lundi 27 novembre 2023

Wonder Woman (tome 2) : "Mensonges" (Urban Comics ; novembre 2017)

Intitulé "Mensonges", cet ouvrage est le second des sept tomes de la version française de la "Wonder Woman" du "Rebirth" ; lancé en 2016, ce "Rebirth" inaugure une nouvelle période éditoriale du titre et succède aux "New 52" (quatrième volume : 2011-2016), connus sous le nom de "Renaissance DC" en France. Cet album comprend la version française du "Wonder Woman: Rebirth" d'août 2016 et celles des "Wonder Woman" #1, 3, 5, 7, 9 et 11 (d'août 2016 à janvier 2017). Il est sorti dans la collection "DC Rebirth" de l'éditeur en novembre 2017. Ce recueil relié (de dimensions 18,7 × 28,2 centimètres ; couverture cartonnée) compte exactement cent quarante planches en couleurs, plus seize pages de bonus dont : sept avec des couvertures alternatives (Frank Cho et Jenny Frison), une avec des recherches graphiques de Liam Sharp et huit autres avec des esquisses, des crayonnés et des encrés. 
Ces sept numéros sont écrits par le Californien Greg Rucka. Rucka est un habitué de l'Amazone (cf. "Greg Rucka présente Wonder Woman"). Les trois premiers quarts du "Wonder Woman Rebirth" (quatorze planches précisément) ont été crayonnés par Matthew Clark, encrés par Sean Parsons puis mis en couleurs par Jeremy Colwell ; les six planches qui restent de ce numéro d'introduction et les six "Wonder Woman" ont été crayonnés et encrés par le Britannique Liam Sharp et mis en couleurs par Laura Martin

Paris, au milieu des années 2010 : Wonder Woman revient d'une intervention musclée dans un peep-show de la capitale. Rentrée à son appartement, elle est intensément troublée. Dans ses souvenirs, l'histoire "ne cesse de changer" ; Diana est-elle une enfant d'argile et de sable ou le fruit des étreintes de Zeus et Hippolyte ? Elle contemple un instant le casque d'Arès, posé sur un buffet, et le pose sur sa tête. Diana se bat pour la vérité, mais celle-ci n'est-elle pas justement la première victime de la guerre ? Elle se remémore sa jeunesse, l'arrivée de Steve Trevor sur Themyscira, sa victoire au tournoi et son départ pour le monde des hommes, en tant qu'ambassadrice. Elle ôte son casque et appuie sur sa paroi des deux côtés, le métal ploie, se plie et se chiffonne... 

Comment réussir à concilier deux origines (l'historique et celle des "New 52") radicalement différentes ? Rucka a choisi d'expliquer cela par des troubles de la mémoire. Non pas que Diana soit malade ; mais elle est convaincue que quelqu'un lui joue des tours et s'amuse avec sa raison. Pire : elle ne retrouve plus la route vers son foyer, Themyscira. Cela semble annoncer une enquête (et une quête) qui devrai(en)t couvrir une partie de cette période éditoriale 2016-2020, si pas sa totalité. Rucka prend les mêmes et recommence, cela ayant du sens de s'appuyer sur des figures connues : Etta Candy, Steve Trevor et Barbara Minerva, alias Cheetah, et Veronica Cale - qui semble être la grande méchante de cette saga. Le scénariste réutilise également l'une de ses créations pour développer l'intrigue sur plusieurs fronts : Sasha Bordeaux. Il envoie aussi Wonder Woman en Afrique, dans la nation fictive du Bwunda : un culte sanguinaire enlève de jeunes femmes - la ressemblance avec Boko Haram s'arrête là. Rucka a une bonne idée : traiter Cheetah comme une anti-héroïne, voire comme une victime. Pourquoi pas ? Même si Wonder Woman perd l'une de ses ennemies les plus formidables. Il se trouve que Trevor est en mission au même endroit au même moment grâce à la bonne vieille magie des coïncidences ; c'est surtout une occasion pour Rucka d'insuffler de l'action en plus dans sa mixture, qui consiste en la quête menée par une icône désorientée, sur fond de contrée aussi dangereuse qu'exotique, de secte maléfique et de femmes enlevées. Franchement ça ne convainc pas. Le traitement de Diana est en demi-teinte, à la fois menaçante (les trois avertissements) et maître de soi, de compassion et de sororité. Rien de nouveau en fait. Peut-être la souffrance d'être coupée de son foyer n'est-elle pas suffisamment perceptible. Au fond, les caractérisations sont toutes convenues et lisses, voire ennuyeuses : de Trevor, en baroudeur au cœur tendre, qui conserve son humour dans les cas critiques à Candy, travailleuse et respectueuse, mais à qui on ne la fait pas, en passant par Cale, incarnation du cynisme et de la corruption du pouvoir et de la richesse. 
Autre raison de ne pas être convaincu : la qualité de la partie graphique. De son coup de crayon réaliste, Sharp est capable du meilleur comme du pire, ou presque. Le meilleur, ce sont quelques compositions remarquables (citons par exemple le combat contre les automates d'Héphaïstos ou l'arrivée de Diana au Bwunda) et la lisibilité du découpage et de l'action. Hélas, le lecteur remarquera assez vite l'irrégularité assez fréquente des finitions. C'est perceptible surtout dans les plans plus éloignés et dans l'omission des arrière-plans. Mais le pire est la répétition des prises de vues, car le Britannique abuse à la fois du (gros) plan de profil et de la position face-à-face dans les dialogues ; ce qui pouvait passer pour une démonstration technique du savoir-faire de l'artiste en matière d'expressivité s'avère terriblement lassant. 
La traduction a été effectuée par Thomas Davier, l'un des tout meilleurs du circuit. Le résultat est irréprochable et exemplaire : un texte soigné sans faute ni coquille.

Alors, ce second volume est-il convaincant ? Non, sans qu'il soit mauvais pour autant. En revanche, il est vraiment convenu sous toutes les coutures y compris celles de la partie graphique, d'autant que les épisodes pairs bénéficient du trait de Nicola Scott ou de celui de Bilquis Evely. Rucka, lui, quitte le titre à l'issue du #25

Mon verdict : ★★★☆☆

Barbüz
Copyright © 2014 Les BD de Barbüz

Wonder Woman, Steve Trevor, Etta Candy, Barbara Ann Minerva / Cheetah, Andres Cadulo, Urzkartaga, Sasha Bordeaux, Veronica Cale, Greg Rucka, Liam Sharp, DC Comics

2 commentaires:

  1. 3 étoiles... Hum... Je suis allé regarder mon propre commentaire de 2017, et je (re)découvre que j'ai mis autant d'étoiles que toi.

    Comment réussir à concilier deux origines radicalement différentes ? - C'est assez délicat, avec le recul, de se rendre compte que l'histoire n'est intelligible qu'à condition d'avoir en tête la dichotomie entre les deux versions New 52 et Rebirth. J'avais bien aimé que le scénariste remette la notion de vérité parmi les caractéristiques principales, sorte de transposition du détecteur de mensonge à la création duquel William Moulton Marston (le créateur de Wonder Woman) aurait participé.

    La bonne vieille magie des coïncidences : pour ma part, j'ai intégré cette magie dans les conventions narratives des comics de superhéros DC & Marvel.

    Les caractérisations sont toutes convenues et lisses, voire ennuyeuses : j'avais relevé cette même caractéristique, en l'occurrence Steve Trevor (une version soldat baroudeur, sans beaucoup de personnalité), une version d'Etta Candy qui fait penser à Amanda Waller (avec un meilleur caractère) dans sa version pré-Flashpoint, Cheetah sans beaucoup de personnalité non plus, Veronica Cale (pas assez de temps d'apparition pour se faire une idée), avec la même exception que toi pour Sasha Bordeaux dans une version très intrigante.

    Sharp est capable du meilleur comme du pire, ou presque : 100% d'accord. Le lecteur finit par regretter que Liam Sharp maîtrise trop bien l'art et la manière de masquer l'absence d'arrière-plan, en particulier avec des personnages occupant toute l'aire de la case. Du coup, certains environnements ne semblent plus qu'une collection de décors sans réussir à donner une impression de lieu avec une topographie consistante. Il apparaît aussi régulièrement que le dessinateur a pris grand plaisir à réaliser certaines cases.

    Alors, ce second volume est-il convaincant ? Même réponse négative que toi : je n'ai pas continué plus loin.

    https://www.babelio.com/livres/Rucka-Wonder-Woman-Rebirth-tome-2/982469/critiques/1467736

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    1. Présence qui donne trois étoiles ? Non !... Pour une fois que nous attribuons la même note !...

      Je vais te surprendre (ou pas), mais je vais continuer cette série ; après tout, j'avais donné quatre étoiles au premier tome.

      Liam Sharp. Ravi que nous ayons le même avis, là aussi. Il me semble me souvenir d'avoir lu des commentaires dithyrambiques de lecteurs sur Facebook. Je suis tombé de haut. Je crois qu'il a dessiné une aventure de Batman et Wonder Woman qui vont aider un dieu celte, je crois. C'est sorti chez Urban Comics. Je ferai l'impasse, car je pense que je suis en train de devenir allergique à son style comme je suis devenu allergique à Scott Snyder, Geoff Johns (un peu) et - depuis peu - Brian Azzarello.

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