Le quatrième album de l'intégrale que Panini Comics France consacre au personnage de Thor contient les versions françaises des "Journey into Mystery" #101 à 111 de février à décembre 1964. Sorti en octobre 2013, ce recueil 17,7 × 26,7 cm avec couverture cartonnée et jaquette amovible compte deux cent trente pages.
Stan Lee (1922-2018) écrit les scénarios de tous les numéros et Jack Kirby (1917-1994) en illustre la totalité. Les encreurs sont - sous son pseudo de George Bell - George Roussos (1915-2000), Paul Reinman (1910-1988), ou encore Don Heck (1929-1995), mais surtout Chic Stone (1923-2000) et Vince Colletta (1923-1991). Le premier travaille sur la majeure partie des récits principaux et le second sur les histoires de complément : les "Tales of Asgard".
À l'issue du tome précédent, le torchon brûle entre Odin et son fils au sujet de Jane Foster, qui est jugée indigne par le père du dieu du Tonnerre. Celui-ci, pourtant, choisit de rester optimiste.
New York, en pleine journée. Thor arpente le trottoir d'un air décidé. Perdu dans ses pensées, il ne réalise pas qu'il endommage un lampadaire et écrase une poubelle au passage. Des badauds captivés suivent la scène avec le plus grand intérêt, tandis qu'un agent de police s'efforce d'empêcher les curieux d'approcher trop près. Le dieu du Tonnerre n'a qu'une idée à l'esprit, il doit voir Odin. Il constate alors qu'il est au centre de toutes les attentions ; sur une volte-face, il ordonne aux passants de s'écarter - afin qu'il puisse respirer. Agacé, il les insulte de "singes bavards" et exprime sa lassitude devant leur attitude et leurs "vies chétives". Sur ces paroles, il s'éloigne, sans remarquer une colonne de fourmis, au sol ; ces dernières communiquent avec le docteur Henry Pym, alias Ant-Man, alias Giant Man. Celui-ci explique alors à la Guêpe, son épouse, que Thor semble enragé ; il pourrait blesser quelqu'un. Le Vengeur appelle Iron Man afin d'obtenir du renfort...
Le tandem Lee-Kirby reprend la main sur une série qui était passée d'une équipe artistique à l'autre et qui n'en avait plus vraiment d'attitrée. Si la teneur des intrigues ne présente pas d'évolution majeure depuis 1963, les créations du duo se multiplient : l'Enchanteresse, l'Exécuteur, Sif, et Hela pour les Asgardiens ; la Gargouille grise pour les super-vilains. En revanche, les auteurs réutilisent Artur Zarrko, ainsi que - dans deux arcs - Cobra et Mister Hyde, tous antagonistes des premiers numéros ; ils font appel aux Vengeurs, au docteur Strange, et aux X-Men 1.0 dans un souci de promotion des différentes franchises entre elles - technique employée par Marvel dans d'autres titres. Loki reste bien entendu l'ennemi récurrent. C'est simple, le dieu de la Discorde et de la Malice est dans tous les mauvais coups. Lee et Kirby conservent le même procédé : Loki est à l'origine de tous les maux infligés à Thor, mais les confrontations physiques entre les deux frères sont limitées au strict minimum, il n'y en a d'ailleurs qu'une seule dans ces pages. Surtout, Loki tente incessamment de discréditer Thor aux yeux d'Odin, voire de comploter pour prendre la place de ce dernier. Mais cela ne suffit pas à Lee, qui réserve à Thor le sort de plusieurs héros de la maison, une accumulation d'inextricables difficultés. D'un côté, une romance qui fleurit péniblement comme toujours chez Marvel ; la volonté de sauvegarder sa double identité oblige parfois le docteur Blake à encourir le mépris de sa dulcinée. De l'autre, une relation tumultueuse avec son père, justement au sujet de Jane Foster. Pour le reste, ces aventures se ressemblent et certaines situations resteront sans suite (cf. les pouvoirs diminués de moitié) ; quant aux "Tales of Asgard", ils sont aussi brefs qu'accrocheurs ! La partie graphique n'a rien de phénoménal, tant certaines vignettes brillent par le manque de fini et d'autres par l'absence de décor ou d'arrière-plan. La qualité de l'encrage y est probablement pour quelque chose. Cela étant, il y a des compositions étonnantes, telles que la pieuvre géante de Zarrko, les contorsions de Cobra dans la machine, ou la salle d'opération. Ces histoires, enfin, souffrent d'une couleur fadasse ; trop moderne, la restauration dénote avec le style "pop" du "King".
La traduction est partagée entre Geneviève Coulomb et Edmond Tourriol, du studio MAKMA. En vrac : une lourdeur par-ci par-là, deux coquilles, une faute de mode et des incohérences tutoiement-vouvoiement (dans les dialogues entre Blake et Foster).
Malgré les défauts habituels donc sans surprise, ces numéros restent plutôt plaisants à lire dans l'ensemble, surtout grâce aux "Tales of Asgard". Il est toutefois évident que Lee et Kirby n'ont pas encore trouvé l'angle adéquat pour faire décoller la série.
Mon verdict : ★★★☆☆
Barbüz
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Des épisodes que je n'ai vraisemblablement pas lus.
RépondreSupprimerJ'ai souvent entendu parler des Tales of Asgard comme étant Jack Kirby seul aux manettes et s'éclatant à insuffler sa personnalité dans ces dieux plus grands que nature.
La volonté de sauvegarder sa double identité : j'ai l'impression que c'est un ressort narratif qui a quasiment disparu des comics de ces dernières années, comme si c'était une composante trop enfantine... ou alors je ne lis plus de comics avec ce genre d'intrigue.
Très bonne remarque ! Je n'y avais pas pensé, et je pense bien que tu dis vrai : car maintenant que tu en parles, moi aussi, j'ai l'impression que ce ressort narratif a disparu des comics. Peut-être parce que c'est enfantin, oui, mais peut-être aussi parce que la corde est usée à force d'avoir était tirée, je n'en sais rien.
SupprimerLa corde est usée : c'était une convention généralisée dans les comics de superhéros dans les années 1960 et 1970. D'un autre côté, il y a d'autres conventions tout aussi surutilisées.
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