dimanche 12 avril 2020

Wonder Woman (tome 4) : "La Voie du guerrier" (Urban Comics ; octobre 2014)

"La Voie du guerrier" est un album cartonné d'à peine cent trente planches (hors bonus), sorti dans la collection "DC Renaissance" d'Urban Comics en octobre 2014. C'est le quatrième des six volumes de la "Wonder Woman" de la "Renaissance DC" (les "New 52"), une démarche de DC Comics de 2011 visant à rafraîchir son univers. Ce tome contient les numéros 19 à 23 (juin à octobre 2013), ainsi que le nº23.2 (novembre 2013) de la série "Wonder Woman". 
Brian Azzarello ("Lex Luthor", "Joker") écrit le scénario. Les illustrations du premier chapitre sont signées Goran Sudžuka et Tony Akins et encrées par Sudžuka et Dan Green ; celles du deuxième, par Cliff Chiang et Sudžuka. Chiang se charge du reste, sauf du 23.2, confié à ACO ; Matthew Wilson compose la mise en couleur. 

À l'issue du tome précédent, le Premier-Né affronte Poséidon. Arès est en avance sur Wonder Woman et Orion. Il ouvre le ventre de Déméter, lui enlève l'enfant et, finalement, le ramène à Zola. 
L'Olympe, au bord d'une piscine entourée de cyprès. Sous un ciel rouge, Dionysos sert un verre de vin à Artémis ; celle-ci vide sa coupe, malgré le conseil de son frère, qui l'encourage à prendre le temps de savourer le nectar afin de ressentir plus de plaisir. Il demande à sa sœur où se trouve Apollon. Ce dernier est dans les cieux, où il fait ses rondes. Contrairement à leur père Zeus, qui considérait que tout lui était dû, Apollon estime qu'il doit mériter ce trône. C'est à ce moment que le dieu de la lumière apparaît devant eux. Il se réjouit de retrouver Dionysos et s'enquiert de nouvelles d'Arès. Après lui avoir servi un verre de vin, Dionysos lui révèle qu'Arès a fini par perdre la tête. Ces querelles, ces conflits : Apollon n'est guère étonné, mais il regrette que son frère ait succombé à la démence. Du même avis, Dionysos l'informe qu'Arès a scellé une alliance avec Wonder Woman, et ajoute qu'il peut certifier que cet enfant qu'elle protège est celui de la prophétie... 

Après la surprise d'un premier volet, dans lequel Azzarello dévoilait une lecture personnelle et novatrice de l'univers de Wonder Woman, voilà que cet arc traîne depuis deux tomes ; hélas, malgré quelques idées originales, ce n'est pas avec ce volume-ci que les lecteurs pourront renouveler leur intérêt pour ce titre, car rien ne change vraiment. L'intrigue est victime de longueurs, d'une certaine inertie narrative, les protagonistes se perdant en palabres, et semblent peiner à s'engager dans ce conflit. Zola et son fils sont entourés de la même "famille" encombrante et dysfonctionnelle. L'aîné Arès, éreinté, glisse du cynisme vers un désir de rédemption ; Lennox, dont les lecteurs se demandent encore ce qu'il apporte à cette saga, est toujours superflu ; Orion alterne provocations, blagues sexistes, et crises de folie ; Wonder Woman est sur tous les fronts ; Héra n'est plus la peste maléfique qu'elle incarnait au début de cette histoire ; Zola, elle, est idéalisée dans son rôle de mère courage. Le récit est découpé en trois lignes narratives : la première, avec Diana, Zola, et leurs alliés ; la seconde, avec Apollon et son clan, composé de certains des dieux de l'Olympe, dont Dionysos et Artémis ; et une dernière, avec le Premier-Né et Cassandra. Elles finiront, bien sûr, par se couper et s'entrecouper ; c'est là qu'interviennent le métier et l'expérience d'Azzarello, dont il ne s'agit en aucun cas de remettre en question le talent à conter des histoires. Le scénariste réussit à insuffler l'action indispensable aux passages critiques - ce qui lui permet de sortir sa famille dysfonctionnelle du modèle de la querelle intestine pour la focaliser sur un ennemi commun (enfin !) - et réserve quelques surprises de taille et bien senties aux lecteurs sceptiques. L'un des défauts récurrents de la série réside dans la partie graphique ; à croire que Chiang n'est pas capable de tenir la cadence sur plus de trois numéros, qu'il travaille trop lentement, ou plutôt (surtout) qu'il a d'autres obligations professionnelles parallèles. Le style de Chiang étant plus abouti que celui de Sudžuka ou d'Akins, "Wonder Woman" souffre d'hétérogénéité visuelle, les "remplaçants" singeant le trait du "titulaire" sans y parvenir. Avec le temps, néanmoins, une forme "d'habitude" finit par se créer. 
Thomas Davier produit une traduction très satisfaisante, au texte soigné : ni faute ni coquille, sauf erreur de ma part. L'éditeur a inséré un résumé du tome antérieur. Certains regretteront peut-être l'absence d'une table des matières et de pagination. 

Au fil des albums, les lecteurs ont pu se faire aux défauts d'un titre qui menace de susciter l'ennui à chaque instant. À chaque fois, malgré l'intrigue qui patauge et qui s'étire, Azzarello trouve l'ingrédient qui relance l'intérêt du lecteur ; jusqu'à quand ? 

Mon verdict : ★★★☆☆ 

8 commentaires:

  1. J'ai abandonné la lecture de cette série à la fin de ce tome, pour différentes raisons. Pour commencer, je me retrouve entièrement dans ce que tu écris sur la partie visuelle, à commencer par Sudžuka et Akins singeant le trait du titulaire en plus fade. En outre, j'avais été frappé par le manque de densité narrative, chaque tome se lisant deux fois plus vite qu'un tome équivalent de superhéros, et par le manque d'épaisseur des personnages (je n'arrivais pas à m'y attacher).

    En relisant mon commentaire, je m'aperçois que quelques scènes avaient marqué mon esprit. Dans l'épisode 19, Wonder Woman finit par expliquer clairement à Orion qu'il faut qu'il mette un terme à son attitude sexiste (la tactique de WW est des plus inattendues). Épisode 20, Cassandra explique pourquoi elle en veut à Lennox, et le motif prend tout son sens pour le lecteur capable de situer Cassandre dans la mythologie, un beau moment d'horreur. Épisode 21, Cliff Chiang crée un moment visuel mémorable lors du voyage à l'intérieur du Boom Tube. Les 2 scènes finales de l'épisode 23 sont également impressionnantes visuellement dans leur retenue, avec une maîtrise de la mise en page.

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    1. La scène qui m'a le plus marqué est l'invocation de ces soldats de tous les âges invoqués par Arès. À part ça, j'ai également trouvé que la tactique de Diana était incongrue et ne convenait pas forcément au personnage.
      Avec le recul et quelques années plus tard, je ne comprends pas pourquoi ce chapelet d'épisodes à la faveur du public et de la critique ; sans doute ceux qui les défendent le plus se sont-ils arrêtés au premier tome sans aller plus loin.

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  2. La faveur du public - Je me rappelle qu'il y a l'attrait de la nouveauté, et la sensation qu'il s'agit d'une version peut-être moins nunuche que d'habitude, surtout pour ceux qui n'ont pas lu ou pas pu lire de Wonder Woman depuis des années. Azzarello a mis en avant son côté guerrière et pas facile de caractère, avec une dimension horrifique sympathique au départ.

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    1. "Moins nunuche que d'habitude" : ça, c'est une certitude. À un point tel que je ne sais pas s'il faut encore que je me penche sur "Dieux et mortels". À part l'album de Dini et Ross, je n'ai encore rien lu avec Wonder Woman qui m'a vraiment interpellé. Je ne sais pas si tu as lu la version "Rebirth", mais les commentaires ne sont pas forcément enthousiastes. 

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  3. Moins nunuche que d'habitude - En fait, Wonder Woman est un personnage pour lequel j'ai une réelle affection et dont la version de référence est pour moi celle de George Perez (1987-1992) dont il me reste encore quelques épisodes à relire. La version suivante par William Messner-Loebs et Mike Deodato (1992-1995) prenait une direction différente, assez déconcertante de prime abord (DC Comics doit la ressortir en recueil et je compte m'y replonger, si le confinement ne conduit pas à l'annulation de cette sortie). Par la suite, j'avais bien apprécié la version de John Byrne (1995-1998) bien musclée. Récemment, je me suis offert l'omnibus des épisodes de Phil Jimenez (2001-2003) que j en'ai pas encore lu. J'avais lu les premiers épisodes écrits par Greg Rucka (2003-2006), sans aller jusqu'au bout parce que je n'ai pas su percevoir ce qui avait occasionné l'enthousiasme à l'époque. J'avais lu les épisodes scénarisés par l'écrivaine Jodi Picoult (2007) : bof. Je suis ensuite passé à ceux de Gail Simone (2007-2010) parmi lesquels il y avait d'excellents moments, sans rien de nunuche. Les épisodes de Straczynski (2010) commençaient bien mais il est parti à la moitié de son histoire. Azzarello (2011-2014) : j'ai arrêté au milieu. Meridith Finch : je n'ai pas essayé vu les mauvaises critiques. Je compte bien lire ceux écrits par G. Willow Wilson (2018-2019).

    J'avais également lu les trois premiers tomes de Wonder Woman Chronicles, la réédition des épisodes originaux de 1941, par William Moulton Marston et H.G. Peter.

    J'ai lu un tome de la version Rebirth de Rucka (2016-2017) et je m'en suis tenu là, n'ayant pas été intéressé par cette version composite entre différentes continuités.

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    1. J'ai moi aussi une véritable affection pour Wonder Woman, qui ferait partie des trois super-héros toutes maisons confondues que je retiendrais si jamais je devais recentrer mes lectures. Malheureusement, j'estime - peut-être à tort, puisque je ne connais d'elle que ce qui a été publié en VF - qu'elle attend toujours son heure de gloire, et qu'aucun scénariste n'a encore été en mesure de lui offrir son "Année un" ou son "All-Star". Je n'ai pas encore lu ce qu'en a fait Morrison, mais je suis déjà dubitatif. Ce que j'ai lu de meilleur avec elle est sans doute "Seule contre tous", bien qu'il s'agisse à l'origine d'un récit consacré à la Ligue de Justice.

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  4. Je ne l'ai pas mentionné, mais, comme toi, j'avais également beaucoup aimé Seule contre tous, de Christophe Moeller (mon article est même sur Bruce Lit), ainsi que Hiketeia de Greg Rucka & JG Jones (article également sur Bruce Lit).

    Je n'ai pas encore lu les 2 tomes de Terre Un par Morrison & Paquette. Quelqu'un me rappelait récemment l'abandon du projet All Star par Adam Hughes.

    J'avais oublié : dans la liste de ce que j'ai lu se trouve encore la période où elle avait perdu ses pouvoirs (1969-1973), Diana Prince, par Denny O'neil & Mike Sekowski avec quelques épisodes qui sortent du lot.

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    1. Oui, j'avais apprécié "Hiketeïa", moi aussi ; sauf erreur de ma part, il figure dans la série "Greg Rucka présente Wonder Woman" (trois tomes), sorti dans la collection Signature d'Urban Comics.

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