samedi 2 octobre 2021

Geoff Johns présente Flash (tome 1) : "Sang à l'heure" (Urban Comics ; janvier 2017)

Publié en janvier 2017 dans la collection "DC Signatures" d'Urban Comics, "Sang à l'heure" est le premier volume consacré au Flash de Geoff Johns. Cet ouvrage, format 17,5 × 26,5 cm à couverture cartonnée, compte environ trois cent trente planches, et inclut les versions françaises des "The Flash" (vol. 2) #164-176, sortis entre septembre 2000 et septembre 2011 en version originale. Une partie (les #170-173) en avait été publiée chez SEMIC (juin 2004) et une autre (les #174-176 avec les suivants) chez Panini Comics dans la collection "DC Big Books", "Un nouveau départ" (fin 2005)
C'est donc Geoff Johns qui écrit les scénarios de tous les numéros. Johns, un des auteurs majeurs de l'écurie DC Comics depuis les années deux mille, est connu notamment pour ses "Aquaman", ses "Superman" ou ses "Green Lantern". Le poste de dessinateur est divisé entre l'Espagnol Ángel Unzueta (#164-169) et Scott Kolins (#170-176). L'encreur - Doug Hazlewood - reste le même en dépit du changement d'illustrateur. En revanche, le coloriste change. La mise en couleur du premier arc est composée par Tom McCraw et celle des autres par James Sinclair (studio Digital Chameleon). 

Commissariat de Keystone City. Flash est malmené par l'agent Frederick Chyre, qui l'empêche de remuer en le maintenant contre un bureau par une clé de bras. Le bolide crie à qui veut l'entendre qu'il est Flash. Un rictus aux lèvres, Chyre se moque durement de ce soi-disant "homme le plus rapide du monde", qui a causé le carambolage de vingt voitures, et a permis à un "foutu criminel costumé de s'échapper". Mais peut-être qu'ils sont associés et qu'il l'a aidé à tuer l'agent Nick Kelly ? C'est lui l'enfoiré qui lui a mis "les tripes à l'air" ? Flash ne comprend rien à ce qu'il se passe. Un autre agent annonce que "ce crétin" leur a donné son vrai nom : Wally West, 26 ans, enseignant et entraîneur sportif à Blue Valley, Nebraska. Pas d'antécédents judiciaires... "jusqu'à présent". Du sang coulant de sa bouche, Wally cherche à éclaircir sa situation... 

En 2000, Johns succède à Mark Waid en tant que scénariste de "The Flash". Resté huit ans sur le titre, Waid l'aura marqué de son empreinte en inventant notamment le concept de Force véloce ("Speed Force"). Pour son entrée en fonction, Johns, dont la mission est de revitaliser la série, ouvre par un arc singulier, écrit tel un "What If" cauchemardesque dans lequel le bolide est contraint de s'associer à deux Lascars pour s'en sortir, Captain Cold et le Maître des Miroirs. Loin des poncifs manichéens du genre, cette alliance contre-nature fonctionne bien, surtout avec Captain Cold. La période Johns sera d'ailleurs caractérisée par une utilisation récurrente des Lascars. Cet arc en six numéros n'est pas exempt de faiblesses narratives. Johns force le trait des policiers du KCPD jusqu'à la caricature et le mobile de l'antagoniste, traité de manière puérile, est dérisoire. Dans "Sang à l'heure", Johns oppose Flash à une secte mystérieuse et meurtrière. Une histoire sans temps mort avec son lot de surprises dont Cicada, gourou désaxé d'un culte dont les membres se soumettent aveuglément, comme dans les pires totalitarismes ou intégrismes. Un autre Lascar s'invite dans le dernier arc : le Météo Mage ("Weather Wizard"). Le fil conducteur se déroule, Wally qui veut stabiliser sa vie à Keystone City. Les tics narratifs de Johns sont déjà là, attitudes affirmées, caractérisations marquées, joutes verbales, et testostérone. Johns, c'est aussi l'art de la surprise et du renversement de situation, des pièges dans lesquels le lecteur adore tomber. Malgré les bottes jaunes, l'improbable Jesse Quick, les formules mathématiques infantiles, les mondes parallèles, et les allers-retours temporels jusqu'à la lie, la force de Johns (il le refera avec Green Lantern) est de reprendre les éléments d'une mythologie, et de les intégrer dans une saga cohérente qui s'approprie et assimile l'univers qu'elle met en scène. Et puis admettons-le, Wally West est quand même loin de Barry Allen, cet oncle candide jusqu'à l'ennui. 
Unzueta est inspiré par le style Image Comics, en vogue dans les années quatre-vingt-dix : musculatures saillantes et surdéveloppées, expressivité exagérée, figuration spectaculaire du mouvement jusque dans le choix des plans. Marqué, l'encrage consiste en de généreux aplats de noir. Les arrière-plans sont rarement représentés. Il y a une véritable approche de chaque case, dynamique, explosive ou sinistre. Kolins opte pour une technique tout aussi spectaculaire avec moins d'outrance. Le trait est moins acéré, plus doux, avec des contours plus épais et l'encrage est très allégé. Les tons de Sinclair sont fades et n'accentuent pas assez les contrastes, mais le rendu est plus moderne que ce que propose Unzueta. Quoi qu'il en soit, certains lecteurs pourront ne pas s'habituer à la rupture totale de genre entre les deux parties. 
À la traduction, Stéphane Le TroëdecEdmond Tourriol, et Jérémy Manesse : onomatopée non traduite ("koff"), faute de langue, "acide de citrus" pour "acide citrique", faux-sens ("officer" : "agent", pas "officier") et faute d'accentuation ("ou" pour "où"). 

Flash est peut-être un personnage que beaucoup adorent détester de ce côté de l'Atlantique. Malgré les dessins d'Unzueta, cette somme se lit sans déplaisir majeur, et l'envie de découvrir la suite démangera le lecteur, dès qu'il aura refermé cet album. 

Mon verdict : ★★★☆☆ 

Barbüz 

2 commentaires:

  1. Je ne sais pas ce que tu as lu en 1er : Flash ou Green Lantern. Pour moi, j'ai commencé par Hal Jordan. Quand DC a publié des rééditions du Flash de Geoff Johns dans un autre format qu'en omnibus, je me suis aussi lancé dans l'aventure. Je n'ai pas encore tout lu. J'ai préféré Kolins à Unzueta, et j'ai bien aimé les éléments superhéros que tu cites : les bottes jaunes, l'improbable Jesse Quick, les formules mathématiques puériles, les mondes parallèles et les allers-retours temporels.

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    1. Dans cette collection-là, j'ai d'abord lu "Green Lantern". Mais je connaissais déjà ces épisodes de "The Flash" pour les avoir lus chez Semic puis chez Panini Comics (les deux ouvrages que je cite dans l'introduction de l'article). À l'époque, j'avais été plus clément, et j'avais mis quatre étoiles à chacun des deux recueils.

      Avec le temps, Flash et Green Lantern sont deux personnages que j'ai fini par prendre en grippe, tant leur folklore et leur mythologie me paraissent ridicules. Cela dit, je préfère Green Lantern à Flash, mais aucun scénariste ne l'a encore traité comme je le voudrais.

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