Publié en janvier 2007, chez Panini Comics France, dans la collection "100% Marvel" de l'éditeur, "Enfer et damnation" (en version originale, "The Road to Damnation") est le deuxième d'une série de sept recueils, qui couvre les quatrième et cinquième volumes de la franchise "Ghost Rider", et inclut quelques épisodes du sixième ainsi que la minisérie "Ghost Rider: Trail of Tears". "Enfer et damnation" est un ouvrage broché format 26,0 × 17,3 centimètres ; ce tome comprend les versions françaises des six numéros du cinquième volume, les "Ghost Rider" #1-6 (novembre 2005 à avril 2006). Il compte approximativement cent quarante planches en couleurs, avec, en bonus, les couvertures de la version originale.
Le scénario de cette mini-série est écrit par l'Américano-Britannique Garth Ennis ("Punisher", "Preacher", "The Boys", "Hellblazer" entre autres) dans son intégralité. La partie graphique a été entièrement réalisée par l'Américain Clayton Crain ("Rai", "X-Force", "Carnage", etc.), les illustrations, l'encrage et la mise en couleur.
Les anges Daniel et Malachie se retrouvent au-dessus de New York ; ils s'installent sur la gargouille d'un gratte-ciel qui surplombe la ville. Malachie est agacé, pourquoi son aîné lui a-t-il donné rendez-vous au milieu de ces "stupides mortels" ? Mais pour Daniel, aussi "stupides" que soient ces "mortels", il leur arrive de voir juste. Malachie, néanmoins, aurait apprécié que son frère choisisse un endroit plus discret, surtout étant donné sa situation. Daniel le rassure : seuls les êtres sensibles les voient, soit un sur quatre ou cinq millions. Ils abordent alors le vif du sujet : Kazann. Ce dernier est sur Terre. Malachie comprend-il ce que cela implique ? Les problèmes que sa présence peut engendrer ? Sans compter les ravages sur le plan physique ? Daniel informe son frère que des chasseurs sont à ses trousses au Texas : Hoss et Ruth. Malachie aurait dû abandonner, qu'il s'estime chanceux que Daniel lui parle. Mais Malachie rétorque qu'il a beaucoup œuvré pour leur peuple...
Rééditée à deux reprises, et dans des collections différentes ("Marvel Dark", et "Marvel Comics : La Collection de référence", chez Hachette), "Enfer et damnation" est peut-être l'un des récits les plus aboutis de la franchise "Ghost Rider" ; Marvel a eu l'excellente idée de confier une minisérie à Ennis, auteur phare capable de marquer n'importe quel titre d'une empreinte durable si son éditeur lui en laisse le loisir. "Enfer et damnation" débute comme une histoire d'incantation dans laquelle un démon de l'enfer désire se matérialiser sur Terre : jusque-là, rien de novateur, mais lorsqu'Ennis associe cette trame à sa créativité et la trempe dans son cocktail de violence, d'humour noir et d'outrance, son intrigue prend une tout autre dimension. Point d'ésotérisme bon marché ou racoleur ici, mais des anges et des démons qui complotent pour servir leurs ambitions, des manœuvres et alliances contre-nature et des exécutants exploités et manipulés par les grands des deux mondes, comme pour rappeler que géhenne et Éden ont eux aussi leurs classes laborieuses. Le Ghost Rider d'Ennis est avant tout un démon, maudit parmi les maudits dont la punition est une version extrême du mythe de Sisyphe. Son enveloppe humaine est secondaire, Johnny Blaze n'apparaissant que trois fois, et en caméo. Il résulte de tout cela un récit original, spectaculaire, avec un véritable enjeu, rythmé, bien construit et dans lequel - Ennis oblige - l'enfer est dépeint comme plus jubilatoire qu'un paradis trop rigide, voire inhumain (conf. la glaciale - frigide ? - Ruth, en castratrice "corporate"). Ennis en profite pour tordre le cou aux patrons voyous, incarnations d'un capitalisme sauvage, irraisonné et ultralibéral. Il nous rappelle encore que son sens de l'humour assez particulier est souvent placé sous la ceinture (la scène du tentacule de Hoss).
Crain compose des planches impressionnantes aussi réalistes qu'expressives, ce qui peut s'avérer une gageure. Son sens du détail force l'admiration : dentitions, rayons des roues des motos, caractères gravés sur les armures des anges, chaise de Gustav, nuées de démons... Mais la peinture numérique exhale un rendu froid, et le travail de Crain ne fait pas exception. De plus il opte parfois pour une atmosphère sombre qui rend certaines cases à peine déchiffrables, car le contraste fait défaut.
Laurence Belingard signe la traduction. En vrac : faux-sens, fautes de pronom, de concordance des temps, de conjugaison, de ponctuation, forme négative malmenée, etc. Belingard n'a pas adapté "Malachi" en "Malachie" (version française du prénom).
Action, humour, hordes infernales, intrigue plus tordue qu'il n'y paraît à première vue... Les amateurs se demanderont pourquoi Marvel n'a pas offert un projet de série "Ghost Rider" MAX à Ennis : cela aurait permis à la franchise de se redorer le blason.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbüz
"Enfer et damnation" est peut-être l'un des récits les plus aboutis de la franchise "Ghost Rider" : aaarghhh... Je ne l'ai pas lu et Marvel de donne aucun signe de rééditer un jour cette histoire. Ton article ne m'est que plus précieux.
RépondreSupprimerLa peinture numérique exhale un rendu froid : pour celle de Clayton Crain, je partage entièrement ton avis sur ce point (et sur les autres).
Eh ben : la traduction semble être de qualité vraiment médiocre.
Oui, c'est un bon ouvrage, malgré ses défauts, et malgré le trop peu de Johnny Blaze à mon goût ! Quel contraste avec le premier tome !
SupprimerLa traduction est une véritable honte. Aujourd'hui encore, la fidélité de Panini Comics envers certaines traductrices reste pour moi un mystère total. Et pourtant, il m'est à chaque lecture toujours plus évident que ce travail hâtif et sans soin ni passion a été extrêmement dommageable au genre en France.