part de quelqu'un qui a acquis tant de connaissances, ils sont terriblement insipides, hélas) et de ses dialogues avec l'Homme d'acier. Johns aurait pu insuffler plus de créativité dans une caractérisation qui reste trop primaire. Cet arc aura aussi des conséquences sur la vie privée de Clark Kent ; par le truchement de cinq planches tragiques, Johns souligne l'impuissance du surhomme qui, dans l'excitation et l'impatience de renouer avec les siens, n'entend pas l'appel à l'aide qu'il n'a pas le droit de rater. Chaque artiste produit un travail soigné et livre une excellente performance. Très expressif, le style de Merino est légèrement moins réaliste que celui de Frank, qui présente un trait classique, combiné à un découpage dynamique.
La traduction de Thomas Davier est irréprochable et son texte est impeccable : ni faute ni coquille. Les bonus de ce recueil comprennent une frise chronologique, une présentation des protagonistes, ainsi que des biographies de l'auteur et des artistes.
Malgré une caractérisation bien trop manichéenne de l'antagoniste principal, "Brainiac" est assurément l'un des sommets de la série "Geoff Johns présente Superman". Le récit consacré à Toyman n'est pas à sous-estimer : il vaut franchement la lecture.
Mon verdict : ★★★★☆
Je m'interroge encore sur les choix éditoriaux de DC Comics en rééditant ces épisodes de Geoff Johns en VO, car ils n'avaient pas inclus l'épisode 865 que du coup je n'ai pas eu l'occasion de lire. Je me souviens que j'avais été très surpris de découvrir un personnage aussi décalé dans le numéro 13 de 1988 : il semblait peu sérieux pour un redémarrage à zéro qui permettait de laisser de côté de tels supercriminels, même si John Byrne avait réussi à le faire fonctionner.
RépondreSupprimerBrainiac est plus impressionnant que d'habitude. - Oui, je me souviens encore de ce colosse qui ne ressemblait à rien de ce que j'avais déjà pu voir de lui, mais à l'époque je ne savais pas si c'était une nouveauté, ou une évolution qui s'était déroulée dans des épisodes que je n'avais pas lus. Je n'aurais pas pensé à le rapprocher du terrible cénobite, mais pourquoi pas.
Je me souviens également très bien de la séquence avec Catherine vantant les mérites de la chirurgie esthétique, une dose d'humour qui avait bien fonctionné avec moi.
C'est surtout dans son cocon (voir la couverture) qu'il me fait penser à l'univers de "Hellraiser". Je t'accorde que c'est moins évident une fois qu'il en sort, surtout avec son imposant physique de colosse.
SupprimerIl y a effectivement quelques séquences humoristiques réussies dans ces épisodes. J'avais apprécié l'effet que produit Supergirl lorsqu'elle débarque dans les bureaux. J'avais trouvé que les personnalités des membres de l'équipe éditoriale du Daily Planet, malgré une certaine propension de Johns aux stéréotypes, avaient été plutôt bien trouvées.