Publié en novembre 2021, le troisième volume de l'intégrale que Panini Comics France consacre à l'équipe Facteur X - X-Factor - inclut les versions françaises des : "X-Factor" #24-35 (janvier à décembre 1988), d'un arc du "X-Factor Annual" #3 (août 1988), et du "Power Pack" #35 (février 1973). Cet album relié (dimensions 17,7 × 26,8 centimètres ; à couverture cartonnée avec jaquette amovible) compte approximativement trois cent cinquante planches en couleurs. Bonus : les biographies des auteurs, une étude d'Angel, diverses couvertures et illustrations (de Fred Hembeck, Walter Simonson, Bob Wiacek, John Byrne et Sal Buscema).
Louise Simonson écrit tous les numéros. Seule la plupart du temps, parfois avec un coauteur : Walter Simonson (son époux) dans le #28, et Tom DeFalco dans le #32. Walt Simonson compose la quasi-totalité des dessins, Steve Lightle (1959-2021) se charge du #32, Jon Bogdanove du "Power Pack", et les dessins de l'annuel sont répartis entre Terry Shoemaker pour le premier récit et Tom Artis (1956-2017) pour le second. Bob Wiacek encre les planches de Simonson, Lightle encre les siennes et Hilary Barta celles du "Power Pack". Pour la mise en couleurs : Petra Scotese, un numéro par Gregory Wright (#31) et Glynis Oliver ("Power Pack").
Précédemment, dans "X-Factor" : Grâce à un robot, Cameron Hodge réussit à échapper à Facteur X. Apocalypse observe la scène depuis son vaisseau spatial. Ses quatre Cavaliers sont prêts. Il téléporte les cinq membres de Facteur X à bord pour un test.
L'équipe Facteur X (Cyclope, Marvel Girl, le Fauve, Iceberg, Caliban) a été à l'instant téléportée dans une sorte de forteresse de métal qu'aucun des membres ne reconnaît. Caliban détecte cinq présences mutantes dans les parages : une qui lui est inconnue, mais pourtant familière, une seconde qu'il n'a encore jamais rencontrée et les trois Cavaliers. Tandis que Caliban se plaint de ne pas suffisamment puissant et formule l'espoir de trouver des armes, Scott ordonne à Jean de déployer un bouclier télékinétique autour d'eux ; elle s'exécute. Ses coéquipiers appellent Scott à la prudence, d'autant que Hank n'est pas entièrement remis...
Ce tome est dans la lignée du précédent. Simonson joue sur trois dynamiques principales, le conflit avec Apocalypse, qui incarne l'ennemi juré, le quotidien des jeunes mutants et la relation entre Scott et Jean. En filigrane : la disparition du fils de Scott, qui le renvoie aux souvenirs de sa propre enfance. Il serait de mauvaise foi de le nier, "X-Factor" a son identité propre. Comme si Simonson, tout en respectant scrupuleusement les caractérisations, avait souhaité se différencier de l'atmosphère plus sombre de Chris Claremont. Car sombre, "X-Factor" ne l'est pas. La bataille contre Apocalypse et ses Cavaliers est mise en scène trop superficiellement pour émouvoir. Un pétard mouillé, rien d'intéressant n'en émerge. La crédibilité d'Apocalypse en tant que super-méchant en ressort détériorée, ni lui ni les Cavaliers n'impressionnent. En outre, d'abord rejetés pour leur mutanité, voilà les membres de Facteur X fêtés en champions. Simonson s'éloigne ici de la dynamique de menace omniprésente que Claremont utilise comme carburant de ses histoires. Les caractérisations sont toujours aussi fidèles - bien que Simonson semble avoir des difficultés avec les variations sur le thème d'un même personnage : le Fauve abêti semble maladroit et malheureux plutôt qu'idiot et Angel passe d'un personnage solaire à quelqu'un de mesquin par son manichéisme et son esprit revanchard (même si cela se comprend), tandis que le lecteur s'attend plutôt à un impitoyable agent de la Faucheuse. Simonson montre également un côté soap très enraciné. Elle cultive la facette enfantine/adolescente du titre par le biais des apprentis acolytes gaffeurs réunis en tribu familiale et des gamins de Power Pack, qui réalisent des exploits en cachette de leurs parents. Si l'annuel est funèbre, "X-Factor" est donc léger, en témoigne l'arc avec Infectia. Il joue sur l'autodérision et le comique de situation. Un esprit parodique qui se retrouve dans le design de certains personnages : les armures des Justes, les démons et Nanny. Enfin, l'abondance persistante de texte et le bavardage continu des personnages (ils éprouvent un besoin maladif de parler) peuvent rendre la lecture lassante.
Au fil des tomes, le lecteur se sera habitué au trait de Simonson : ses planches sont énergiques, cinématographiques et pleines de mouvement. L'artiste développe une réelle variété dans sa mise en page autant que dans la façon dont il pense ses plans. Si la première page de chaque chapitre est léchée et qu'il y a quelques splendides doubles planches, la plupart du temps les décors sont réduits à leur plus simple expression dans le meilleur des cas - voire à une simple couche de couleur unie dans le pire. La qualité des finitions est discutable, mais Simonson compense, par une efficace combinaison entre lignes de mouvement, explosions et onomatopées marquées. En professionnel compétent, Simonson propose des personnages facilement identifiables, un découpage limpide et des compositions d'une lisibilité impeccable.
La traduction est de Benjamin Rivière alias KG Ben. Relevons une faute de genre ainsi que des passages obscurs ; de plus, "télékinésique" n'existe pas ("télékinétique").
Simonson se détache de la noirceur de Claremont et de Layton en écrivant des épisodes légers et particulièrement bavards ; malgré la qualité de l'écriture et bien que l'autrice dote "Facteur X" d'une personnalité propre, certains lecteurs seront inévitablement rétifs à ce type d'atmosphère. L'annuel ne réussit pas à compenser.
Mon verdict : ★★☆☆☆
Barbüz
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Facteur X, X-Factor, Caliban, Apocalypse, Les Quatre Cavaliers, Cameron Hodge, N'astirh, Nanny, Orphan-Maker, Marvel
X-Factor a son identité propre : c'est aussi le souvenir que j'en garde, même si je ne me l'avais jamais formulé de manière explicite. Et ce n'était pas une mince affaire à l'époque de parvenir à exister dans l'ombre de Chris Claremont.
RépondreSupprimerApocalypse, qui incarne l'ennemi juré : je me retrouve dans le fait que la crédibilité d'Apocalypse a dû mal à décoller. C'est comme si les responsables éditoriaux avaient exiger de Bob Layton qu'il crée un ennemi spécifique à l'équipe, qu'il était parti avant de savoir vraiment que faire de cette menace au contour flou, et qu'à sa suite Louise Simonson ne soit guère plus avancée.
La facette enfantine/adolescente : avec le recul, c'était la suite de la thématique qu'elle développait dans la série Power Pack, et en même temps c'était une bonne manière d'introduire des personnages plus jeunes, de renouveler l'aéropage de mutants, et de tendre la main à de potentiels lecteurs eux aussi plus jeunes.
Entièrement d'accord avec ta vision des dessins de Walt Simonson : de l'absence criante de décor à la lisibilité et l'énergie des scènes d'action.
Je suis déçu par ce run de Simonson, qui est pourtant resté dans les annales, semble-t-il. De tout évidence, cela ne s'adresse pas à moi.
SupprimerL'autrice est restée jusqu'au numéro 64, ce qui signifie encore deux volumes complets et un peu plus avant le passage de flambeau et la reprise par Lee - Portacio - Claremont en avril 1991. Je ne sais pas dans comment se sont répartis les rôles d'écriture au sein de ce trio, les trois étant crédités comme scénaristes.
Il me semble me souvenir que j'avais interrompu ma lecture de la série X-Factor autour des épisodes contenus dans ce tome.
SupprimerLee+ Portacio + Claremont : de ce que j'avais compris, les intrigues étaient pilotées par Jim Lee (lancement du titre X-Men, sans adjectif), avec Portacio, et Chris Claremont était chargé de faire le secrétariat pour eux.
Claremont, faire du secrétariat ? Voilà une situation pour le moins étonnante.
SupprimerDans ma mémoire, Chris Claremont s'est fait doublé par la génération requalifiée a posteriori de Génération Image, et lesdits jeunots ont pris le pouvoir, les responsables éditoriaux reléguant Claremont au rang des petites mains. Cela permettait aux responsables éditoriaux de sortir de la dynamique où les X-Men étaient vus comme les personnages de Claremont, et non pas comme les propriétés intellectuelles de Marvel : en gros l'éditeur dépendait de ce créateur pour faire fructifier ses propriétés. La Génération Image a prouvé que les X-Men pouvaient vendre plus, sans Claremont, un changement de paradigme (pour utiliser une expression dans l'air du temps).
SupprimerJe vois. J'ai effectivement en tête ce numéro ("X-Men", volume 2, #1) de Lee (et Claremont) qui a dépassé les huit millions d'exemplaires vendus. Sans oublier le "X-Force" de Liefeld et ses quatre millions.
SupprimerSur la série X-Men (vol. 2) de 1991, Chris Claremont a tenu 3 épisodes avec la fonction d'aider Jim Lee pour ses dialogues avant de partir, suite à des différends avec le responsable éditorial Bob Harras. De façon très inattendue, John Byrne lui a succédé pour les dialogues : impossible de ne pas interpréter cette succession d'une manière ou d'une autre. Puis c'est le jeune Scott Lobdell qui s'y est collé, Jim Lee quittant la série au numéro 11 pour co-fonder Image Comics.
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