Paru chez Urban Comics en février 2017 dans la collection "DC Renaissance", "Le Retour de Robin" est le septième et dernier volet du "Batman & Robin" de la "Renaissance DC" ("The New 52"), initiative éditoriale entreprise par DC Comics et lancée en 2011 dans l'objectif de moderniser son univers. Cet ouvrage relié - format 17,5 × 26,5 centimètres et à couverture cartonnée - compte deux cent dix planches couvertures incluses (sans les quelques bonus). Il comprend les versions françaises des #35 à 40 de "Batman and Robin" (décembre 2014 à mai 2015), du "Robin Rises: Alpha" (février 2015), du "Batman and Robin Annual" - volume 2 - #3, datant de juin 2015), et, enfin, du "Secret Origins" #4 (septembre 2014).
Peter Tomasi écrit tous les scénarios. Patrick Gleason dessine tous les "Batman and Robin" ; son travail est encré par Mick Gray et mis en couleur par John Kalisz. Le dessin du "Robin Rises" est à nouveau confié à Andy Kubert ; il réalise son propre encrage avec l'aide de Jonathan Glapion. Brad Anderson en compose la mise en couleur. L'annuel est illustré par Juan José Ryp, connu pour son boulot chez Valiant. Pour son encrage, l'Andalou choisit de se faire assister par deux de ses compatriotes, Jordi Tarragona et Juan Albarran ; l'Américaine Sonia Oback a composé la mise en couleur de ce numéro. Ian Bertram dessine le "Secret Origins" ; il encre son propre travail et Dave Stewart en façonne la mise en couleur.
À l'issue du tome précédent, Batman - avec, contre toute attente, la complicité de Lex Luthor... - réussit à s'emparer de l'armure Hellbat. Après quoi il ouvre un tunnel Boum. Direction Apokolips.
Batman survole Apokolips ; il ordonne à Hellbat d'activer son camouflage. En bas, des paradémons poussent des esclaves dans des fosses bouillonnantes rouges comme le sang afin d'alimenter la ville maudite en énergie ; attachés à la même chaîne, les pauvres chutent, sans un cri. Quelques paradémons sont alors neutralisés...
Batman à Apokolips, la promesse d'un spectacle extraordinaire, que Tomasi et Gleason tiennent avec brio. Sérieusement équipé, le père est prêt à tout pour récupérer la dépouille de son fils, dans le fol espoir de le ressusciter. Batman devient un véritable bulldozer que rien ne stoppe, pas même la quasi-certitude de ne pas survivre à sa mission-suicide. Bien qu'aucun justicier ne se prépare aussi bien et qu'il ait toujours un coup d'avance, le lecteur ne pourra retenir une forme d'admiration envers un personnage à qui rien n'est épargné, mais qui ose et essaie tout ; peu importe l'adversité ou la difficulté. Cette ambiance de fin du monde présente en permanence sur Apokolips est saisissante, tant elle est bien rendue. Les paradémons envoient des fournées de pauvres hères dans les fosses pour alimenter Apokolips - une pratique qui évoque invariablement celle des camps de la mort nazis, tandis que Kalibak s'amuse à détruire des astres et des planètes, quoi de plus normal pour susciter l'amour du père - Darkseid est toujours convalescent - que de continuer dans sa lignée, voire de faire "mieux". Bien que son histoire regorge d'une action tonitruante, Tomasi évite l'écueil du grosbillisme à l'aide de la qualité du texte, une des marques de fabrique du titre depuis les premiers numéros. Malgré cette atmosphère d'apocalypse qui est forcément de rigueur, l'auteur n'omet point l'humour. Encore moins l'émotion, tant les retrouvailles entre père et fils sont touchantes, comme rarement dans le genre ; l'émotion, autre caractéristique de la série. La construction de l'arc est linéaire ; grâce à un rythme soutenu et une forte dose de surprises, cela n'entrave pas le plaisir de lecture. Tomasi conclut sur une note optimiste autant sur l'amour père-fils - sans sentimentalisme, Damian étant le même - que sur l'esprit de camaraderie.
Durant ces sept tomes, le lecteur aura peut-être été étonné par l'alchimie entre Tomasi et Gleason, entre écriture et dessin, comme l'évidence que ces deux-là étaient faits pour bosser ensemble. De Gleason, retenons ces compositions aussi soignées et travaillées que dynamiques, l'expressivité des personnages, le quadrillage original, ou l'emploi des onomatopées comme élément intégral du dessin, etc. Il est secondé par un encreur et un coloriste talentueux, dont l'importance ne doit pas être sous-estimée ; le premier est maître dans l'aplat de noir, le second dans l'art du choix des teintes et l'utilisation du clair-obscur. Des jugements subjectifs, assurément, mais il n'empêche que le résultat paraîtra moins convaincant avec les autres artistes, ce qui n'enlève rien à leur indiscutable talent. Kubert a un style dynamique, moins fini et avec une expressivité exagérée. Ryp fournit un contraste très classique. Bertram œuvre dans un registre proche de ceux de Frank Quitely et Chris Burnham.
La traduction est à nouveau confiée à Alex Nikolavitch, qui est le traducteur attitré de "Batman et Robin" depuis le premier tome. Le résultat est impeccable, le texte est soigné : pas de faute, pas de coquille, aucun anglicisme malvenu. Irréprochable.
Ce dernier tome clôt en beauté une série qui fut parfois excellente (dans le premier volet), souvent moyenne, notamment à cause d'impératifs éditoriaux, mais jamais en dessous ; cinq étoiles pour les numéros signés Gleason et quatre pour l'ensemble.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbüz
Copyright © 2014 Les BD de Barbüz
Grosbillisme : un terme que je ne connaissais pas. Je ne suis pas sûr d'arriver à le recaser.
RépondreSupprimerDurant ces sept tomes, le lecteur aura peut-être été étonné par l'alchimie entre Tomasi et Gleason, entre écriture et dessin, comme l'évidence que ces deux-là étaient faits pour bosser ensemble. - Oui, je n'y avais pas pensé en ces termes : l'un comme l'autre améliore la qualité du travail de son collaborateur. Le tout est plus grand que la somme des parties.
Un encreur et un coloriste talentueux, dont l'importance ne doit pas être sous-estimée : 100% d'accord.
Pour les épisodes Tomasi & Gleason : l'intelligence du scénariste est de trouver des exemples concrets qui montrent que superpouvoirs n'est pas synonyme d'invincibilité ou d'omnipotence. La sensibilité de Tomasi est de trouver des comportements qui sont intimement liés à l'enfance (sans être enfantins). Le bonheur du lecteur est de voir Batman prévenant, tout en préservant les sentiments de son fils. Derrière les costumes chamarrés, l'attitude de Batman sévère et rigide, celle de Damian prétentieux et franc, il y a des individus qui dégagent une chaleur humaine irrésistible. Le lecteur termine ces 3 épisodes avec des visions spectaculaires plein les yeux, des moments de connivence incroyables (par exemple entre Damian et Billy Batson, ou plutôt entre Robin et Shazam), pour terminer sur une image qui emporte tout sur son passage, celle de Batman & Robin s'élançant entre es toits de Gotham, déjà mille fois vues, mais rarement porteuse d'un tel sentiment de plaisir, d'un sens retrouvé du partenariat.
Justement un exemple de commentaire composite où j'ai choisi de faire une partie par histoire pour ce tome :
https://www.amazon.fr/gp/customer-reviews/R389562G4TFBWQ/ref=cm_cr_dp_d_rvw_ttl?ie=UTF8&ASIN=B01LZV89AA
Le terme "grosbillisme" est surtout employé dans le jeu de rôle, pour désigner un personnage qui cumule les super-pouvoirs au-delà de toute vraisemblance. On n'est pas dans le même univers, mais il n'empêche : je me suis permis d'utiliser ce terme en extrapolant juste un petit peu, mais l'idée est très proche.
SupprimerJ'espère ardemment que Tomasi et Gleason referont équipe, peu importe le titre, peu importe l'éditeur. Et de préférence avec Mick Gray et John Kalisz. Pour moi, ils forment un tandem/quatuor idéal. En attentant, je salive à l'idée de découvrir leur Superman (Rebirth), dont je devrais lire le premier tome dans quelques mois, sans doute en février 2022.
Ma démarche avait été la même que la tienne : suivre le tandem Gleason & Tomasi sur Superman. On en reparle... sans doute en février 2022.
Supprimer