"La Légende de Darkseid" est un album sorti en novembre 2014, dans la collection DC Nemesis d'Urban Comics. Cet épais ouvrage à la couverture cartonnée (format 17,5 × 27,0) contient deux cent quarante-cinq planches environ. Au sommaire, et dans l'ordre, les versions françaises des compléments des "Jack Kirby's Fourth World" #2-5 (avril-juillet 1997), suivis de l'intégralité de la mini-série "Legends" (novembre 1986 à avril 1987), dans laquelle s'intercalent les "Superman" #3, "Adventures of Superman" #426 puis "Action Comics" #586, tous trois de mars 1987. La mini-série n'est pas inédite en France, car elle avait déjà été publiée par Semic, sous le titre "JLA : Légendes" dans sa collection Semic Books (mars 2004).
L'introduction, "Les Origines de Darkseid", est entièrement réalisée par John Byrne (scénario, dessin, encrage), à l'exception de sa mise en couleur, confiée à Lee Loughridge puis à Noelle Giddings. Le récit principal, "La Légende de Darlseid", a été écrit par John Ostrander, avec Len Wein aux dialogues. Byrne illustre ses six parties. Karl Kesel se charge de l'encrage ; Tom Ziuko et Carl Gafford composent la mise en couleur. Les numéros centrés sur Superman sont scénarisés par Byrne, avec le concours de Wolfman et Jerry Ordway dans "Adventures of Superman". Byrne est au dessin, sauf dans "Adventures of Superman" (Ordway). Terry Austin, puis Dick Giordano (1932-2010) sont à l'encrage, Ziuko à la mise en couleur.
Sur Apokolips. Attablés dans une auberge, Izayah et Drax s'affrontent au bras de fer devant une clientèle en délire. Uxas et Desaad observent la scène avec amusement depuis une mezzanine. La serveuse qui s'occupe d'eux s'étonne de ne jamais voir Uxas se livrer à ce type d'exercice. Uxas explique qu'il préfère regarder ; il ajoute que son frère suffit amplement à la tâche. Desaad précise que cette attitude leur vaut le dédain de leur reine mère, tandis que Drax amasse gloire et pouvoir ; Uxas, en le narguant, insinue que Desaad s'inquiète d'abord de ses intérêts, malgré l'amitié de Drax...
"La Légende de Darkseid" est un album globalement décevant. "Les Origines de Darkseid" propose une introduction intéressante et revient sur la véritable naissance du personnage. Curieusement, Byrne a cumulé tous les postes lors de la production de ces pages ; scénariste, dessinateur, encreur, et lettreur ! Hélas, sa partie graphique manque de mordant. Pourquoi ne s'est-il donc pas associé à Terry Austin, son encreur fétiche, une fois de plus ? "La Légende de Darkseid" a décidément très mal vieilli. Les événements du récit principal se déroulent peu après ceux de "Crisis on Infinite Earths", sans doute quelques mois plus tard. Ostrander écrit une mini-série bavarde à la morale naïve, voire infantile. Darkseid et le Phantom Stranger y confrontent leurs philosophies. Le tyran d'Apokolips complote pour que l'humanité exploite sa part mauvaise et fasse chuter les super-héros de leurs piédestaux, et le second cherche à convaincre le premier que son projet est voué à l'échec. Cela engendre des joutes verbeuses, répétitives, et interminables, pendant que les Terriens, menés par Glorious Godfrey, un démagogue populiste hors pair, se déchaînent décidément bien vite dans des séquences absolument invraisemblables à l'iconoclasme débridé et libéré. Le dénouement, proprement atterrant, dégouline de bons sentiments qui renvoient à un autre âge, tant cette intrigue et sa narration sont maniérées. En revanche, Byrne produit, dans les titres consacrés à Superman, trois numéros qui s'intègrent dans l'histoire principale. Le contenu, malgré une pirouette scénaristique en guise d'épilogue, est captivant, et les lecteurs en viendront à regretter amèrement que la série ait été confiée à Ostrander plutôt qu'à Byrne. Pour la partie graphique, le Britannique utilise un trait fin, soigné, au style aisément identifiable, qui répond aux canons en vogue dans les années quatre-vingt. Byrne, au faîte de son art, doit composer avec des costumes criards : Black Canary est tout droit sortie d'une fête disco, et Guy Gardner, avec ses bottes surdimensionnées et sa coupe au bol, affiche une allure d'imperturbable péquenot présomptueux content de lui. La minutie que Byrne appose à chaque figurant est manifeste, et son découpage, plutôt traditionnel, est limpide.
La traduction de Patrick Marcel est de qualité, mais le texte comporte une coquille et une faute d'accord ; "Jason" (Todd) est orthographié "Jayson" à deux reprises. La préface de Mike Gold, l'éditeur de la mini-série à l'époque, est pompière, et inutile.
Si "Les Origines de Darkseid" sont intéressantes, Byrne aurait dû déléguer le dessin. L'histoire de "La Légende Darkseid" est trop naïve, malgré trois numéros très réussis avec Superman. Dommage que la totalité de ce projet n'ait pas été confiée à Byrne.
Je ne me souviens plus si j'ai lu les épisodes parus dans Jack Kirby's Fourth World : visiblement je n'ai pas manqué grand chose. A cette époque, il a pris l'habitude de tout faire lui-même sur sa série principale, et de plus déléguer quand il réalise une série secondaire en même temps. Je me souviens qu'au départ j'avais aussi regretté que Terry Austin ne travaille plus avec lui. Mais à cette même époque, son encrage avait également évolué avec des traits plus secs et plus cassants, que je ne trouvais pas toujours agréable à l’œil.
RépondreSupprimerLegends : ça correspond à l'époque où je suis passé complètement de la VF à la VO. C'était une révolution de voir John Byrne dessiner pour DC, et Legends lui permettait de toucher à beaucoup de personnages. J'ai jusqu'ici résisté à l'envie de relire cette minisérie, ton article me conforte dans cette résolution. :) C'est toujours ça d'économisé. A lire ton analyse, je me dis que John Ostrander devait être sous forte contrainte des responsables éditoriaux, parce que la tonalité de Suicide Squad qu'il a écrit juste après est très différente, beaucoup plus noire.
J'avais pourtant été bien plus clément à ma première lecture, celle de l'édition Semic, même si, à l'époque, la double dose de gloriole et d'autosatisfaction de Gold et Ostrander (parce que Semic avait ajouté la préface ou la postface de ce dernier) m'avait déjà couru sur le haricot. Et là, quelques années plus tard, je trouve que le propos est d'une incroyable niaiserie.
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