"Mon nom est Gotham" est le premier des douze numéros de la version française de la série "Batman" du "Rebirth" - une nouvelle période éditoriale (la troisième pour le titre "Batman") lancée en 2016 et qui succède aux "New 52" (second volume, 2011-2016), connus en France sous le nom de "Renaissance DC". Ce recueil inclut les versions françaises du "Batman Rebirth" #1 (d'août 2016) et des "Batman" #1-6 (d'août à novembre 2016). Il est sorti en juin 2017, dans la collection "DC Rebirth" d'Urban Comics. C'est un ouvrage format 18,7 × 28,2 centimètres à couverture cartonnée, de cent cinquante-cinq planches environ, plus une trentaine de pages bonus dont des crayonnés et des variantes de couvertures.
Le "Batman Rebirth" est coécrit par Scott Snyder et Tom King ; puis King prend les rênes. Mikel Janín illustre et encre ce numéro d'introduction, colorisé par June Chung. David Finch est le dessinateur attitré de ce premier arc, mais Ivan Reis se charge du #6. L'encrage a été réparti entre Matt Banning, Danny Miki, Sandra Hope, Scott Hanna, Joe Prado, Oclair Albert, et Finch, et la mise en couleurs est partagée entre Jordie Bellaire et Marcelo Maiolo.
Alfred Pennyworth cueille des avocats dans les jardins du manoir Wayne lorsque son smartphone retentit. Quelqu'un a sonné à la porte d'entrée ; c'est Duke Thomas. Il justifie sa présence à Pennyworth en expliquant qu'il vient "pour la proposition". Le même jour, Batman affronte l'Almanach, qui emploie des lance-grenades pour répandre des spores mortelles. Le super-vilain raconte à Batman que les hommes ont voulu modifier le cycle des saisons, "maîtriser les cieux et les océans", et ont failli "briser la grande roue" ; alors cette année, le printemps viendra deux fois et fera éclore la mort sur Gotham City. Mais Batman ne lui laisse pas le temps d'achever son laïus et le neutralise d'une clé habile. Dans la foulée, il demande au commissaire Gordon de l'informer de la qualité de l'air. Le policier lui répond que les spores sont déjà là...
King succède ainsi à Snyder, dont le travail sur "Batman" (celui des "New 52") n'a pas fait l'unanimité. Le lecteur voudra donc découvrir ce qui propose King, qu'il ait été déçu par le passage de Snyder, ou qu'il en soit ressorti enthousiaste. À savoir : le "Rebirth" ne garde pas tous les éléments des "New 52", mais en conserve quand même quelques-uns ; la franchise "Batman" ne fait pas exception, à commencer par Duke Thomas, par exemple, une création de Snyder. Autant Snyder présentait une version du Bat-univers personnelle, plutôt outrancière, et flirtant en permanence avec l'iconoclasme, autant l'approche de King semble prendre ses racines dans une ambiance plus classique, antérieure aux "New 52". Quoi qu'il en soit, le spectacle est présent : l'Almanach veut répandre des spores mortelles dans l'air, un avion de ligne menace de s'écraser en ville, de nouveaux "méta-humains" entrent en scène à Gotham City, et des citoyens apparemment sans histoires se suicident dans des conditions pour le moins spectaculaires. Derrière cela, une expérimentation militaire illicite qui dérape. Ces éléments sont du pain bénit pour l'univers sombre de "Batman", d'autant que King démontre une admirable maîtrise de la narration malgré la multiplication des fils et les ramifications de l'intrigue. Bien que le Batman de l'auteur doute et soit en proie à la peur de l'échec, il reste supérieurement entraîné et formé ; ce n'est pas le cas d'Henry et Claire Clover, qui vont apprendre à leurs dépens que peu importent les superpouvoirs, le drame est inévitable lorsque la préparation psychologique est insuffisante, surtout dans une ville telle que Gotham City, qui ne pardonne rien. S'il faut également reconnaître à King son sens du rythme et de l'action, ajoutons d'autres qualités, sa connaissance de méchants de troisième zone (le colonel Blimp, Kite-Man, et Captain Stingaree), qui reflète aussi un sens de l'humour certain, ainsi que des dialogues intéressants, sacrément bien troussés, et qui sonnent juste.
Quelques planches du style à la fois élégant et sophistiqué de Janín, puis Finch produit cinq numéros de son trait au rendu agressif, sombre, puissant, et spectaculaire, qui convient parfaitement à cet arc narratif. Le Canadien prouve là qu'il est un artiste complet, autant par la diversité des angles des prises de vues que par la mise en page, qui alterne cases horizontales et verticales avec des perspectives qui peuvent être saisissantes, par exemple, le Batplane dans le #5. Les encreurs Banning, Miki, Hannah, et Hope sont appliqués et respectueux et contribuent à la réussite de la partie graphique. Dans une veine tout aussi réaliste, Reis présente un coup de crayon moins brut et avec une expressivité plus variée que celle de Finch. Enfin, notons que la colorisation du Brésilien Maiolo est plus criarde que celle de Bellaire.
La traduction a été effectuée par Jérôme Wicky. Wicky est - cela n'engage que moi - l'un des tout meilleurs professionnels du circuit, si pas LE meilleur. Le résultat est irréprochable et exemplaire : un texte soigné, qui ne comprend ni faute ni coquille.
Dès ses premiers épisodes, King marque de son sceau cette nouvelle période narrative. Ce renouveau à l'issue de l'ère Snyder est particulièrement prometteur. Surtout, il rassure un peu les fans de longue date de la franchise après les libertés de Snyder.
Mon verdict : ★★★★★
Barbüz
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Respect : tu as su détecter les qualités d'écriture de Tom King plus rapidement que moi. J'avais été perdu dans la minisérie Omega Men, ne parvenant pas à comprendre le rythme. Du coup seulement 4 étoiles pour ce premier tome, mais ensuite quel pied !
RépondreSupprimerLa version courte de mon commentaire :
Dès les premières pages, le lecteur est mis dans le bain : il est face au Batman version über-Batman, plus grand que nature, arrêtant les avions à main nue ou peu s'en faut. Sous réserve de ne pas être allergique à cette interprétation du personnage, très éloignée du détective urbain face à des criminels de rue fous et déformés, il peut alors goûter à l'approche très virile des dessins de David Finch, et à une histoire plus noire qu'elle ne le laisse le supposer. Tom King prend à rebours les clichés habituels sur les superhéros arrivant pour s'établir à Gotham (souvent des traîtres venus pour saper le travail de Batman en sous-main). Ce faisant, il donne une personnalité et des motivations plausibles à des superhéros aux noms aussi dépourvus d'imagination que Gotham & Gotham Girl. Il insuffle du sens quant au choix de ces noms basiques. Il fait briller une facette de Batman déjà existante avant, mais rarement éclairée de cette manière, et avec cette intelligence. 4 étoiles pour un début un peu trop énorme, mais assez personnel.
La version longue :
https://www.babelio.com/livres/Snyder-Batman-Rebirth-tome-1--Le-retour-de-Batman-/946530/critiques/1346324
J'ai été agréablement surpris de la qualité de ce premier arc. Il est aussi très probable que mon enthousiasme ait été inconsciemment décuplé par le fait de pouvoir enfin tourner la page Snyder grâce à des épisodes de qualité.
SupprimerJe m'étais également lancé dans cette série avec le plaisir anticipé de pouvoir relire du Batman, après le départ de Scott Snyder dont l'écriture ne me plaît pas, à un exception près Wytches avec Jock... série qui compte 1 unique tome pour une histoire non terminée et qu'ils n'ont pas continuée.
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