mercredi 9 mars 2022

Wonder Woman : "Dieux et mortels" (tome 2) (Urban Comics ; juin 2017)

Le second des deux volumes de "Dieux et mortels", une anthologie consacrée à la Wonder Woman de George Pérez, est sorti chez Urban Comics en juin 2017 dans la collection "DC Essentiels" de l'éditeur. Ce tome (format 19,0 × 28,5 cm, couverture cartonnée) compte trois cent vingt pages, avec un résumé, et vingt autres de bonus (couvertures). Il inclut les versions françaises des #15-24 (second volume ; avril à décembre 1988) de "Wonder Woman", d'un récit extrait du "Action Comics" #600 (de mai 1988), ainsi que de l'entièreté du "Wonder Woman Annual" #1, de novembre 1988. 
Pérez coécrit deux numéros avec Len Wein (1948-2017) ; il est l'auteur de la totalité des autres (annuel compris), sauf du "Action Comics", signé par John Byrne. Pérez dessine l'intégralité de la série régulière ; Byrne réalise le "Action Comics", et Pérez l'encre. Chaque histoire de l'annuel est illustrée par un artiste différent ; en plus du nom de Pérez figurent ceux de Brian Bolland et Chris Marrinan, Arthur Adams, John Bolton, José Luis García-López, Curt Swan (1920-1996) et Ross Andru (1927-1993). Bruce Patterson, Bob Smith, Dick Giordano (1932-2010), Frank McLaughlin (1935-2020), Bob McLeod, et Will Blyberg encrent la série régulière ; les dessinateurs du "Annual" encrent leurs planches, sauf Bolland et Marrinan, secondés par Blyberg et Mark Farmer. Carl Gafford est le coloriste des "Wonder Woman"Tom Ziuko du "Action Comics"

À l'issue du tome précédent, Hippolyte charge Diana de retourner dans le monde des hommes et de continuer à le découvrir. Elle commence cette mission par des retrouvailles avec les Kapatelis. 
Diana se promène à cheval. Des colombes volettent ; la nature est paisible et sereine. De sombres et étranges nuages s'amassent soudainement et des éclairs strient brusquement les cieux. Diana prend son envol pour examiner la tempête. Derrière les nuages apparaît Superman, radieux, nimbé des rayons du soleil éclatant... 

Pérez, dans le dernier tome de sa saga "Dieux et mortels", confirme largement la réussite du premier. Ces épisodes sont, avant tout, des histoires de femmes : celle de Valerie Beaudry, triste cobaye au mental instable ; celle de Circé, puissante et terrible sorcière aussi belle que vénéneuse, qui voit en Diana un obstacle majeur à tous ses projets ; celle de Mindi Mayer, publicitaire vedette dont le destin tragique donne lieu à un numéro (le #20, de septembre) inattendu par son atmosphère policière ; et puis, bien sûr, les Kapatelis mère et fille, dont la présence, les préoccupations, et la vie contribuent à humaniser la Diana de Pérez et à apporter à ces histoires une certaine légèreté. La caractérisation de Wonder Woman est d'ailleurs un tour de force en soi. Au risque de paraître naïve, lisse, Diana ne se départit jamais de son sens de la compassion, de sa bienveillance ; Pérez évite l'écueil en soulignant les qualités d'une femme forte, prête au sacrifice, donc au don de soi, qui ne renonce ni à ses principes ni à sa loyauté à l'égard de son panthéon, et ce malgré les incompréhensions que suscitent les comportements et les projets des dieux olympiens, même chez les Amazones, leurs adoratrices les plus fidèles. Enfin, l'auteur revient avec Byrne sur ce qui rapproche Wonder Woman et Superman ainsi que sur ce qui les différencie et les sépare en dépit de leurs affinités évidentes : chez l'Amazone, la proximité permanente des divinités et le sens du devoir de mener à bien leurs desseins ; chez le Kryptonien, une volonté profonde et sincère de s'humaniser, d'être au plus près de l'homme. Ici, bien qu'il y ait une ou deux invraisemblances mineures (Julia Kapatelis en commando), chaque arc est captivant, peu importe le registre dans lequel Pérez évolue : science-fiction, fantastique, énigme policière, ou combats mythologiques. Relevons aussi que le numéro annuel propose une série d'anecdotes intéressantes sous la forme d'histoires courtes : elles apportent plus de substance à Themyscira. 
Pérez est un artiste réputé pour l'élégance et la régularité du trait, et pour la minutie légendaire de ses planches ; le second tome de "Dieux et mortels" ne contredira pas cette règle. Le classicisme intemporel de son coup de crayon contraste avec la mise en page novatrice qui lui convient néanmoins à la perfection : la structuration du quadrillage, les dimensions (surtout la hauteur) des bandes, l'utilisation d'inserts, l'équilibre surprenant entre horizontalité et verticalité. Notons encore la diversité des plans, la variété des perspectives, ces enchaînements sans friction, la densité de détail très satisfaisante. Le seul réel point faible de la partie graphique, au fond, est sa palette de couleurs. Certains tons plutôt criards pourront causer des froncements de sourcils, mais cela ne suffira pas à entamer l'enthousiasme des lecteurs. 
La traduction est confiée à Jean-Marc Lainé. Son travail est généralement honorable, en dépit d'une faute de conjugaison, d'une ponctuation parfois aléatoire, de deux onomatopées non adaptées ("gulp""koff"), d'une concordance des temps douteuse. 

"Dieux et mortels" représente une saga centrale, historique, et incontournable de Wonder Woman, composée par un Pérez qui est au sommet de son art. Notre homme continuera à scénariser "Wonder Woman", sans dessiner, jusqu'au #62 (février 1992). 

Mon verdict : ★★★★★

Barbüz
Copyright © 2014 Les BD de Barbüz

3 commentaires:

  1. Ces épisodes sont, avant tout, des histoires de femmes : c'est une caractéristiques qui m'avait également frappé à la relecture.

    La caractérisation de Wonder Woman est d'ailleurs un tour de force en soi. Au risque de paraître naïve, lisse, Diana ne se départit jamais de son sens de la compassion, de sa bienveillance : entièrement d'accord, c'est d'ailleurs la version que je préfère du point de sa personnalité.

    L'équilibre surprenant entre horizontalité et verticalité : je n'avais jamais remarqué cette caractéristique des pages de Perez, mais maintenant que tu l'as écrit, ça m'apparaît comme une évidence. Un superbe développement sur les qualités de ses dessins, et de la composition de ses planches.

    https://www.babelio.com/livres/Perez-Wonder-Woman-Dieux-et-Mortels-tome-2/905115/critiques/1341668

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    1. Merci !
      Cette caractérisation est également ma préférée pour le moment. J'attends, pour me prononcer de façon définitive, de finir le "run" de Rucka et de lire sa version du "Rebirth".

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    2. Avec le recul, je comprends que c'est cette version qui a fixé l'image que j'ai de ce personnage, et que j'y reste très attaché, qu'elle reste aussi ma préférée.

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