dimanche 1 novembre 2020

Batwoman (tome 2) : "En immersion" (Urban Comics ; mai 2013)

Bien que numéroté "deux", "En immersion" est le troisième des cinq volumes de la série qu'Urban Comics consacre à Batwoman (il y a un tome "zéro"). Il est sorti en mai 2013 dans la collection DC Renaissance de l'éditeur. Cet ouvrage (format 17,5 × 26,5 cm) à la couverture cartonnée comprend plus ou moins cent vingt-cinq planches. Au sommaire : les versions françaises des "Batwoman" #0 et 6-11 publiés, en VO, entre janvier 2011 et septembre 2012. 
Cet album propose la fin du nº0, dont une moitié figurait dans le recueil précédent. Elle est suivie d'un arc en six chapitres : "En immersion" (en VO : "To Drown the World"). Les scénarios sont écrits par J. H. Williams III et Haden Blackman. Le nº0 est dessiné par Williams et par Amy Reeder, dont Richard Friend encre les cases ; Dave Stewart compose sa mise en couleur. Reeder signe les trois premiers numéros de l'arc, Trevor McCarthy, les trois derniers. Outre McCarthy, le Britannique Rob Hunter et l'Espagnol Pere Pérez participent à l'encrage, et enfin Guy Major est le coloriste. 

À l'issue du tome précédent, Batwoman rend une visite tardive à Felipe et Isabella Lopez. Bien qu'elle ignore si leurs enfants sont toujours vivants, elle promet de les leur ramener le cas échéant. 
Kate Kane enregistre un message d'adieu à l'attention de son père, comme à chaque patrouille ou à chaque mission. Elle le laisse sur son portable, où elle sait qu'il le trouvera si elle ne revient pas. Elle le remercie d'avoir accepté celle qu'elle est vraiment, et de l'avoir aidée à accomplir ce qu'elle devait faire. Elle s'est enregistrée jusqu'à cette nuit où Beth est tombée de l'avion. C'est là qu'elle a commencé à le détester. Aujourd'hui, elle se bat contre plus fort qu'elle ; c'est pourquoi elle reprend son habitude, mais aussi pour lui dire combien il compte pour elle. Elle se souvient de ses consignes lorsqu'il quittait la maison pour le travail : "Sois sage ! Ne fais pas de peine à ta mère, et prends soin de ta sœur..." 

Ce troisième tome débute avec la suite et fin du "Batwoman" #0, qui évoque les origines du personnage et représente sans nul doute la meilleure histoire jamais écrite pour cette héroïne : c'est tout simplement brillant. Il faudra les savourer, car le reste n'est pas du même acabit. Williams et Blackman ont de toute évidence le goût et l'inspiration, mais "En immersion" comporte de nombreuses faiblesses. Commençons par la surabondance de sous-intrigues : la collaboration entre Batwoman et le DEO ("DEUS" en français), l'enquête sur les enfants disparus et l'organisation criminelle Medusa, l'hospitalisation de Bette Kane et les confidences de son oncle, Jacob Kane, et cette romance compliquée entre Kate et le lieutenant Maggie Sawyer. À ces quatre fils conducteurs s'ajoutent les points de vue de chacun : des "cadres" de Medusa, de l'agent Cameron Chase, etc. Les lecteurs auront l'impression que les auteurs ont décidé de frapper un grand coup en intégrant un maximum de composants dans cet arc. La gestion de la narration démontre une approche maniérée qui traduit une volonté de s'éloigner de la linéarité et donc de la facilité. Certains fils se déroulent au présent, d'autres plusieurs semaines voire mois avant, l'écart entre eux finissant par diminuer jusqu'à ce qu'ils se confondent ; cela représente beaucoup de complexité pour un effet nul. Williams et Blackman ont néanmoins d'excellentes idées. Batwoman s'éclate avec le costume et les gadgets que lui a confectionnés le DEO ; d'aucuns regretteront que cet artefact la rende quasi invulnérable et lui ôte un peu de son humanité - et donc, de son charme. Ensuite, si le personnage de Gladius (adaptation subtile de la VO "Falchion") est sans intérêt, celui de Maro Ito, en revanche, réussit presque à voler la vedette à Kate Kane. Enfin, la partie graphique est relativement décevante, tant il semble évident que Reeder et McCarthy ont voulu (ou dû ?) travailler à la manière de Williams : quadrillage élaboré, doubles pages à profusion, etc. En dépit des qualités de leur style, la précision de leur crayon est inférieure à celle du "maître". Certains enchaînements de Reeder sont de plus franchement illisibles. McCarthy produit un trait plus soigné, plus fin, et plus gracieux que celui de Reeder. 
Thomas Davier signe la traduction. Elle est honnête, malgré deux fautes ("après que" n'est jamais suivi du subjonctif, et un futur à la place d'un conditionnel). Adapter "DEO" - VO - en "DEUS" ("Département des Événements ultra-spéciaux") était inutile. 

Malgré quelques moments franchement brillants, "En immersion" souffre d'une narration sophistiquée, d'un scénario mal introduit, d'un pullulement des sous-intrigues, et de cette imitation (intentionnelle ?) de la touche Williams par l'équipe artistique. 

Mon verdict : ★★★☆☆

Barbüz
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3 commentaires:

  1. J'avais également été déçu d'amblée que les épisodes ne soient pas dessinés par JH Williams III puisque c'est la seule raison pour laquelle je m'étais lancé dans cette série. Je suis allé relire mon commentaire de l'époque et je faisais des constats très similaires aux tiens.

    JH Williams III et W. Haden Black ont choisi une structure très fragmentée pour raconter leur histoire, pour un bénéfice pas très apparent pour l'intérêt du récit, ou pour le lecteur. - Pareil que ta sentence : beaucoup de complexité pour un effet nul.

    J'étais un peu moins sévère sur l'intrigue : malgré un récit qui s'inscrit dans une lutte dichotomique du bien contre le mal, ils arrivent à rendre leurs personnages intéressants, à développer une mythologie spécifique à Batwoman (en s'éloignant de la Religion du Crime), et à maintenir le suspense jusqu'au bout.

    Pour les dessins j'étais également un peu moins sévère parce que j'ai pris le parti de finalement les comparer à des pages habituelles de comics de superhéros, plutôt qu'à JH Williams III.

    i Reeder ni McCarthy n'arrivent à reproduire la différence de style entre ces 2 types de séquence, telle qu'elle existait dans le tome précédent dessiné par JHWIII. Toutefois comparé à la production moyenne des comics, les visuels et la mise en page sont plus inventifs que la moyenne. Amy Reeder durcit un peu son trait par rapport aux rondeurs qu'elle utilisait sur Madame Xanadu (en VO) et arrive à installer une ambiance bien noire, à rendre les combats vifs et brutaux. Elle sait transcrire l'horreur du moignon de The Hook alors que Batwoman lui a arraché son crochet. Par contre dans une case ridicule, elle n'arrive pas à placer correctement la queue de Killer Croc (par-dessus son pantalon). De son côté, McCarthy utilise des formes moins rondes pour une dureté plus apparente. Il a une meilleure gestion des arrières plans que Reeder, avec une présence plus régulière, et un rendu plus adulte dans les détails. Son Killer Croc est massif, monstrueux et dérangeant (tous ces yeux !). Guy Major réalise un travail satisfaisant, sauf pour la couleur du visage de Kate Kane qui devient blanc dans les derniers épisodes lorsqu'elle est en civil, comme si elle était albinos (ce qui rend caduc le principe de protection de son identité par un masque).

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    1. À l'époque, "En immersion" était le tome auquel je m'étais arrêté. Autant le numéro #0 m'avait marqué par le côté sauvage de sa violence, autant je n'avais absolument aucun souvenir de l'arc principal. C'est dire ! Je suis plus indulgent à la suite de cette relecture, ce qui est rare, mais pas enthousiaste pour autant. Je vais néanmoins lire la suite.

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    2. En plus JH Williams III recommence à dessiner des épisodes dans le tome suivant... :)

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