mardi 20 septembre 2022

Superman : "American Alien" (Urban Comics ; septembre 2017)

Cet album propose la version française de la mini-série "American Alien" dans son intégralité, soit les #1-7, qui furent publiés, en version originale, entre janvier et juillet 2016. Cet ouvrage relié de dimensions 18,7 × 28,2 cm est sorti en septembre 2017, dans la collection "DC Deluxe" d'Urban Comics. Il compte - approximativement - cent soixante-quinze planches couvertures comprises, plus une (petite) trentaine de pages de bonus, variantes de couvertures, études graphiques, esquisses et recherches pour chacun des numéros, et le synopsis original de Max Landis, le scénariste. 
La série est écrite par Max Landis, dans son intégralité ; un temps considéré comme une étoile montante, Landis voit sa carrière compromise lorsqu'en 2017, huit femmes l'accusent d'abus sexuel et moral. Chaque numéro est réalisé un dessinateur différent : Nick Dragotta, Tommy Lee Edwards, Joëlle Jones, Jae Lee, Francis Manapul, Jonathan Case, et Jock. Chaque dessinateur a encré ses propres planches. Il en est plus ou moins de même pour la mise en couleurs, les coloristes, outre Edwards, Manapul, et Case, sont Alex Guimarães, Rico Renzi, June Chung, et Lee Loughridge

Smallville, État du Kansas, par une nuit d'été étoilée. Un jeune Clark (de dix à douze ans ?) et sa mère adoptive sont en fâcheuse posture : le garçon est en vol stationnaire à une dizaine de mètres du sol, tandis que sa mère, visiblement effrayée, s'accroche à sa jambe gauche en l'incitant au calme. Jonathan Kent a entendu du bruit ; à l'étage de la maison, le plafond de l'une des pièces présente un trou suffisamment grand pour qu'un homme y passe. Il saisit une torche électrique, se rue au-dehors, et appelle son épouse et leur fils ; le spectacle de ces deux silhouettes se découpant à la lueur du clair de lune comme des ombres chinoises le méduse. Clark informe sa mère qu'il continue à monter ; pire, il ne parvient pas à s'arrêter. Martha lui explique qu'elle ne pourra pas tenir bien longtemps, mais qu'il est assez fort pour l'attraper... 

Landis saucissonne la minisérie en sept chapitres avec - pour marquer la distinction - un dessinateur différent à chaque fois. Sept titres et autant de noms de créatures volantes, dont aucun choisi au hasard. Dans "Colombe" ("Dove", la paix), le jeune Clark est un oisillon qui apprend à voler. Il ressent de la peine à ne pas être "normal". Cette histoire touchante sous-entend qu'il est un danger pour autrui et que certains habitants de Smallville sont au courant de ses capacités. Dans "Faucon" ("Hawk"un va-t-en-guerre dans la vie politique nord-américaine), conté comme un polar rural, un Clark adolescent intervient pour rendre justice ; mais sa bonne intention vire au cauchemar. Dans "Perroquet" ("Parrot"), un exercice d'imitation, Clark, jeune adulte, est pris pour Bruce Wayne à la suite d'un quiproquo ; il se retrouve sur le yacht du milliardaire à une fiesta d'enfer. Une romance douce-amère, avec ce passage charnière de la vie en filigrane. La raclée que se prend un certain super-tueur à gages est jubilatoire ! "Hibou" ("Owl") narre l'arrivée à Metropolis et l'heure des rencontres : Lois, Luthor, et Batman, dont les oripeaux, pris de force, servent à confectionner un bien curieux premier costume ; un chapitre plein d'humour qui alterne surprises et approche classique du mythe. "Aigle" ("Eagle") met en scène le symbole de la nation en guerre qui accompagne les troupes (les forces de l'ordre) au front. Dans "Ange" ("Angel"), Superman est en passe de devenir un objet de culte. Clark, néanmoins, est suffisamment proche de ses amis pour les écouter et se remettre en question - surtout après avoir été sauvé par un visiteur aussi étrange qu'inattendu. Dans "Valkyrie" ("Valkyrie"), la nature divine du sauveur ne fait plus de doute, mais certains se réjouiront surtout de voir cette triple buse de Lobo se faire battre comme plâtre par un Supes en grande forme. Sept récits indépendants, mais qui donnent une vue d'ensemble, alternent clins d'œil et relectures, sonnent juste, et offrent une large palette d'émotions. On pourra regretter les visions appauvries, privées de sel des parents Kent, qui ne sont plus fermiers, mais avocat et vétérinaire ! Tout un symbole. 
Les artistes non plus n'ont pas été choisis au hasard. Dans le premier chapitre, le style cartoony, expressif, et dynamique de Dragotta produit des cases saisissantes. Le trait réaliste, rugueux et à l'encrage prononcé d'Edwards est idéal pour le deuxième. Dans le troisième, Jones met en scène de jeunes adultes aux plastiques (souvent) parfaites, là encore avec une belle expressivité. Ensuite, c'est Lee, qui illustre à merveille les contrastes entre ombre et lumière à Metropolis, avec la cape de Batman en vedette. Le punch de Manapul est particulièrement adapté à l'atmosphère du cinquième chapitre, comme celui de Case au sixième avec l'ambiance du vernissage et des discussions entre amis. Enfin, Jock se charge avec brio du titanesque affrontement final. Conclusion : voilà dans l'ensemble un très bel exercice de variété. 
Le texte de la traduction de Laurent Queyssi tient la route malgré les onomatopées non traduites ("kof", "bark"), parce que graphiques. "Poser problème" est impropre.

Album réussi sur les jeunes années de Clark et les premiers combats de Superman, et qui insiste sur sa double nature, extraterrestre et terrienne. Sans suite, il rejoint la pléthore des one-shots, tandis que les séries régulières restent un peu à la peine.

Mon verdict : ★★★★☆

Barbüz
Copyright © 2014 Les BD de Barbüz

Superman, Clark Kent, Batman, Lex Luthor, Parasite, Lobo, Max Landis, Jae Lee, Francis Manapul, Jock, DC Comics, Panini Comics

2 commentaires:

  1. Je reprends progressivement mes activités après mes congés, d'où le temps de latence pour revenir.

    D'entrée de jeu, je me rends compte que je n'avais prêté aucune attention aux titres : merci pour cette mise en lumière.

    Sept récits indépendants qui donnent une vue d'ensemble, et qui sonnent juste : ce fut également mon ressenti à la lecture, une belle interprétation du personnage, bien construite, avec ce qu'il faut de personnalité pour Clark Kent, et pour l'auteur.

    Un album qui rejoint la pléthore des one-shots : fut une époque, la resucée interminable des origines de Superman (et des autres) m'agaçait au plus haut point. Avec le temps, j'ai fini par apprécié cet exercice de style très contraint et très pointu quand il est aussi bien exécuté que cette version.

    Mon article sur Bruce Lit :

    http://www.brucetringale.com/redecouverte-review-superman-alien/

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    1. Moi aussi, ça a tendance à m'agacer, cette "resucée interminable" des origines de Superman. Avec le temps, j'en suis arrivé à la conclusion que c'était là qu'il était le meilleur. J'ai lu le premier tome du "Rebirth" et je n'ai pas eu l'envie d'aller jusqu'au bout, par exemple.

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