mardi 1 décembre 2020

Ric Hochet (tome 9) : "Alias Ric Hochet" (Le Lombard ; septembre 1969)

"Alias Ric Hochet", le neuvième tome de "Ric Hochet", série policière lancée par le Belge André-Paul Duchâteau (1925-2020) et le Français Gilbert Gascard (1931-2010) dit Tibet, est paru au Lombard en septembre 1969 après avoir été prépublié dans "Le Journal de Tintin", entre le 13 février (nº7/68) et le 9 juillet 1968 (nº28). Cet album format 22,5 × 30,0 centimètres à la couverture cartonnée contient quarante-quatre planches. Titre-fleuve culte, "Ric Hochet" compte soixante-dix-huit volets et s'étend sur près de cinquante ans ; le dernier est sorti en 2010. 
Duchâteau écrit le scénario et Tibet produit la partie graphique (dessin, encrage, mise en couleur). Tibet ne réalisait pas les décors et les confiait à des assistants ; ici, à Christian Denayer

Paris, le matin du 10 avril : Ric Hochet et Bourdon se trouvent dans un magasin de jouets. Ils ne se sont pas aperçu pas qu'un vendeur, tout en faisant mine de ranger des articles, les écoute. Le commissaire ne comprend pas ce qu'ils font là. Ric laisse sous-entendre que son ami a probablement mal compris l'adresse qui lui a été indiquée, mais Bourdon est formel, ils sont au numéro qu'a précisé le professeur Hermelin comme adresse du nouveau laboratoire. Les directives du savant étaient claires, le rejoindre "toutes affaires cessantes". Ric est aussi circonspect que goguenard. Serait-ce un poisson d'avril à retardement ? À moins qu'Hermelin veuille offrir au commissaire un polichinelle pour ses Pâques ? Mécontent, Bourdon réplique qu'il n'a eu pour toute consigne que de prononcer le nom d'Hermelin, et de demander à téléphoner. Ric avait vu un employé ; peut-être va-t-il revenir ? Le policier feint alors de s'intéresser aux jouets. Une mitraillette capte son attention. Il la prend en main et est immédiatement surpris par son poids. Elle est aussi lourde qu'une vraie ; que vont-ils inventer ! À cet instant, le vendeur s'interpose pour le prier de ne pas toucher à leur marchandise... 

Cet album est important, car il lève le voile sur l'un des secrets de la vie du journaliste : les lecteurs - sans que tout soit dit - découvriront enfin quelques éléments sur ses origines et son enfance par l'intégration d'un nouveau personnage-clé. Ce dernier permet à Duchâteau d'enrichir sa galerie de seconds rôles. Il faut reconnaître que la série, à ce neuvième tome, n'en compte encore que peu, qu'ils sont trop peu exploités (citons le cas de l'inspecteur Ledru), voire réduits au rang de figurant, ou que le scénariste peine à les utiliser de façon durable, intéressante ; c'est le cas de Nadine, par exemple, dont l'apparition est ici insignifiante. L'intrépide jeune femme de "Piège pour Ric Hochet", qui, ici, nettoie l'appartement de son oncle, est loin. En revanche, Duchâteau invite à nouveau le professeur Hermelin, créé dans "Rapt sur le France", peut-être pour insuffler un effet comique aux situations et aux dialogues. La caractérisation du savant n'a pas évolué : impatient, cassant, arrogant. Il sert de reflet déformé à Bourdon : un jeu de miroir et une forme de rivalité sans lesquels Hermelin en tant que tel ne serait guère intéressant. C'est aussi la deuxième fois sur deux que Duchâteau l'emploie comme moyen d'introduction de l'histoire, qui n'est qu'une variation sur le thème de "Rapt sur le France" : les recherches du scientifique français ont éveillé certains appétits. L'auteur continue donc d'explorer le registre de l'espionnage, s'éloignant encore un peu plus des intrigues de province ; d'ailleurs, l'action se déroule exclusivement en Île-de-France. Au fond, le scénario serait plutôt ordinaire s'il n'y avait cet autre jeu de miroirs entre Ric et le nouveau personnage secondaire. Duchâteau propose néanmoins quelques trouvailles imaginatives, telles que le centre de recherche d'Hermelin, et parsème son aventure de scènes d'action bien ficelées, à l'exception de la séquence finale, qui ne s'embarrasse aucunement d'un quelconque souci de vraisemblance et qui en rappelle d'autres de la série, dont l'ouverture de "Défi à Ric Hochet". Quant à la partie graphique, elle est dans la lignée des albums précédents ; nombreuses, les scènes d'action bénéficient de la clarté du découpage de Tibet. Ne sous-estimons pas le travail du décoriste, Denayer, bien que sa créativité soit plus évidente dans les scènes d'intérieur (boutiques, bureaux, ou habitations) que dans celles d'extérieur ; c'est certainement normal, les extérieurs d'une ville telle que Paris représentant sans doute plus de contraintes en matière de créativité. La mise en couleur, irréprochable, apporte les contrastes nécessaires. 

"Alias Ric Hochet" est un album qui se lit sans déplaisir, mais qui vaut surtout pour la création d'un personnage secondaire important, qui apparaîtra plusieurs fois au fil de la série, et qui permet à Duchâteau de doter le journaliste de plus de substance. 

Mon verdict : ★★★☆☆

Barbüz
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2 commentaires:

  1. Tu est taquin : il a fallu que j'aille chercher sur wikipedia pour le ver le mystère : s'agit-il d'un dénommé Richard pour le personnage secondaire ?

    Déjà le neuvième tome dans ta chronique au long court, et une forme de train-train semble s'installer à lire ton présent article.

    J'ai suivi ton lien pour Christian Denayer, et j'ai découvert qu'il illustre la série Wayne Shelton, souvent en bonne place dans les rayonnages des libraires.

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    1. J'ai voulu jouer l'exercice de l'exclusion de tout divulgâcheur. Mais oui, tu as raison : c'est bien Richard. Sa création donne un peu plus de fond à Ric Hochet.
      Le train-train s'installe, effectivement, puisque tous les scénarios sont plus ou moins basés sur le même modèle. Ce sont le cadre et les personnages secondaires qui font la différence. Et puis, je ne suis pas fan du personnage d'Hermelin, à qui je préfère Nadine.

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