Datant de décembre 2011, cet ouvrage est le vingt-et-unième de l'intégrale que Panini Comics France consacre à la franchise "X-Men", et le sixième à la version historique de l'équipe. Il contient les versions françaises des "X-Men" #52-66 (janvier 1969 à mars 1970 - le mois qui sonna le glas pour le titre). Cet album - de dimensions 17,7 × 26,8 cm, avec couverture cartonnée et jaquette plastifiée amovible - compte approximativement trois cent vingt planches toutes en couleurs. Pour terminer, les couvertures des quinze numéros ont été reléguées à la fin du volume, en guise de bonus (et non pas intercalées entre les chapitres, hélas).
Arnold Drake (1924-2007) écrit trois numéros avant de céder la place à Roy Thomas ; Dennis O'Neil (1939-2020) scénarise l'avant-dernier et Linda Fite un complément. Werner Roth (1921-1973), Don Heck (1929-1995), et Barry Windsor-Smith se sont réparti le dessin des premiers épisodes ; Neal Adams (1941-2022) entre ensuite en scène et réalise les illustrations de neuf d'entre eux, Sal Buscema récupérant le #66. John Tartaglione (1921-2003), Mike Esposito - il utilise un pseudo : Michael Dee - (1927-2010), Vince Colletta (1923-1991), John Verpoorten (1940-1977), et Sam Grainger (1930-1990) se sont divisé l'encrage ; mais c'est Tom Palmer (1941-2022) qui se charge des planches d'Adams. Aucun coloriste n'a son nom crédité ici : à l'époque, une pratique usuelle.
Précédemment, dans "X-Men" : les X-Men battent en retraite, mais veulent une revanche sur Magneto ! Quelques jours plus tard, un intrus pénètre dans le camp de Magneto, montre l'étendue de ses pouvoirs, lance un défi. Il se présente : Erik le Rouge.
Mesmero n'attend pas : il ordonne à ses troupes de capturer Erik le Rouge dans l'objectif évident de l'exécuter. Mais le gaillard a du répondant et ne se laisse pas malmener sans riposter : il élimine les séides du maître de l'hypnose les uns après les autres, et finit par réussir à approcher celui qui l'a condamné un peu rapidement. Lors du combat, un rayon d'énergie d'Erik endommage le plafond du repaire de la Confrérie des mauvais mutants. Son impact est plus destructeur que veut bien le croire Mesmero...
C'est donc la dernière fournée de numéros de "X-Men" ; la série a vivoté pendant huit petites années, mais le couperet de Stan Lee (1922-2018) a fini par tomber. Alors oui, il y eut d'autres apparitions de l'équipe entre 1972 et 1975, mais en tant qu'invitée dans d'autres titres ("The Avengers", "The Defenders", "The Incredible Hulk"...). Il ne s'agit pas de n'importe quel lot d'épisodes. Tout n'est pas du même niveau ; les premiers numéros de l'année engendrent l'indifférence, voire l'ennui. Mais Thomas, Adams, et Palmer signent un chapelet de numéros captivants, qui creuse un incroyable abysse qualitatif avec le niveau auquel la série était habituée jusque là. Ce trio produit huit numéros fabuleux, les #56-63, d'une étoffe proche de ce qu'écrira Chris Claremont. Comme requinqué par le travail d'Adams et Palmer, Thomas écrit là les pages les meilleures, les plus sombres de la série. En vrac : des forces sont à l'œuvre pour discréditer les mutants (le "problème mutant" revient au centre des débats), les Sentinelles sont réactivées (elles se rebiffent ! Les créations de l'homme devant assurer sa sécurité échappent à son contrôle !), c'est dans ces pages que sont créés Karl Lykos et Sauron, et pour finir, les X-Men rencontrent les mutants de la terre Sauvage (on retrouve le thème de l'expérimentation médicale, cher à la franchise). Le reste ne vaut pas qu'on en parle plus longuement. On peut encore gloser, plus de cinquante ans plus tard, sur les origines de l'échec commercial de "X-Men" : la plupart des séries Marvel de l'époque n'étaient pas toujours meilleures (sauf "Amazing Spider-Man" et "Fantastic Four"), mais ont réussi à éviter l'annulation. De plus, "X-Men" a bénéficié (trop tard) du travail de Thomas, Jim Steranko, ou Adams. Peut-être que les lecteurs, fatigués par les manifestations de 1968, ne voulaient plus en entendre parler et que la métaphore avec les mutants était trop flagrante. Oui, on peut effectivement se demander si Thomas et Adams n'avaient pas quelques années d'avance lorsqu'ils ont offert à cette série ce qu'elle a connu de meilleur. Pour terminer, notons que ce tome fut réédité en septembre 2014, avec une couverture différente.
La partie graphique reflète également le choc dû au changement d'équipe artistique. Heck et Roth se succèdent au poste d'illustrateur, sans apporter aucune impulsion au titre. Le #53 est aussi le premier numéro complet de Windsor-Smith pour Marvel. L'influence de Kirby sur cet artiste âgé de dix-neuf ans est flagrante, rien ne laisse présager l'artiste qu'il deviendra. Et puis arrive Adams. Il n'a pas encore trente ans, mais donne l'impression de totalement maîtriser son art : ce réalisme du trait, avec un rendu plus tranchant, plus dur, plus adulte que chez ses collègues, cette expressivité du désespoir, de la colère, de la haine et de la souffrance, cette mise en page cinématographique novatrice (cf. #57, planche nº12), son art du mouvement, du plan, de la perspective. Palmer est un encreur talentueux, soigneux, respectueux.
Jérôme Wicky, à mon avis l'un des professionnels les plus sérieux du milieu, signe la traduction. Une boulette s'est glissée dans son texte ; à part cela c'est impeccable.
Voilà un tome qui pourrait surprendre bien des lecteurs par l'intensité des contrastes en matière de qualité des récits et des dessins. Si les premiers épisodes sont dans le moule des volumes précédents (c'est-à-dire sans intérêt majeur), ces fabuleux numéros signés par le trio Thomas - Adams - Palmer sont vraiment à (re)découvrir.
Mon verdict : ★★★☆☆
Barbüz
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X-Men, Mutants, Ka-Zar, Magneto, Karl Lycos, Sauron, terre Sauvage, Hulk, Neal Adams, Marvel Comics, Panini Comics
Hé bien, non, je n'ai pas lu ces épisodes mythiques de Neal Adams & Roy Thomas. L'occasion ne s'en est pas présenté quand j'étais fan de continuité, puis mon appétence pour ce scénariste a diminué, et dans le même temps Neal Adams a recommencé à réaliser des comics sur lesquels je me suis jeté.
RépondreSupprimerL'influence de Kirby sur BWS : ça m'avait également sauté aux yeux.
Pour le coup, j'avais sauté sur l'occasion de lire et de relire les épisodes de la série Uncanny X-Men dessinés et un peu (ou beaucoup) scénarisés par Barry Windsor Smith quand Marvel les avait réédités en recueil.
https://www.babelio.com/livres/Windsor-Smith-X-Men-Lifedeath/696862/critiques/762183
Ce réalisme du trait, avec un rendu plus tranchant, plus dur, plus adulte que chez ses collègues, cette expressivité du désespoir, de la colère, de la haine et de la souffrance, cette mise en page cinématographique novatrice, son art du mouvement, du plan, de la perspective : c'est tout à fait ça, je retrouve exactement mes impressions dans tes propos.
Les X-Men en tant qu'invités dans d'autres titres : Marvel a édité un tome format Epic Collection reprenant ces épisodes, ainsi que ceux consacrés à Hank McCoy dans lesquels il acquiert sa fourrure. J'avais écrit un commentaire.
http://www.brucetringale.com/heros-sans-serie-fixe-x-men-epic-collection-4/
Je ne suis pas mécontent d'arriver tout doucement au dernier volume consacré aux X-Men 1.0, le 1972-1975 ; cela fait deux séries à lire au sein de la même intégrale, au fond, et je trouve que je n'avance pas assez vite à mon goût sur la mouture 2.0 de l'équipe.
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