Publié chez Pika Édition (du groupe Hachette Livre) en juin 2021, dans la collection "Pika Seinen" de l'éditeur, cet ouvrage est le deuxième volume de la version française du manga seinen "The Fable", parfois sous-titré : "The silent killer is living in this town". C'est un fascicule broché, de dimensions 13,0 × 18,0 cm, avec jaquette plastifiée amovible et colorisée. Il comprend à peu près deux cents planches (en incluant les couvertures) en noir et blanc (en nuances de gris plus précisément). Il se lit de droite à gauche. Au Japon, la série fut prépubliée de 2014 à 2019 dans "Weekly Young Magazine" (éditeur Kōdansha Ltd).
C'est Katsuhisa Minami qui a créé cette série et a entièrement réalisé ce second volume : le scénario, le dessin, et l'encrage. L'auteur, né en 1971, est encore peu connu dans nos contrées : rares sont ses œuvres qui ont été traduites en français. Outre "The Fable", Minami a aussi produit deux saisons de "Naniwa Tomoare" - une publication qui lui vaut le 41e prix Chiba Tetsuya (en 1999). Enfin, "The Fable", qui compte vingt-deux volumes en tout, a été adapté en film sous le même titre, en 2019.
Précédemment, dans "The Fable" : Fable se laisse tabasser par les deux hommes de main que Takahashi a engagés - mais il le fait en feignant la douleur et en amoindrissant les impacts. Dupés, les deux autres filent. Quant à Fable, cela l'a amusé.
Taihei, Japon. Takeshi Ebihara - le premier lieutenant du clan Maguro - est en pleine discussion téléphonique avec Takahashi, son homme à tout faire. Ebihara n'en revient pas ! Comment ?! Takahashi a osé s'en prendre aux Satō ? Mais qui lui a demandé de "faire un truc pareil" ? Il soupire et laisse son sous-fifre raconter. Takahashi lui explique qu'il a engagé un ancien champion de muay-thaï, qui a passé à tabac Akira Satō - le frère. Ebihara n'en croit pas ses oreilles ! Takahashi ajoute que Satō a même saigné du nez, et qu'il a fini par "s'excuser en chialant" ! La perplexité se lit sur le visage d'Ebihara. Takahashi précise que son sbire "n'a pas touché à la sœur". Ebihara lui accorde une pause. Ensuite, il devra retourner à son poste dès que possible...
Deuxième tome des aventures de Fable, ce tueur à gages aussi surdoué qu'asocial, envoyé au vert avec son assistante pour éviter d'être repéré. L'action débute tout de suite après la fin du premier volet. Minami consacre le tome au développement de quatre protagonistes, Fable (Akira), "Yōko", Takeshi Ebihara, et Takahashi. Ces deux derniers ont ceci de particulier qu'une poignée restreinte de figurants gravite autour d'eux : en permanence (les hommes de main) ou occasionnellement (le trafiquant d'armes). Minami explore la piste du quiproquo (Akira Satō est-il Fable ou un imposteur ?) et en fait le tour. Le lecteur est ainsi fixé. Oui, le clan Maguro a confirmation qu'il s'agit de Fable ; donc non, la série ne se développera pas autour de cette question. Mais sur Fable, rien de révélateur ; Ebihara le pousse dans ses retranchements avec des questions existentielles auxquelles il exige des réponses. Minami, pour le reste, imagine des scènes spectaculaires (l'ex-catcheur, le pont) où le jeune homme réalise prouesses physiques et acrobaties ; comme Jackal Tomioka, le comique, ça marche toujours, mais moins que dans le premier recueil. Ebihara, en revanche, est la grande réussite de ce tome dont il est la vedette, au fond. Le premier lieutenant est aussi ringard qu'il est brutal, imposant, inquiétant, intrépide ; tout en violence maîtrisée, mais qui sourd par ses pores, voilà un homme qui prétend peut-être séparer "le bon grain" (les yakuzas suivant le code de l'honneur) de l'ivraie (les tueurs en série). Takahashi, lui, s'attire un début de sympathie de la part du lecteur, qui l'avait d'abord pris pour un sbire bas du front ; la scène de la cuite est longuette, mais a le mérite d'atteindre l'objectif recherché, à savoir humaniser ce personnage. "Yōko" se situe entre garde-chiourme et jeune femme attirante souhaitant autant trouver le grand amour que s'amuser. Les animaux (le caïque à tête noire et le hamster) forment une autre catégorie de figurants, artifice pour meubler les scènes de solitude des Satō dans cette petite ville grisâtre. Minami maintient le rythme et alterne scènes d'action et tranches de vie. L'intérêt du lecteur baisse un peu, mais reste vif.
Les dessins de Minami constituent l'un des points forts de "The Fable". Ce qui frappera peut-être le plus est le réalisme de son trait : loin des visages lisses et infantiles que l'on retrouve souvent dans les séries grand public du genre. Néanmoins, chaque personnage est immédiatement identifiable ; Ebihara, notamment, est fantastique de présence, de substance. Un autre élément notable est l'impressionnante maîtrise des nuances de gris de l'artiste, avec un encrage très présent, mais sans excès. Le mouvement est parfaitement figuré grâce aux nombreuses lignes de vitesse ; un procédé que Minami utilise régulièrement avec des doubles pages ou une mise en page moins convenue (inserts de forme irrégulière lors des séquences de combat, par exemple). La densité de détail est très satisfaisante, malgré les arrière-plans vides.
C'est Mehdi Benrabah qui traduit, désormais ; à moins d'être japonisant, impossible de comparer avec la version originale. Deux fautes : une de mode et une de genre.
Après le coup de maître du premier volume, certains lecteurs pourront avoir la sensation que le soufflé retombe d'un cran. Minami martèle son propos avec des scènes d'action spectaculaires, qui impressionneront, mais moins que précédemment. Il prend également soin, en revanche, de donner de la substance à ses protagonistes.
Mon verdict : ★★★★☆
Barbüz
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Action, Tueur à gages, Manga, Seinen, The Fable, Yakuzas, Katsuhisa Minami, Pika
Je suis allé relire l'article sur le tome 1 car je l'avais totalement oublié.
RépondreSupprimerLes animaux forment une autre catégorie de figurants : voilà un mécanisme narratif auquel je ne m'attendais pas, assez original. Je suis bien sûr aller consulter l'article wikipedia (merci pour le lien) sur le caïque à tête noire car je n'avais aucune idée de l'animal que c'est.
Loin des visages lisses et infantiles que l'on retrouve souvent dans les séries grand public du genre : voilà une caractéristique bienvenue. Dois-je comprendre qu'en cela il opère dans un autre registre graphique que celui de Naoki Urasawa sur Monster ?
Nombreuses lignes de vitesse : ça me rappelle de très belle pages de manga dans lesquelles les mangakas sont passés maîtres de l'utilisation de ces lignes figurant le mouvement.
La densité de détail est très satisfaisante, malgré les arrière-plans vides : j'en déduis que Katsuhisa Minami a su trouver un dosage équilibré assez sophistiqué dans ses choix d'informations visuelles
Oui, effectivement, on est dans un autre registre que celui de "Monster". Le niveau de réalisme des personnages de Minami est plus élevé que celui d'Urasawa.
SupprimerBonne déduction, effectivement, Minami dose ses efforts entre vignettes détaillées et d'autres dont l'arrière-plan n'existe pas.