mardi 6 avril 2021

Aquaman (tome 2) : "L'Autre Ligue" (Urban Comics ; juillet 2013)

"L'Autre Ligue" est un recueil format 17,5 × 26,5 centimètres à la couverture cartonnée, de cent soixante planches environ. Il est sorti dans la collection "DC Renaissance" d'Urban Comics en juillet 2013 ; c'est le second des cinq tomes du "Aquaman" (volume 7) de la "Renaissance DC" / "The New 52", démarche inaugurée par DC Comics pour relancer son univers. Ce volet réunit les versions françaises des #7-13 (mai à décembre 2012) et le #0 (novembre). 
Le scénario a été écrit par Geoff Johns, l'un des auteurs majeurs de l'écurie DC Comics depuis les années deux mille. Il est connu notamment pour ses "Flash", ses "Superman" ou encore ses "Green Lantern". Le Brésilien Ivan Reis illustre les huit numéros et Joe Prado est l'encreur principal. Participent aussi à la tâche, outre Ivan Reis : Oclair Albert, Andy Lanning, Jonathan Glapion et Julio FerreiraRod Reis - le frère d'Ivan - compose la mise en couleurs. 

À l'issue du tome précédent, Mera a des démêlés avec les autorités ; Aquaman lui propose de lui expliquer ça en route. Il se rend chez le docteur Shin pour qu'il lui raconte qui a coulé l'Atlantide. 
Dans la jungle amazonienne du Brésil, une nuit. Kahina se fraye un chemin à travers la végétation. Derrière, Black Manta est tapi dans l'ombre. Il arme le harpon de son bras droit. Tandis qu'il fait ce geste, Kahina a une vision de sa propre mort, par une flèche qui lui transperce la poitrine. Elle esquisse donc un pas de côté et parvient ainsi à éviter le projectile que lui a décoché l'ennemi juré d'Aquaman. Elle n'avait pas tout vu : le carreau était équipé d'une charge explosive, qui détone dans une gerbe de flammes. Kahina est vivante, mais elle est sévèrement sonnée. Un glaive dans chaque main, Black Manta raille sa proie. Elle voit peut-être l'avenir, mais elle ne voit pas tout ! Kahina se relève, et salue son adversaire en arabe. Armée de sa propre épée, elle fait face à Black Manta ; le combat s'engage et leurs lames s'entrechoquent... 

Suite du "Aquaman" des "New 52", dont le premier volet avait été suffisamment réussi pour susciter un minimum d'engouement. Johns écrit là un scénario relativement complexe, du fait de la multiplicité des lignes temporelles, entre le présent et trois périodes qui se déroulent dans le passé. Les lecteurs découvrent à quelles missions Aquaman a participé et dans quels endroits. Johns n'y va pas par quatre chemins, et met en scène un super-humain dont la compassion n'est pas sa qualité première. Il y a ici un travail considérable de caractérisation, peut-être pour éviter de faire d'Aquaman un simple Superman des mers. En cela, Johns le rapproche, sans doute sans le vouloir, du fougueux Namor de Marvel. Arthur Curry apparaît là comme un individu têtu dont la volonté de poursuivre son objectif relève de l'obsession, une attitude un peu anormale pour un membre de la Ligue de Justice à part Batman. À cela s'ajoutent une agressivité inattendue et une compassion minimale ; cet Aquaman est un prédateur dont Black Manta est la proie. Qui dit ligue dit compagnons ; autre nouveauté et un bel exemple de créativité de la part de Johns, dans un genre où innover est une gageure. L'auteur parvient à surprendre avec une équipe à la diversité étonnante : une Brésilienne en (toute) petite tenue, un Latino-Américain tourmenté, un espion-ninja inoxydable, une Iranienne (a priori, musulmane), et un Russe à la formation peu commune. Chacun joue son rôle, dans un scénario chargé d'action jusqu'à la gueule - sans oublier la testostérone - et dans lequel Aquaman partage la vedette avec les membres de cette Autre Ligue avec toutes les frictions que cela implique. Le modèle d'intrigue utilisé est celui de la quête : les protagonistes doivent empêcher Black Manta de s'emparer d'objets magiques liés à l'Atlantide. 
La partie graphique bénéficie du style explosif de Reis. Si les physionomies des membres du groupe sont des stéréotypes dans un genre qui en regorge, il faut admettre que l'artiste réussit à les mettre en scène dans des compositions spectaculaires. Ses cases pleines d'énergie restent lisibles. Néanmoins, notons quelques improbabilités anatomiques. Reis opte pour des cases qui occupent la largeur de la planche pour un rendu cinématographique. Le niveau de détail est satisfaisant. 
La traduction est effectuée par Thomas Davier. Dans l'ensemble, elle s'avère d'une qualité très élevée. Davier est à mon avis l'un des meilleurs professionnels du circuit et son texte irréprochable ne comprend ni faute ni coquille, sauf erreur de ma part. 

Sans être une franche réussite, "L'Autre Ligue" est suffisamment convaincant pour donner au lecteur l'envie de continuer cette redécouverte du personnage d'Aquaman et de les suivre, avec ses compagnons, dans cette quête sur le thème de l'Atlantide. 

Mon verdict : ★★★☆☆ 

Barbüz 

3 commentaires:

  1. Je découvre ainsi ces épisodes par ta plume.

    Il y a ici un travail considérable de caractérisation, peut-être pour éviter de faire d'Aquaman un simple Superman des mers. En cela, Johns le rapproche, sans doute sans le vouloir, du fougueux Namor de Marvel. - Voilà qui est inattendu : est-ce à dire que la fonction de roi d'Atlantis formate le caractère, qui finit par dicter des caractéristiques psychologiques au scénariste ?

    3 étoiles : je me demande ce qu'il manquait à Johns à cette époque pour retrouver son inspiration pour Flash, puis pour Green Lantern. Peut-être était-il éparpillé sur trop de projets avec ses responsabilité éditoriales de l'époque…

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    1. La comparaison avec Namor est peut-être un peu tirée par les cheveux ; ici, Arthur Curry a abdiqué ou renoncé au trône. Mais sa caractérisation est tellement éloignée de ce que j'attendais - sans doute quelque chose de beaucoup plus conservateur - que le parallèle m'est venu à l'esprit tout de suite.

      Je suis moins client de Johns que toi, mais ici, je dirais que c'est surtout le style d'Ivan Reis qui me laisse froid. Bien qu'il ait des qualités évidentes, je lui reproche son aspect trop lisse, trop commercial à mon goût, et une représentation pas toujours convaincante de certaines émotions. J'aurais aimé un artiste avec un coup de crayon plus sombre et plus sobre, qui cède moins facilement aux travers du genre super-slip.

      C'est le dernier tome illustré par Reis, et le prochain sera le dernier écrit par Johns. Urban Comics s'est arrêté au tome 5 et n'a donc pas publié l'intégralité de ce septième volume.

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    2. J'aime aussi beaucoup Ivan Reis, en dépit de ses limites que tu indiques. J'ai suivi sa montée en puissance sur la série Green Lantern, et j'y retrouve un mélange de Neal Adams et d'Alan Davis qui me plaît beaucoup.

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