samedi 21 juillet 2018

The Punisher (tome 5) : "Le haut est en bas et le noir est blanc" (Panini Comics ; septembre 2006)

"Le haut est en bas et le noir est blanc" (septembre 2006), le cinquième tome des dix-huit de "The Punisher" sortis sous le label adulte MAX chez Panini Comics, contient le quatrième arc de la série (#19-24 en VO, juin à octobre 2005). "The Punisher" s'étalera sur soixante-quinze numéros, de mars 2004 à octobre 2009 en VO et d'avril 2004 à janvier 2011 en France. Depuis 2013, Panini Comics procède à une réédition en compilant deux histoires par tome. C'est la première édition que présente ce billet, un album à couverture flexible d'environ cent trente-huit planches.
Le scénario est écrit par Garth Ennis ("Preacher", "The Boys", ou encore "Hellblazer"). Les dessins sont signés Leandro Fernández. Scott Hanna est à l'encrage, et Dan Brown à la mise en couleurs.

New York, cimetière de Green-Wood, la nuit. Le gangster Nicky Cavella et l'une de ses associées (dont le sweat-shirt à capuche dissimule le visage) se tiennent devant la pierre tombale de la famille Castle à la lueur d'une lanterne. Cavella ordonne à sa subalterne de placer la terre sur le côté et de s'assurer qu'il y a assez d'espace afin de pouvoir exposer les restes des Castle. Il veut que l'image englobe à la fois la pierre tombale et les ossements. L'autre s'exécute, et le mafieux commence à filmer dès le premier coup de bêche. Il s'arrête, pose la caméra, saisit une pelle et aide sa complice à creuser. Cette fois, il en est convaincu, il a enfin trouvé comment atteindre ce "fils de pute" de Castle !
Un pénitencier, où Kathryn O'Brien, ex-agent de la CIA, est incarcérée. O'Brien est sous la douche. Derrière elle se faufilent trois taulardes. O'Brien remarque leur présence et prend l'initiative. Elle éclate le nez de la première d'un coup de coude rageur, pilonne l'estomac de la seconde d'un direct du gauche, et évite l'assaut de la troisième, armée d'un couteau. Celle-ci l'insulte, et menace de lui découper les seins. Dans un cri de colère, elle charge O'Brien, la taillade au bras, mais l'ex-agent bloque le coup et la neutralise d'un atémi du tranchant de la main sur la gorge...

Bien que la continuité de cette série reste en filigrane, il est ici indispensable de lire ou de relire "Au commencement...", puisque trois protagonistes font leur retour dans "Le haut est en bas et le noir est blanc" : Nicky Cavella (sans ses deux sbires, morts), Kathryn O'Brien et William Roth, les deux anciens de la CIA. Cavella veut prendre sa revanche sur le justicier ; en profanant la tombe de la famille Castle, il s'attaque ainsi au seul lieu qui soit véritablement sacré pour le Punisher. Évidemment, en conséquence, des flots et des flots d'hémoglobine se déverseront - faut-il le préciser. Ennis met en scène un Punisher capable de maîtriser sa colère et prêt au sacrifice ultime sans perdre son sang-froid ou le contrôle de lui-même. Des alliés inespérés lui permettront de prolonger sa croisade, d'aller au bout de cette affaire, et même de s'offrir un bout de romance avec celle qui aurait pu être son pendant féminin. Cette histoire est également celle d'un masque, celui de Cavella, aussi retors que sadique ou lâche, qui n'assume pas sa sexualité par peur de voir la voie du pouvoir se fermer ; la planche finale du second numéro fera penser à la scène du dirigeable ("The World is Yours") du "Scarface" (1983) de Brian De Palma. Hélas, la caractérisation de Cavella et la conclusion de ce tome aboutissent sur l'invraisemblance, l'incohérence de la prise d'otage ; le lecteur ne pourra être que dubitatif, sceptique à l'égard de cette pirouette narrative. Enfin, cela fait deux albums qu'Ennis semble contrôler la brutalité de ses récits ; sans doute cela n'est-il que passager, mais il n'y a ni torture ni mutilation génitale dans cet album, et le lecteur se voit ainsi épargner la sensation de dégoût ou de malaise, bien que la violence et la noirceur du titre restent bien réelles. La partie graphique est indéniablement réussie. Fernández avait déjà illustré "Kitchen Irish" ; son style fini, détaillé (à l'exception des fonds de cases) et expressif sied parfaitement au récit. Le travail de contraste entre ombre et lumière est formidable. La couleur est terne.
La traduction est de Nicole Duclos, comme celle des tomes précédents. Le résultat est satisfaisant : rien à redire sur le texte. Côté maquette, l'éditeur regroupe les couvertures originales à la fin ; elles auraient dû être insérées en début de chapitre.

Malgré une fin franchement décevante de par son incohérence, "Le haut est en bas et le noir est blanc" est un excellent album de la série "The Punisher", et c'est très certainement le meilleur des quatre premiers arcs sans compter la mini-série "Born".

Mon verdict : ★★★★☆

Barbuz

2 commentaires:

  1. Mon petit grain de sel supplémentaire parce que je ne peux pas m'en empêcher : ce tome m'avait laissé avec un sentiment partagé, mais pour d'autres raisons que toi. Il m'avait paru très agréable à lire grâce à des illustrations très plaisantes à tout niveau (détails, esthétique, efficacité) et il présente une nouvelle facette de Frank Castle (la distance qui le sépare d'une folie destructrice et suicidaire).

    En outre, Ennis expose également de manière magistrale en quoi le monde du Punisher est sens dessus dessous, comme évoqué dans le titre. Mais j'avais trouvé que les agissements des personnages ne semblent pas toujours raccord avec leur personnalité et leurs motivations. En particulier, je n'avais pas réussi à déterminer si Kathryn O'Brien se soumet à l'alpha-mâle qu'est Castle, ou si elle a pitié de lui, ni pourquoi elle épargne son ex-mari.

    Dans ce tome, Ennis réussit aussi une ennemie inoubliable : Teresa Gazzera. Attention : le tome suivant est l'un des plus éprouvants.

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    1. Je ne sais pas si O'Brien a pitié de Castle. Je la vois comme une nymphomane avec des fantasmes qui durent jusqu'à ce qu'ils soient assouvis. Par contre, maintenant que tu en parles, c'est vrai que la caractérisation du personnage n'est peut-être pas tout à fait en phase avec celle qui lui est donnée dans le second tome.
      Ce qui m'a surpris - et déçu - est le traitement réservé à Nicky Cavella. Voilà un type qui dessoude ses parents, tue un innocent, étouffe sa tante, mais qui a peur d'abattre un otage qu'il ne connaît pas. Je n'ai pas compris.
      Merci de m'avoir prévenu pour le sixième tome ; je m'attends au pire...

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