Ce livre est le premier tome de l'intégrale que Panini Comics France consacre à Alpha Flight, l'équipe canadienne de super-héros autrefois connue du public francophone sous le nom de Division Alpha. Sorti en février 2021, cet album couvre l'intégralité de la période 1978-1984. Il comprend les versions françaises des "X-Men" #109 (de février 1978), 120 et 121 (avril et mai 1979), 139 et 140 (novembre et décembre 1980), du "Machine Man" #18 (décembre 1980), des "Alpha Flight" #1-8 (août 1983 à mars 1984). Un tome 17,7 × 26,8 cm, de deux cent cinquante pages en couleurs.
Chris Claremont scénarise les "X-Men", avec l'aide de John Byrne à partir du #120. Byrne dessine ces épisodes ; ses planches sont encrées par Terry Austin. Tom DeFalco écrit le "Machine Man", illustré et encré par Steve Ditko (1927-2018). Byrne est scénariste unique des "Alpha Flight", qu'il dessine et encre aussi, tout en solo. Glynis Wein est la coloriste des "X-Men", Nel Yomtov celui du "Machine Man", et Andy Yanchus (1944-2021) pour "Alpha Flight".
De retour de l'espace, les X-Men réintègrent l'Institut. Chacun y vaque à ses affaires. Ororo gagne sa chambre, Jean retrouve ses parents. Ils ne se doutent pas que l'un d'eux est sous surveillance, depuis ce qui semble être un avion furtif ; les forces spéciales canadiennes ont effectivement localisé une certaine Arme X. Un opérateur indique que les "systèmes" sont "activés" ; un contact devrait avoir lieu dans deux heures. Peu après, au manoir, Logan annonce qu'il part en balade, il a une furieuse envie de chasser en forêt. L'équipe de surveillance procède à une mise à jour : la cible se déplaçant, leurs ordinateurs recalculent l'itinéraire. Un opérateur s'inquiète de l'éventuelle présence d'avions d'interception américains dans le ciel. Un autre le rassure : leurs systèmes de contre-mesure les protègent des radars. Avec un peu de chance, l'Arme X "n'aura pas le temps de dire ouf !" Dans l'ombre, un agent masqué. Son costume arbore la feuille d'érable du Canada...
Le vétéran des comics qui connait déjà les épisodes de la série "X-Men" pourra être agacé et pousser un "Encore !" tonitruant, ou au contraire tenter de les redécouvrir sous l'angle d'Alpha Flight, conscient que les X-Men restent les héros de leur titre. Nos Canadiens affichent - moins que leurs voisins, mais il faut le souligner - une jolie diversité, avec des anglophones, des francophones, un Amérindien, un nain, et un amphibien d'origine extraterrestre. Naturellement les personnalités des membres du groupe sont différentes les unes des autres : le manque de confiance en lui de James MacDonald Hudson, le mystère entourant Anne McKenzie, le drame derrière la vie de Michael Twoyoungmen, Jeanne-Marie Beaubier et sa schizophrénie, et Marina et ses origines inquiétantes. Byrne dévoile progressivement les origines des héros dans de courts récits de complément bien ficelés, qui étoffent les personnalités de manière convaincante. Les caractérisations sonnent juste ; Byrne, qui a appris auprès de Claremont, creuse les psychologies par le truchement d'introspections pour chaque personnage. Contrairement aux X-Men, les interactions se distinguent par l'absence de romance et de rivalité pour le commandement de ce groupe, qui est - pour le moment - un assemblage d'individualités plus qu'une véritable équipe. Ayant vécu une quinzaine d'années au Canada, Byrne fait également voyager le lecteur, qui trouvera agréable de sortir des États-Unis et de parcourir le Canada, dont l'auteur s'efforce de donner un aperçu de la vastitude et de la diversité, d'Ottawa aux Territoires du Nord-Ouest, en passant par l'Alberta, le Québec, Toronto, Terre-Neuve, ou encore la Colombie-Britannique ; cela a une influence sur ses intrigues, qui se déroulent sur la banquise ou dans les grandes étendues végétales plutôt que dans les mégalopoles. Byrne varie les plaisirs : fantastique, histoires de monstres, récits de science-fiction, ou enquête policière, pour le plus grand régal du lecteur. Notons qu'au Canada, la question mutante est moins présente : Alpha Flight travaille pour le gouvernement, ou en accord avec celui-ci. Le "Machine Man" n'est vraiment pas captivant.
La partie graphique de Byrne, alors au faîte de sa carrière, est l'autre atout de ces épisodes. Le lecteur sera ravi de retrouver l'élégance et la finesse du trait, la clarté du découpage, le détail d'une concentration généralement satisfaisante malgré une propension marquée à la frugalité des arrière-plans, les physionomies d'une variété suffisante. Cela peut paraître contradictoire, mais l'encrage par Byrne de ses propres planches est légèrement plus râpeux, moins poli que celui d'Austin dans "X-Men" ; le trait, globalement, est moins lisse, moins droit, mais encore une fois, c'est discret. Malgré quelques cases saisissantes (Machine Man défiguré), les planches de Ditko pour le "Machine Man" n'ont pas de véritable intérêt artistique. Presque bâclées, elles paraissent datées et semblent restées ancrées dans les années soixante.
À la traduction, Nicole Duclos, Geneviève Coulomb, Nick Meylaender, Jérémy Manesse. Trois fautes d'accord, une d'article, une incohérence tutoiement-vouvoiement...
Le lancement d'une intégrale consacrée à la série "Alpha Flight" est plutôt surprenant : ce n'était certainement pas celle que les lecteurs attendaient le plus. Mais peu importe finalement, car la qualité est au rendez-vous et Byrne est en grande forme.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbüz
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Alpha Flight, Division Alpha, X-Men, Mutants, Machine Man, Chris Claremont, John Byrne, Steve Ditko, Marvel Comics, Panini Comics
Je retrouve dans ton article très concret, plusieurs remarques que je m'étais faites.
RépondreSupprimerL'auteur s'efforce de donner un aperçu de la vastitude et de la diversité du Canada : quand je lisais ces épisodes mensuellement, je ne m'en étais pas rendu compte, mais en les lisant à la suite c'est flagrant, ainsi que le fait de se tenir à l'écart des mégapoles. C'est comme s'il compensait le fait que ça ne se passe pas aux États-Unis, par un parcours touristique.
La frugalité des arrière-plans : très jolie expression, avec un renouvellement après celle des arrière-plans rationalisés.
L'encrage par Byrne de ses propres planches est légèrement plus râpeux, moins poli que celui d'Austin : ça m'avait également frappé, et déçu initialement. Dans une interview, Byrne expliquait que c'était un choix délibéré qui culminera avec ses épisodes de la série Wolverine encrés par Klaus Janson.
http://www.brucetringale.com/combines-en-amerique-centrale-wolverine-classic-4/
De ce que j'ai vu sur les réseaux sociaux cette intégrale était assez attendue, surtout pour John Byrne.
Je réalise que j'ai sans douté péché en prenant mon avis pour celui de la majorité. Je n'avais pas conscience que ce volume était tant attendu, et - d'un point de vue strictement personnel - je guettais plutôt Namor, Moon Knight, ou la suite de Hulk que la Division Alpha.
SupprimerDepuis quelque temps, Panini Comics frappe fort avec Byrne, de toute façon, entre les rééditions des X-Men et l'omnibus consacré à son passage sur les Quatre Fantastiques.