"Gotham Central" est une série consacrée aux forces de police du commissariat central de Gotham City. Publiée dans la collection "DC Classiques" d'Urban Comics, elle compte quatre tomes publiés entre avril 2014 et juillet 2015. Le second volume est un album cartonné de deux cent soixante-quinze planches approximativement (bonus non inclus) qui compile les "Gotham Central" #11 à 22 (novembre 2004 à octobre 2004). C'est une année de publication.
Les scénarios sont répartis entre Ed Brubaker (#11, #16, #19-22) et Greg Rucka (#17-18). Ils signent les #12-15 ensemble. Brian Hurtt dessine le #11, Michael Lark, dont le travail est encré par Stefano Gaudiano, les #12-15 et les #19-22, et Greg Scott, les #16-18. Lee Loughridge, pour finir, a composé la mise en couleur.
À l'issue du tome précédent, Batman tire l'inspectrice Renée Montoya des griffes de Double-Face. Montoya décide alors de révéler son homosexualité à ses parents. Cela se déroule très mal, hélas.
Gotham City, un 7 octobre. Le crépuscule couronne les imposantes bâtisses grisâtres de la ville d'un voile carmin. Le commissariat central est entièrement vide, à l'exception de Staty, qui est seule, installée à son bureau. Elle y écrit une lettre à Meg, son amie, pour lui raconter son travail, comme elle le lui a demandé ; elle commence par insister sur le fait que sa confidente devra garder le secret qu'elle est sur le point de révéler, et elle souligne qu'elle ne plaisante pas. Stacy avoue que son étrange métier empiète peu à peu sur le reste de sa vie. Un moment distraite, elle se lève pour regarder par une fenêtre : le Bat-Signal flotte dans le ciel rouge. S'inquiétant de ce qu'il se passe, elle grimpe les escaliers et se rue vers le toit du bâtiment. Lorsqu'elle ouvre la porte, elle voit Batman, qui semble l'attendre. Intimidée, elle lui demande où sont allés les autres. Batman la rassure : il les a renvoyés afin qu'ils puissent être seuls. Ils échangent alors un baiser passionné...
Cet épais volume se scinde entre une histoire courte, "Rêveries et tristes réalités" ("Daydreams and Believers" en VO), et trois arcs de trois ou quatre numéros chacun : "Cibles mouvantes" (en VO : "Soft Targets"), "La vie est pleine de déceptions" ("Life Is Full of Disappointments"), et "Irrésolu" ("Unresolved"). Décalée, la première partie est écrite à la façon d'une lettre que Stacy (la préposée au Bat-Signal) adresse à son amie, dans laquelle elle livre un portrait - naïf - des policiers du commissariat. Ce récit s'inscrit dans le registre de la romance, du fantasme, et montre l'emprise que Gotham City a sur ses habitants. Si le premier tome mettait l'accent sur des aspects personnels de la vie des policiers, dans les histoires suivantes, c'est le métier d'investigateur qui est privilégié, par la représentation naturaliste du quotidien d'un flic : perquisitions, arrestations, interrogatoires, dossiers exhumés des archives, pièces à conviction, vétérans hantés par des affaires qu'ils ont échoué à résoudre, etc. Bien que les enquêtes priment sur le reste, Brubaker et Rucka creusent quelques thèmes connexes : les ambitions de chacun, les relations troubles avec des mafieux autant qu'avec des justiciers masqués, ou l'omniprésente pression médiatique. Et puis, il y a la faune de Gotham City, ce maire corrompu, dont la campagne a été financée de façon opaque ; ce capitaine d'industrie pas clair, qui se résigne à blanchir l'argent d'investisseurs peu recommandables, afin de sortir son entreprise du rouge ; ou cette dame d'allure ordinaire qui met le doigt dans l'engrenage d'une alliance avec un super-criminel par désir de vengeance. Les quelques invraisemblances ne viennent pas abîmer la charpente de ces histoires aux dialogues travaillés ; les scénaristes réussissent à faire preuve de créativité malgré un cadre restrictif du fait de son réalisme, en témoigne le plan terriblement machiavélique du Joker. Lark et Scott évoluent dans un registre réaliste qui convient à l'atmosphère de cette série. Néanmoins, il est regrettable que les physionomies manquent de diversité ; cela, combiné à une pléthore de figurants, rendra leur identification difficile. Loughridge compose une mise en couleur variée, qui se rapproche de la trichromie, mais peu contrastée, et terne.
La traduction d'Alex Nikolavitch est satisfaisante - bien que son texte soit victime d'une faute d'accord et d'une d'orthographe. On retrouve ce très utile trombinoscope qui était proposé dans le premier numéro. Il s'était révélé très précieux à la lecture.
Le premier volume avait été une véritable réussite. Bien qu'en deçà, le deuxième présente des arcs passionnants, qui mettent en scène des super-criminels majeurs du Bat-Univers et qui évoquent le quotidien et le métier de flic sous l'angle naturaliste.
Mon verdict : ★★★★☆
Pour une fois, l'édition VO était plus complète puisque le trombinoscope fort utile s'y trouve bien.
RépondreSupprimerDu coup, ces histoires avaient bien fonctionné pour moi : intrigues variées, en introduisant un point de vue inattendu (celui de Stacy), en proposant une vague de crimes spectaculaires (le tireur d'élite abattant froidement des individus), ou ordinaires (la jeune femme morte), ou en allant piocher dans les affaires classées. À chaque fois le moteur de l'enquête (Qui a fait le coup ? Quel est le motif ?) introduit un suspense, une tension narrative qui tient en haleine. Les résolutions ne sont pas manichéennes et la composante feuilletonnesque (l'évolution de la situation de chaque policier d'une histoire à l'autre) lie les enquêtes entre elles, tout en générant de l'empathie pour ces policiers.
De tous ces épisodes que j'avais lus à l'époque de Panini Comics, je me souvenais de celui avec Stacy, de l'arc avec le Joker, et de l'entreprise renflouée par des capitaux mafieux (curieux quand même que la bonbonnière soit restée sur le bureau). Je ne sais plus si Panini Comics avait publié l'arc avec le Chapelier fou, ou alors il m'avait moins marqué.
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