vendredi 2 octobre 2020

Wonder Woman (tome 5) : "Chair de ma chair" (Urban Comics ; mai 2015)

Sorti dans la collection "DC Renaissance" d'Urban Comics le 22 mai 2015, "Chair de ma chair" est un recueil au format 17,5 × 26,5 cm et à la couverture cartonnée. Il compte approximativement cent trente planches - sans inclure une bonne vingtaine de pages bonus (recherches de couvertures, découpages, crayonnés). C'est le cinquième des six tomes de la "Wonder Woman" des "New 52" - la "Renaissance DC" -, une initiative de DC Comics visant à rafraîchir son univers. Il contient les versions françaises des numéros 24 (décembre 2013) à 29 (mai 2014) de la série "Wonder Woman"
Brian Azzarello ("Lex Luthor""Joker") écrit le scénario. Les illustrations des 24-26 sont de Goran Sudžuka. Sudžuka cosigne le 28 avec Cliff Chiang, qui dessine les 27 et 29. Lorsque Sudžuka ou Chiang ne réalisent pas l'encrage de leur travail, la tâche échoit à José Marzan, Jr. ; enfin, Matt Wilson compose la mise en couleur. 

À l'issue du tome précédent, Arès se sacrifie pour que Wonder Woman puisse empaler le Premier-Né ; tandis qu'Apollon amène ce dernier sur l'Olympe, Diana devient, de fait, déesse de la Guerre. 
L'Olympe : enchaîné, le Premier-Né est à genoux face au trône d'Apollon, qui s'est imposé comme nouveau roi des dieux depuis la disparition de Zeus. Tout autour de l'estrade royale, tel un anneau, une plateforme circulaire, sur laquelle siègent ou se tiennent les autres déités : Artémis, Poséidon, Hermès, Dionysos, Déméter, Aphrodite, et Héphaïstos. Le Premier-Né s'étonne que l'endroit ne ressemble pas à celui de ses souvenirs. Apollon se gausse des propos de son prisonnier : vu qu'il a été enlevé quelques minutes après sa naissance, il doit s'agir d'un rêve, plutôt que d'un souvenir. Menaçant, le captif rétorque qu'il ne rêve pas. Lorsqu'Apollon lui rappelle cruellement qui l'a enchaîné là, l'autre lui crache aux pieds. Dionysos, railleur, souligne la sauvagerie de ce "chien" et ajoute qu'il faut "l'abattre". Apollon refuse. Ici, ils sont "civilisés"... 

Voilà trois tomes que la "Wonder Woman" d'Azzarello, pourtant prometteuse, tourne en rond autour d'une intrigue dans laquelle les confrontations se multiplient, mais qui n'avance pas en dépit des idées souvent intéressantes de l'auteur. Ce volet se caractérise d'abord par la relation entre le Premier-Né et Apollon et les autres dieux ; colosse bestial, indomptable et féroce, mu par une haine revancharde inextinguible, véritable force de la nature, ce Premier-Né est l'opposé de ces dieux de l'Olympe, qui représentent une élite menée par cet Apollon plein d'assurance, d'arrogance, et qui affiche sa décontraction en costume trois pièces. Le joug porté par ce Premier-Né, la séquence de la rate, et celle où le monarque de l'Olympe tente de briser l'échine de son captif pourront évoquer des images de lutte des classes et soulignent le fossé abyssal entre caste au pouvoir et ceux que l'on attache pour les "dresser", pour citer Apollon, et qui n'aspirent qu'à s'emparer de ce qu'ils estiment leur être dû en montrant une résilience peu commune. Azzarello conforte la place des femmes dans la série. Ce sont elles les protagonistes majeures, qu'il s'agisse de Wonder Woman, cela va sans dire, de Cassandra, d'Artémis, d'Éris, ou d'Héra. Le scénario, néanmoins, est émaillé de quelques faiblesses : des incohérences, avec Héra, qui disparaît de l'appartement de Londres puis y réapparaît, sans que l'on comprenne ; des invraisemblances, avec Cassandra, dont la flottille aérienne survole les Alpes sans qu'aucune nation européenne ne s'en indigne. Enfin, la narration est parfois déséquilibrée. Azzarello ne diffuse les planches du combat du Premier-Né qu'à petites doses entre les autres sous-intrigues : c'est frustrant, et agaçant. Un plus grand soin aurait dû être apporté à l'équilibre global, d'autant que la partie graphique gagne en homogénéité à la suite du départ de Tony Akins ; bien que le talent de Sudžuka n'égale pas celui de Chiang, dont le trait harmonieux demeure unique, son style en est suffisamment proche, et il produit un travail satisfaisant qui reste dans la lignée visuelle de la série. Les quadrillages sont plus ou moins identiques, mais Chiang propose des arrière-plans plus soignés, plus détaillés que ceux du Croate, qui a tendance à les optimiser. 
La traduction a été effectuée par Thomas Davier, qui est à mon avis l'un des meilleurs professionnels du circuit. Son texte ne comporte ni faute ni coquille, sauf erreur de ma part. L'éditeur a inséré un résumé utile du volet précédent en début d'album. 

Malgré quelques invraisemblances ou incohérences, ce numéro est sans doute le plus abouti et le plus divertissant depuis le premier. Il est malheureusement construit sur des effets narratifs bancals et inopportuns qui pourront agacer certains lecteurs. 

Mon verdict : ★★★☆☆ 

Barbüz
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2 commentaires:

  1. J'ai du mal à m'expliquer ce qui ne m'avait pas plu dans cette série. Tu mets en lumière quelques éléments qui me rappellent mon agacement : l'alternance des dessinateurs pas tout du même niveau, effectivement l'alternance de séquence avec un effet de morcèlement artificiel, certainement mon incapacité à m'attacher à ces personnages. Je lis donc tes commentaires avec plaisir pour voir ce qu'il en est de la suite... sans craindre d'être tenté de découvrir ces épisodes que je n'ai pas lus.

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    1. Franchement, ce dernier tome loupe la quatrième étoile de peu. Il l'aurait eue si les phases narratives avaient été plus équilibrées.
      Je suis content d'arriver au bout ; encore un tome. Je me demande toujours en quoi cette série méritait d'être portée aux nues comme beaucoup l'ont fait. Ce n'est ni mérité ni justifié.

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