mardi 24 mai 2022

Justice League (tome 1) : "Les Machines du chaos" (Urban Comics ; juin 2017)

"Les Machines du chaos" est le premier des six recueils de la version française de la série "Justice League" du "Rebirth" - nouvelle période éditoriale (la troisième pour le titre "Justice League") lancée en 2016 ; elle succède aux "New 52" (second volume, 2011-2016), connus en France sous le nom de "Renaissance DC". Le recueil inclut les versions françaises du "Justice League Rebirth" #1 (septembre 2016) et des "Justice League" #1-5 (septembre à novembre 2016). Cet ouvrage relié (format 18,7 × 28,2 cm) est sorti en juin 2017 dans la collection "DC Rebirth" d'Urban Comics. Il compte environ cent vingt-quatre planches, plus une trentaine de pages bonus dont variantes de couvertures, crayonnés et études. 
Ces six numéros sont écrits par le Britannique Bryan Hitch, d'abord connu comme dessinateur. Il illustre quand même le premier, avant de transmettre le flambeau à Tony S. Daniel, qui réalise quatre des cinq autres ; le #4 est dessiné par Jesús Merino. Daniel Henriques, Scott Hanna, Andy Owens, et surtout Sandu Florea se partagent la tâche d'encrage. Alex Sinclair a colorisé le premier numéro et Tomeu Morey est coloriste attitré de "Justice League"

Manhattan, en plein jour ; une espère de scarabée gigantesque s'est posée sur le quartier - il occupe presque la même superficie que la cité - et commence à en démolir les immeubles. En bas, dans les rues, c'est la panique. Le monstre envoie des milliers de parasites sur les humains. Ils s'accrochent au visage de leur victime dès qu'ils en ont ciblé une ; c'est à ce moment que la Justice League intervient, Aquaman, Batman, Flash, Wonder Woman, Cyborg. Ailleurs, Clark et Lois discutent dans leur cuisine, un verre de vin rouge à la main. Clark épluche et coupe les légumes ; Jon - leur fils - joue dans le salon. Clark a l'impression que quelque chose - qu'il ignore encore - est en train de "se tramer". Lois tente de le persuader de rejoindre les rangs de la Ligue de Justice ; le Superman de cette Terre, d'ailleurs, n'en était-il pas membre ?... 

Avant de découvrir cette nouvelle mouture, le lecteur doit savoir que le Superman des "New 52" est mort et qu'avant son décès, il a transmis le flambeau au Superman pré-"Flashpoint" et "New 52" ; une complication qui est sans conséquence sur la compréhension de l'histoire. Ce premier recueil joue sur deux points : des catastrophes naturelles causées vraisemblablement par des invasions ou agressions non humaines d'ampleur, et la relation entre Superman et les membres fondateurs de la Ligue de Justice. Allons-y sans ambages, ces pages sont ce que la franchise "Justice League" a connu de moins inspiré depuis bien des années, même l'ère "New 52" proposait des récits plus intéressants. Mais ici, DC Comics nous offre ce que ce genre produit de plus ordinaire quand il n'y a pas grand-chose à raconter : des monstres et des entités cosmiques. Impossible de s'intéresser à la dimension psychologique de la rivalité entre deux adversaires ; d'un côté, un groupe de super-héros, de l'autre, des monstres mutiques (un à New York City, un à Gotham City) et des entités qui ont pour objectif d'engloutir les humains et de les fusionner en eux avant que la Terre disparaisse et dont les propos, aussi creux que métaphysiques, extirperont moult soupirs de consternation et d'ennui au lecteur. Hitch produit un scénario apocalyptique qui combine menaces inconnues et catastrophes naturelles (séismes). Le lecteur est poussé dans le feu de l'action dès la seconde vignette, et la cadence ne faiblit pas ; ce choix de l'action permanente et du rythme soutenu sauve certainement l'arc de la déroute scénaristique la plus totale ; car bien que hautement sceptiques, les lecteurs finiront par oublier ces dialogues aussi convenus que fonctionnels (en plus des caractérisations qui demeurent extrêmement superficielles) et se laisseront porter tant bien que mal jusqu'au dénouement. Un démarrage globalement inquiétant pour "Justice League". Les lecteurs n'en garderont que le souvenir d'un rendez-vous raté. 
Signé Hitch, le dessin du premier numéro est désastreux : les finitions sont aléatoires, et les visages à géométrie variable (exemples : Wonder Woman, Lois, Aquaman). Difficile de n'y voir qu'un problème d'encrage. Daniel (plus que Merino) relève le niveau aisément. Son style réaliste se caractérise par un fin trait régulier, qui souligne la plastique avantageuse des protagonistes dans des compositions spectaculaires et pleines d'énergie ; Daniel produit plusieurs doubles pages, et emploie fréquemment la technique de l'incrustation. Les perfectionnistes pourront trouver à redire, notamment - encore - au niveau des finitions, ou de l'expressivité des protagonistes, mais les planches du dessinateur offrent une densité de détail très appréciable, avec un rendu efficace qui accentue la sensation d'action et de chaos ambiant. 
La traduction a été confiée à Edmond Tourriol, dont le texte est irréprochable : ni faute ni coquille. Mais il y a une faute d'orthographe ("palier" pour "pallier") et deux de syntaxe dans la préface, "pallier à" pour "pallier" et "suite à" pour "à la suite de"

Malgré le clin d'œil à Starro, le scénario est creux et la partie graphique oscille entre raté et bon. Les lecteurs se demanderont ce qui a motivé DC Comics à confier un titre comme "Justice League" à une équipe artistique qui n'a qu'évité la catastrophe. 

Mon verdict : ★★☆☆☆

Barbüz
Copyright © 2014 Les BD de Barbüz

Justice League, DC Rebirth, Bryan Hitch, Tony S. Daniel, DC Comics, Urban Comics

2 commentaires:

  1. Ces pages sont ce que la franchise Justice League a connu de moins inspiré depuis bien des années : j'ai arrêté ma lecture de l'article là, car tout est dit. 😁

    Les lecteurs finiront par oublier ces dialogues aussi convenus que fonctionnels, en plus des caractérisations qui demeurent extrêmement superficielles : j'ai quand même continué et je comprends qu'il s'agit d'un comics fabriqué sur mesure pour l'action.

    Mais si même Hitch scénariste n'est pas assez convaincu pour réaliser des planches spectaculaires, ça met un doute.

    Tony S. Daniel, un dessinateur qui avait également franchi le pas d'écrire : je me souviens de lui pour cette scène insoutenable dans laquelle Joker s'enlève la peau du visage.

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    1. Je me souviens aussi de cet épisode du visage du Joker ; il était paru dans "Batman Saga" à l'époque ; je n'avais pas trouvé cet arc terrible du tout. En revanche, cette idée de Daniel a fait son bonhomme de chemin.
      J'adore Pérez et Byrne, mais je me méfie des dessinateurs qui veulent jouer les apprentis-scénaristes, surtout lorsque l'éditeur leur confie des franchises importantes : Bryan Hitch ("Justice League"), Tony Daniel ("Detective Comics"), ou encore Francis Manapul ("Flash"), pour ne prendre que des exemples (relativement) récents.

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