Hulk, l'intégrale : 1962-1963 (Panini Comics ; juin 2003)

Le premier volume de l'intégrale consacrée à Hulk par Panini Comics est sorti en juin 2003. Ce recueil cartonné avec jaquette amovible d'environ cent cinquante planches compile la totalité des six numéros de la première saison de la série VO "Incredible Hulk", du #1 de mai 1962 au #6 de mars 1963, à un rythme bimestriel. L'accueil du public n'ayant pas, hélas, été suffisamment enthousiaste, "Incredible Hulk" fut suspendu au bout d'une année.
"Incredible Hulk" est lancé par Stan Lee (1922-2018), qui reste aux manettes du scénario de ces six épisodes, et par Jack Kirby (1917-1994), qui en illustre les cinq premiers. Le travail de l'artiste est encré successivement par Paul Reinman (1910-1988), Steve Ditko (1927-2018), et surtout Dick Ayers (1924-2014). Ditko réalise les dessins du dernier numéro, toujours avec Ayers à l'encrage ; notons ici l'absence de crédits pour la mise en couleur.

Une base militaire en plein désert, isolée et éloignée de tout. À quelques kilomètres de là a été érigée la rampe de lancement d'une bombe à neutrons. Dans un bunker, une équipe de scientifiques attend nerveusement l'essai de la bombe qu'ils ont conçue. Parmi eux, le docteur Robert Bruce Banner, chef du projet, et son assistant, Igor Drenkov. Ce dernier émet des réserves au sujet de l'arme, qu'il juge trop dangereuse. De plus, il reproche à Banner de ne pas avoir confié le secret des rayons gamma au reste de l'équipe. Mais le responsable l'interrompt, car le général Thaddeus Ross vient d'entrer dans la pièce, furieux du retard qu'a subi le lancement. Ses hommes et lui sont ici des puis des semaines ; Banner va-t-il enfin se décider à procéder à son essai ? Le scientifique invoque la sécurité, les précautions qu'il a fallu prendre, et les enjeux. L'officier ne se soucie guère de tout cela et met en doute le courage du docteur. Sa fille Betty intervient en faveur de Banner. Le père de celle-ci calmé, Banner se retire pour préparer le compte à rebours. Drenkov en profite et insiste à nouveau pour obtenir des informations sur les rayons. Banner lui répond que les formules sont sous clé, et qu'elles le resteront...

Après "Fantastic Four", "Incredible Hulk" est la seconde série Marvel. Lee en assure l'écriture, pas pour le meilleur, hélas. Les influences sont connues : "L'Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde "(1886) ou "Frankenstein" (1818), mais la caractérisation du personnage semble compliquée. Néanmoins, il se dégage quelque chose des trois premiers chapitres du numéro un. Banner est un homme qui doit subir le poids de son destin, qui est condamné à la solitude, à l'exception de son encombrant acolyte, et qui a été trahi à de multiples reprises : par la chance, par son assistant, et par la société des hommes, incapable de l'accepter sous la forme de son alter ego, que les armées poursuivent sans relâche. Les sentiments partagés entre le héros et Betty Ross apportent une touche de romance et une énième variation sur le thème de "La Belle et la Bête". Ces épisodes sont mus par un leitmotiv classique : Banner doit s'isoler pour provoquer tout danger. La suite est fort peu inspirée ; des hommes-crapauds de l'espace, des artistes de cirque qui hypnotisent leurs spectateurs pour les dépouiller, un tyran exilé dans les profondeurs de la Terre, un Maître du métal venu d'ailleurs, et des récits propagandistes dans lesquels Hulk affronte les Soviétiques ou la Chine communiste, 1962 étant l'année de la crise des missiles de Cuba, entre autres. Le lecteur retrouvera là des idées qui seront exploitées cinquante ans plus tard, notamment dans "Planet Hulk" et "World War Hulk". Hulk, après un passage chez les Vengeurs, reprendra les premiers rôles à partir du "Tales to Astonish" #59 de septembre 1964. Concernant la partie graphique, il est évident que ce n'est pas ici que les deux artistes ont produit leurs plus belles planches, mais il y a des vignettes inspirées. Kirby présente un trait parfois terriblement expressionniste, mais des arrière-plans franchement rudimentaires. Ditko emploie un découpage et une densité de cases variés. Son style, déjà fini, se traduit par une réelle diversité de physionomies. Le déroulement de l'action est limpide d'un côté comme de l'autre.

La traduction et le texte de Sophie Viévard sont tout à fait satisfaisants ; chez les éditeurs français, c'est rare. Côté maquette, Panini Comics a choisi de regrouper les couvertures originales en fin du recueil, plutôt que de les insérer entre les épisodes.

Les débuts de Hulk dans ces récits médiocres furent poussifs. Néanmoins, Lee et Marvel continuèrent de croire en ce géant d'émeraude et finirent par réussir à l'ancrer durablement dans leur univers, et à le métamorphoser en une des icônes de l'écurie.

Mon verdict : ★★☆☆☆

Barbuz

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