lundi 16 mars 2020

"Batman, la légende" : Jim Aparo (tome 2/2) (Urban Comics ; août 2014)

Cet album est le dernier des deux volumes consacrés aux numéros de la série "The Brave and the Bold" illustrés par James Aparo. Ce lourd et épais recueil d'approximativement cinq cent vingt planches (plus quatre ou cinq pages de bonus) a été publié dans la collection DC Archives d'Urban Comics en août 2014 ; il compile les "The Brave and the Bold" #123 à 136, 138 à 145, et 147 à 151, couvrant la période de décembre 1975 à juin 1975. L'éditeur a ajouté deux récits complets extraits de "Detective Comics", signés Aparo aussi : du nº437 (novembre 1973) et du 438 (janvier 1974). 
Les "Detective Comics" (les deux premières histoires de l'album) sont scénarisés par Archie Goodwin (1937-1998), les "Brave and the Bold" par Bob Haney (1926-2004). Aparo (1932-2005) réalise les illustrations. Il est aidé par l'encreur John Calnan (1932-2016) dans le #126 (avril 1976) et par le dessinateur Joe Staton dans le #148 (mars 1979). Côté mise en couleur, retenons Carl Gafford et Jerry Serpe (1919-2008). Tous les crédits ne sont pas indiqués. 

Une chaude nuit d'août à Gotham CityLe vent charrie un banc de nuages noirs qui voilent la clarté lunaire. Le Musée de Gotham organise un vernissage dans le cadre d'une exposition intitulée "L'Art chez les Xochipèques". Tandis que les invités descendent de leurs limousines, et sont accueillis à l'entrée, quatre hommes cagoulés, vêtus de combinaisons, et équipés d'une ceinture d'outils à la taille et de rouleaux de corde, se hissent sur le toit de l’établissement. L'un d'entre eux s'avance vers une verrière illuminée pour voir ce qui se passe en bas. D'un bref coup de sifflet, il intime à ses acolytes de le rejoindre afin qu'ils puissent observer, de leur place, Marcus Wingate, le directeur du musée, qui contemple le masque de Matuchima, le dieu de la mort des Xochipèques. Ce moment est de très courte durée, car Batman intervient et neutralise trois d'entre eux, en autant de coups et en une poignée de secondes. Mais il n'a pas aperçu le quatrième, qui s'est caché...  

La particularité de ce recueil est d'ouvrir sur deux "Detective Comics". Les intrigues sont plus sombres et Batman y officie en solo ; des épisodes très réussis, surtout le premier. Puis suivent vingt-sept numéros des "The Brave and the Bold" de Haney et Aparo, dans des scénarios issus du même moule que dans le premier volet : Batman enquête sur une affaire qu'il ne peut élucider qu'avec le concours - voulu ou non - d'un autre personnage de DC Comics. Le postulat est que le Chevalier noir, malgré sa science de détective et ses ressources matérielles, a besoin d'aide pour confondre les malfaiteurs et les mettre hors d'état de nuire. Ainsi vont se succéder, en plus des membres fondateurs de la Ligue de Justice, Metamorpho, Wildcat, Mr. Miracle, Green Arrow, Atom, Richard Dragon, Deadman, les Metal Men, Hawkman, Black Canary, le Creeper, le Phantom Stranger, Supergirl, les Jeunes Titans, et enfin Plastic Man, certains ayant d'ailleurs droit à plusieurs apparitions. Comme dans le premier tome, Bruce Wayne s'affiche rarement, à part quelques exceptions ; Batman ne quitte presque jamais son costume. Ces intrigues très compressées se jouent en un numéro la plupart du temps ; le scénariste se concentre sur l'essentiel, et doit condenser les événements sous peine de dépasser le cadre imposé, celui d'une petite vingtaine de planches. Ces récits abordent des thèmes tels que l'immigration clandestine, la guerre froide, le terrorisme, le crime organisé, le trafic de stupéfiants, entre quelques interludes fantastiques surprenants. Le lecteur sera étonné de voir le détective prendre les transports en commun, ou se balader en ville en costume comme n'importe qui. Haney déborde d'imagination, mais la qualité moyenne des aventures est inférieure à celle du premier tome ; à cause de la compression de la narration, l'écriture n'est pas toujours soignée. Mon choix : les 127 (Wildcat), 132 (Richard Dragon), 133 (Deadman), 134 (Green Lantern), 138 (Mr. Miracle), 139 (Hawkman), 145 (Phantom Stranger). La partie graphique met en évidence un Batman à la silhouette longiligne, féline, musclée, le parant d'une aura de classicisme intemporel. À l'exception de Wonder Woman, les personnages dessinés par Aparo sont un pur régal pour les yeux.
Changement de traducteur : Jean-Marc Lainé succède à Martin Winckler. Le travail est plutôt satisfaisant, même si son texte est victime de quelques fautes (confusion multiple entre le futur simple et le conditionnel), et d'une coquille. C'est dommage. 

Bien que ce recueil renferme quelques petits joyaux, il demeure moins intéressant que le premier. La logique aurait voulu qu'il y en ait (au moins) un troisième, Aparo ayant œuvré sur trente-deux autres récits jusqu'au nº200, l'arrêt provisoire du titre. 

Mon verdict : ★★★☆☆

Barbüz

3 commentaires:

  1. Je suis allé relire notre échange pour le tome précédent, où tu écrivais : Dans mes souvenirs, le second tome m'avait moins plu que le premier. Ton souvenir était bon. :)

    Je note que tu n'as pas retenu l'épisode 124 dans ta sélection.

    Ces récits abordent des thèmes tels que l'immigration clandestine, la guerre froide, le terrorisme, le crime organisé, le trafic de stupéfiants, entre quelques interludes fantastiques surprenants. - Je n'avais pas pensé à regarder ces histoires sous cet angle. En lisant cette énumération, je me dis que le scénariste piochait dans les thèmes très ordinaires pour des aventures, avec déjà la présence du terrorisme dans ces années-là.

    Le lecteur sera étonné de voir le détective prendre les transports en commun. Pareil pour moi, une image d'une autre époque. :)

    Batman à la silhouette longiligne, féline, musclée, le parant d'une aura de classicisme intemporel : j'ai également été séduit par cette silhouette, et par cette représentation qui n'a pas vieillie, sauf parfois pour les couleurs un peu vives.

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    1. Non, je n'ai pas retenu le #124 ; je ne suis pas amateur de ce type d'exercice. Pourtant, il est plutôt réussi, parce que les auteurs, bien qu'en se mettant en scène, parviennent à garder suffisamment d'équilibre pour laisser la vedette à Batman et au sergent Rock. Mais pour moi, ici, le personnage principal est partiellement privé de son influence sur les événements de l'histoire, dont la tournure dépend beaucoup des actions de protagonistes jusqu'alors invisibles : les auteurs. Tu vois ce que je veux dire ? Ou mes propos sont trop vagues ? Je dirais que ça ajoute à la légèreté d'épisodes déjà moins sombres que les "Detective Comics".

      Concernant les thèmes, la présence du terrorisme m'a également interpellé. Je pense que Haney a été chercher son influence dans les James Bond. Sauf erreur de ma part, à l'époque, le terrorisme est surtout une réalité en Europe ou au Proche-Orient, pas aux États-Unis.
      En revanche, Haney se lâche dans le #144, avec une remontée dans le temps, qui voit Batman et Green Arrow jouer un rôle dans la bataille d'Azincourt. Les traîtres ☺ !

      Pour moi, le Batman d'Aparo est l'un des plus beaux. J'en aime énormément, mais si je ne devais garder que quelques "versions" de Batman dans ma mémoire, celui-là en ferait partie, c'est sûr, aux côtés de ceux de Neal Adams, David Mazzucchelli, ou Bernie Wrightson.

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    2. Le personnage principal est partiellement privé de son influence sur les événements de l'histoire. - Effectivement, je ne lirais pas que des histoires de ce type, mais ça m'a surpris de découvrir ce type de mise en abîme dans un comics de cet époque. Cela fait apparaître au grand jour le recul dont dispose Haney sur l'exercice d'écrire des personnages, sur sa réflexion sur ce qu'est une histoire.

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