jeudi 1 décembre 2022

"52" : Tome 1 (Urban Comics ; septembre 2017)

Cet album est le premier des quatre tomes de la version française de la série "52". Il en renferme les #1-13, parus entre juillet et octobre 2006 en version originale. Cet ouvrage relié de dimensions 17,5 × 26,5 est sorti en septembre 2017 dans la collection "DC Classiques" d'Urban Comics. Il compte deux cent soixante-cinq planches plus une quarantaine de pages de bonus : des notes pour chaque numéro, des découpages, des esquisses, des recherches de couvertures, les origines en deux planches d'Extensiman et de Booster Gold et enfin une galerie des couvertures de J. G. Jones. 
Geoff Johns, Grant Morrison, Greg Rucka et Mark Waid signent le scénario. Keith Giffen est chargé du découpage. Les dessins ont été réalisés par Joe Bennett, Chris Batista, Ken Lashley, Eddy Barrows, Shawn Moll, et Todd Nauck. Le travail d'encrage est divisé entre Ruy José, Jack Jadson, Jimmy Palmiotti, Lashley (bis), Rob Stull, Tom Nguyen ainsi que Marlo Alquiza. Enfin, pour terminer, Alex Sinclair et David Baron se sont réparti les mises en couleurs. 

Semaine un, jour un. À Opal City, Ralph Dibny - Extensiman - se tient debout au milieu des ruines de sa demeure. Celle-ci semble avoir été littéralement arrachée en deux. Dibny a les traits tirés et l'air déprimé ; il n'est pas rasé. De sa main gauche, il tient un pistolet automatique. De sa main droite, un téléphone portable collé à son oreille. Il écoute Beatriz da Costa - Fire - lui raconter les dernières nouvelles et prendre des siennes. Mais il est ailleurs, Bea s'en rend compte. À Gotham City, Renee Montoya est dans un bar, installée au comptoir ; elle enchaîne les verres de bourbon et les cigarettes, en écoutant les clients bavasser et colporter les derniers ragots, concernant la colère divine, la fin du monde, ou Superman. À Paris, en face d'une tour Eiffel encadrée par les flammes, un policier remercie Steel de les assister dans leurs recherches d'éventuels survivants ; ils se tiennent devant les ruines de l'école du fils de l'agent, qui est sans nouvelles de son enfant... 

Un beau défi éditorial que celui de "52" : un numéro par semaine pendant une année complète. Évidemment, ce n'est pas l'affaire d'une seule personne et DC Comics a tout fait pour qu'il n'y ait pas de frictions, mais quand même, soulignons l'efficacité de la machine, d'autant que le résultat (bien qu'il ne s'agisse que du premier quart) est satisfaisant, en toute sincérité. Le contexte dans les grandes lignes, peut-être : à la suite de la saga "Infinite Crisis"le Multivers est recréé, dans le sang. Après ce drame cosmique, Superman se retire le temps de recouvrer ses pouvoirs, Wonder Woman veut apprendre à mieux se connaître, Batman part pour un voyage initiatique avec Nightwing et Robin (Tim Drake) ; "52" - c'est sa particularité première - se déroule ainsi sans la fameuse trinité DC. Les auteurs centrent les intrigues sur quelques personnages-clés, pas plus, pour ne pas perdre le lecteur : Extensiman, Steel, Renee Montoya et la Question, Booster Gold, Black Adam. Il y a aussi des fils secondaires (pour le moment) autour du docteur Will Magnus et du trio Animal Man - Starfire - Adam Strange. Autant le dire sans attendre, ces suppléants ne sont pas à la fête. Par exemple, Dibny souffre toujours de la disparation de son épouse (cf. "Identity Crisis"), ce qui va l'amener à l'impensable ; Steel doit affronter la rébellion hargneuse de sa nièce adolescente, prête à tout sacrifier pour réaliser son rêve ; Montoya écume les bars pour assouvir sa soif d'alcool ; et Booster Gold veut devenir une vedette au risque que ses magouilles et son manque d'éthique soient révélés au public. En fin de compte, le seul qui montre peut-être le leadership suffisant pour prendre la suite de la trinité est Black Adam, bien qu'il multiplie les exécutions aussi brutales que sommaires de criminels ; pourtant, le lecteur ne pourra pas s'empêcher d'éprouver un sentiment de faiblesse à peine coupable pour le bonhomme, son charisme et l'autorité naturelle qu'il dégage. La variété des registres et des intrigues (le fil conducteur ne se laisse pas encore entrevoir) surprend agréablement et accroche, et l'utilisation d'une belle brochette de seconds couteaux apporte un brin de fraîcheur
Malgré le nombre de dessinateurs ayant travaillé sur ces numéros (six), la partie graphique réaliste se distingue par une relative uniformité de style, à première vue. Il est probable que la présence permanente de Giffen au découpage y soit pour quelque chose. Lorsque l'on examine ces planches de plus près, il est évident que chaque artiste a conservé la personnalité de son trait ; cela se remarque principalement aux visages des protagonistes. Bennett est celui qui s'en sort le mieux, assurément ; il ouvre la saga avec quatre numéros consécutifs, et son travail établit un étalon. Moll a un coup de crayon plus rond - moins purement réaliste - que celui de  collègues, et Nauck pèche par une légère exagération de l'expressivité des regards. Batista - malgré une pointe plus sèche - et les autres s'en sortent avec les honneurs. 
La traduction - tout comme celle des trois numéros suivants - a été confiée à Edmond Tourriol, du studio bordelais Makma. Son texte a été soigné : ni faute ni coquille.

Un premier recueil abordable et intéressant par des scénaristes chevronnés qui relèvent le gant avec facilité, au fond, comme une évidence. Les lecteurs s'attacheront rapidement et facilement à ces suppléants ; solide, la partie graphique fait le reste.

Mon verdict : ★★★★☆

Barbüz
Copyright © 2014 Les BD de Barbüz

Booster Gold, Extensiman, Steel, Renee Montoya, Geoff Johns, Grant Morrison, Greg Rucka, Mark Waid, Keith Giffen, Joe Bennett, DC Comics, Urban Comics

3 commentaires:

  1. Un beau défi éditorial : avec le recul, je mesure mieux l'énergie investie et l'implication des responsables éditoriaux pour coordonner une telle entreprise, une telle course contre la montre, pendant chaque semaine, pendant un an.

    52 se déroule sans la trinité DC : une 2ème pari osé que de croire à la viabilité d'une telle série, sans tête d'affiche de premier plan.

    Booster Gold : une belle réédition aura eu raison de mes réticences, et j'ai fini par satisfaire ma curiosité avec l'intégrale en 2 tomes de ce superhéros créé par Dan Jurgens.

    Tome 1
    https://www.amazon.fr/gp/customer-reviews/R3NVM2JOSI20OS/ref=cm_cr_dp_d_rvw_ttl?ie=UTF8&ASIN=1779500750

    Tome 2
    https://www.amazon.fr/gp/customer-reviews/R3E0VJ6TSX2VMY/ref=cm_cr_dp_d_rvw_ttl?ie=UTF8&ASIN=1779506724

    Malgré le nombre de dessinateurs ayant travaillé sur ces numéros : je me souviens d'avoir lu des interviews de Keith Giffen (en plus des pages bonus) et effectivement il assurait le découpage de chaque planche, chaque semaine, quelle régularité ! Très beau § sur les points communs et les différences entre les dessinateurs.

    Mon commentaire de l'époque :
    https://www.amazon.fr/gp/customer-reviews/R11DKNPGGGWH/ref=cm_cr_dp_d_rvw_ttl?ie=UTF8&ASIN=1845765524

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    1. Intéressants, tes articles sur Booster Gold ; du coup, je me prends à espérer qu'Urban Comics les publiera un jour en français.

      Concernant "52", ça s'arrête là pour moi. Le second tome fait intervenir Lobo, un personnage que je trouve franchement idiot. Même effet qu'avec "Infinite Crisis", même si la raison est différente ; dans le second, j'avais été rapidement lassé par ces bagarres intergalactiques bavardes et sans fin. J'avais aussi trouvé que cette alliance entre super-méchants ne tenait pas debout.

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    2. Lobo : celui qui dévore tes entrailles et y prend plaisir (traduction de son nom dans sa langue natale). Personnage conçu par Keith Giffen, avec Alan Grant et Simon Bisley pour être une caricature. Jean-Pascal Nguyen et moi avions écrit un article à 4 mains dessus, dont la lecture est rendue plus agréable par l'humour de JP.

      http://www.brucetringale.com/portrait-of-a-pastiche/

      J'avais continué 52 parce que des histoires écrites par Grant Morrison, Geoff Johns et Mark Waid, j'étais incapable de résister à leur attrait.

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